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On veut coûte que coûte l'artificialité de l'artisanat


On veut coûte que coûte l'artificialité de l'artisanat
S'il y a aujourd'hui en Algérie un sujet de ratage national à traiter, eh bien, c'est bien celui de l'artisanat, à propos duquel il s'agit de tirer la sonnette d'alarme. Pendant l'occupation ou très longtemps avant, les contrées algériennes étaient, dans l'environnement méditerranéen, même au-delà, en Asie et en Europe du nord, les lieux où les métiers de la main, comme on dit, bien plus que le travail de la terre ou l'élevage, faisaient la réputation des régions et localités de l'ensemble du pays, depuis ses lointaines origines numides. Les ancêtres ont veillé, dans n'importe quelles conditions, dans l'espace et dans le temps, à ce que leurs activités ne se départissent jamais des matériaux à produire, préserver et promouvoir pour l'exercice des divers métiers de façonnage. Pour fabriquer les ustensiles liés à la nourriture et à leur conservation, les vêtements et la literie, les articles de la vie domestiques, les outils de travail et les accessoires d'ameublement, du décor et du transport.Jusqu'à la fin de la première décennie après l'indépendance, l'artisanat, dans le sillage de la culture agraire et de l'élevage, faisait vivre plus des deux tiers de la population algérienne, même dans les cités modernes. Vers lesquelles convergeaient les divers matériaux pour la confection des objets dont une grande quantité quittait les ports pour aller concurrencer favorablement les autres produits du monde. Dans le tapis, l'orfèvrerie de l'argent, la poterie, le vêtement de cérémonie, les articles de la vannerie, la maroquinerie, la dinanderie, le travail du bois et du roseau, et cetera. Sur dix travailleurs algériens permanents, à cette époque, avant la nationalisation des hydrocarbures, au moins la moitié exerçait dans un métier manuel, devant une bonne partie qui le commerce. Le problème dans ce domaine d'activité, alors, n'était pas dans sa nature, ses faiblesses ou de ses forces, mais de ses diverses variétés qui ne parvenaient pas à satisfaire la demande internationale férue de terroirs étrangers bien faits.L'Algérie n'était pas touristique parce qu'elle était artisanale, les étrangers de tous les coins du monde, surtout des pays du Nord, venaient en Algérie parce qu'elle a un schéma climatique très favorable au voyage de villégiature, depuis la fraîcheur maritime de la Méditerranée jusqu'à l'aridité majestueuse du Sahara, en passant par les chaînes intermédiaires forestières et les étendues des hautes-plaines de l'est et de l'ouest. Dans l'une ou l'autre de ces régions le touriste apprécie de «visu» les produits de l'artisanat, un tapis ou selle, une besace ou un sarouel, un bracelet ou un panier; il en emmène avec lui en rentrant dans son pays et il en s'en vante, ce qui fait redoubler d'efficacité et de raffinement les artisans algériens visités et incite les compatriotes du touriste à faire comme lui. C'est pourquoi cette idée, qui trotte dans la tête de maints dirigeants algériens, qui consiste à développer le tourisme avec la condition préalable de mettre de l'argent de côté pour inventer des artisans, ne tient pas debout.Une politique pour un retour à la traditionCe n'est pas avec de l'argent qu'on fabrique une tradition, mais par le biais d'une intelligence solidaire et une prise de conscience d'une faillite d'un patrimoine du passé, qui n'est pas définitive. Dont on peut remettre à flots l'intérêt par la réactivation d'une motivation dès l'âge de l'enfance. Où, à ce stade de l'emmêlement des cultures, la campagne vit sous le même schéma que la ville, dans les programmes pédagogiques des écoles, des collèges et des lycées, les dirigeants inscrivent l'apprentissage des métiers -éviter autant que faire se peut le mot «artisanat» parce qu'il renverrait, dans la conscience de l'élève, à des connotations sur l'artificialité, sur ce qui n'est pas sérieux.Quelle est le rôle d'une Chambre de l'artisanat et des métiers et de ses annexes régionales sans une politique de véritable relance des activités manuelles ' Il y a eu des salons, depuis longtemps, des journées d'études, des conférences, même des assises au mois de novembre de l'année 2009, initiées par le chef de l'Etat en personne et qui a fait participé, pendant trois journée entières plus de 1 000 personnes, associées de près ou de loin aux activités de l'artisanat. Le ministre chargé du département de l'Artisanat en cette époque, secteur associé à la PME, parlait de la création d'un million d'emplois grâce à l'artisanat et des revenus en centaines de milliards de dinars dans le cours d'une décennie. Nous voila à la moitié de ce parcours et quelle est la réalité aujourd'hui ' Où sont les dizaines de milliers d'artisans en action, ici et là, dans les cités et les villages et le foisonnement de travailleurs dans le secteur impliqué, les milliards engrangés et les multiples articles du patrimoine reproduits ' Très peu. Encore qu'il s'agit de définir dans les métiers d'artisans. Le peintre bâtiment qui apprend les rudiments de la pratique dans le tas, l'ouvrier mécanicien qui s'initie au moteur dans le garage du voisin ou de l'ami du paternel, ou le mitron qui voit faire un boulanger transfuge d'un commerce de pièces de rechange. Pour dire qu'en vérité on ne sait pas qui est vraiment artisan, capable de confectionner, par exemple, un tapis traditionnel en laine, un plateau de service mauresque en cuivre, une cruche berbère passée au tour, qui ne l'est pas qui fait juste des touches de peinture sur un biscuit avant le four. C'est l'enfance qui décide du devenir du métier disent les pédagogues et c'est dans la prise en charge de ce moment de l'existence que doit se situer le principal souci politique.N. B.




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