Algérie - Kateb Yacine

Pièces de Kateb Yacine L'heure est à l'adaptation


Pièces de Kateb Yacine                                    L'heure est à l'adaptation
Evocation - Kateb Yacine s'est admirablement distingué à travers une 'uvre magistrale. Cela fait de lui une école qui, jusqu'à présent, suscite de l'intérêt auprès des chercheurs et universitaires.
Quand on parle de Kateb Yacine, c'est toujours en tant que romancier et notamment en rapport avec Nedjma. Or Kateb Yacine est une dimension pluridimensionnelle, pas seulement l'homme du roman.
Romancier, poète, Kateb Yacine est aussi dramaturge. Ces trois composantes constituent son 'uvre. Mais c'est vers le théâtre que Kateb Yacine s'est tourné.
«Kateb Yacine s'est entièrement consacré au théâtre», dira Waciny Laredj, et d'ajouter : «Il a dirigé le théâtre de Sidi Bel Abbes. Cela lui a permis de mettre en action ses pensées à travers les pièces théâtrales. Le théâtre était essentiel pour lui.»
A la question de savoir ce qu'on pourrait dire du théâtre de Kateb Yacine, Waciny Laredj répondra : «C'est un théâtre très populaire. Kateb Yacine voulait aller vers le grand public, toucher le peuple, alors qu'avec le roman, il s'adressait à une classe privilégiée, ayant la possibilité d'avoir accès à la lecture.»
Kateb Yacine s'est investi dans un théâtre engagé. Pour ce faire, il a fallu
travailler sur le plan du langage.
«A travers ses pièces jouées aujourd'hui, on sent que Kateb Yacine a laissé une trace dans ce langage, c'est-à-dire un langage très profond, humanisé et surtout très populaire, compris par tout le monde», dit-il.
Le théâtre de Kateb Yacine a pu toucher, dans une certaine mesure, une grande partie du public.
«Parce que celui-ci est populaire, c'est un théâtre qui, se jouant dans une salle de théâtre et à l'extérieur, parlait au public, et celui-ci le comprenait», explique-t-il.
A la question de savoir quel lien il y a entre Kateb Yacine le dramaturge et Kateb Yacine le romancier, Waciny Laredj répondra : «Dans l''uvre romanesque de Kateb Yacine, il y a plusieurs dimensions : historique (une Algérie qui n'est pas née aujourd'hui, mais qui vient de très loin), on retrouve les traces de tout ça dans son théâtre, directement ou implicitement. Il y a cette aspiration à la justice (dans le théâtre cela est exprimé d'une façon plus directe), surtout fragmenter l''uvre romanesque et l'ouvrir au théâtre. Même dans ses romans, il y a des traces de théâtre. Cela lui a d'ailleurs permis d'aller vers le théâtre sans difficulté.»
Plus de vingt ans après la disparition de Kateb Yacine, en 1989, que reste-t-il de son legs théâtral '
A cette question, Waciny Laredj répondra : «Ce qui reste de lui c'est ce désir de s'exprimer et d'être compris par l'autre, et cet autre c'est bien sûr le peuple. Aujourd'hui, ses pièces théâtrales n'ont pas besoin d'être reproduites puisque le contexte n'est plus le même. Et si on les reproduit d'une manière directe, on risque de passer à côté de Kateb Yacine. Elles ont plutôt besoin d'être adaptées car Kateb Yacine s'inscrit dans la continuité. Adapter ses textes à notre présent, c'est continuer l''uvre de Kateb Yacine et ça peut aussi satisfaire le dramaturge même s'il est absent.»
- En faisant du théâtre, Kateb Yacine cherchait à s'exorciser, à exorciser son exil. «Kateb Yacine vivait surtout un exil linguistique», précisera Waciny Laredj. Si Kateb Yacine vivait cet exil, c'est parce que l'Histoire l'a voulu ainsi. La langue française était liée à la colonisation, elle était imposée. «C'était le cas de Mammeri, Feraoun, Assia Djebar... Ils avaient le choix, soit de se taire, soit d'écrire dans la langue de l'autre, ils ont préféré la deuxième alternative et ils ont réussi à toucher aussi bien un lectorat algérien qu'un lectorat étranger. Ils ont réussi à faire de la langue française un outil de défense et de dénonciation», poursuit-il, et d'expliquer : «Tous voulaient écrire dans leur langue maternelle. Et chacun a essayé, plus tard, après l'indépendance, de trouver une solution à ce problème, c'est-à-dire toujours ce désir d'aller vers quelque chose qui est resté absent (langue arabe ou berbère). Mammeri s'est orienté vers l'anthropologie, c'est-à-dire s'ancrer dans la société kabyle et la comprendre en profondeur et ce, afin de sortir de cet exil linguistique. Malek Haddad s'est muré dans le silence : il a arrêté d'écrire en langue française. Car il se sentait amputé de quelque chose d'essentiel. Kateb Yacine s'implique aussi dans ce processus de trouver des solutions à cet exil, et c'est dans le théâtre. Pour lui, la seule manière pour s'en sortir est de ne pas se taire, mais d'aller dans le langage populaire. Ses pièces sont le meilleur témoignage de son travail et de ses efforts.» Mais Kateb Yacine ne vivait pas seulement l'exil linguistique, mais aussi géographique. Il vivait d'abord un exil en France, puis il y a eu celui de Sidi Bel Abbes, «mais c'était un exil plus au moins désiré, car il voulait former une troupe dans laquelle il a trouvé la possibilité d'exprimer tout son projet théâtral dans une langue populaire».


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