Algérie - Divers patrimoine immateriel

Mois du patrimoine , Parures et tatouages féminins d’hier et d’aujourd’hui : la mémoire à fleur de peau



Mois du patrimoine , Parures et tatouages féminins d’hier et d’aujourd’hui : la mémoire à fleur de peau
Incroyable richesse de nos artisanats, de celles que nous efforçons de mettre en exergue à l’occasion du mois du patrimoine (18 avril-18 mai). Sous la moindre parure se cachent des siècles d'histoire. Dans les reflets des bijoux dorment les souvenirs des vieilles cités, des dynasties, des migrations, des contes et légendes qui s’y rapportent...
Pour peu qu'on convienne de la faire remonter jusqu'à ses expressions originelles, l'évolution des arts traditionnels algériens révèle, de nos jours, une survivance au passé assez tenace pour que, dans quelque branche que ce soit, l'art proprement dit pût y trouver, chaque fois qu'il le lui fallait, la sève vivifiante des redressements salutaires. En poterie comme en tissage, en vannerie comme en bijouterie par exemple, cet art aux multiples facettes remonte bien avant l'occupation phénicienne ou romaine et plonge ses racines jusque dans la préhistoire méditerranéenne. Ici quelques pans précieux, sauvés de l’oubli ( ?), de ce patrimoine menacé de déshérence :

Bleu de Mascara, une origine et une histoire algériennes

L'ancêtre du fameux produit mascara n'est autre que la poudre d'antimoine, extraite, naguère, dans la région des hauts plateaux et notamment à... Mascara! C’est un produit cosmétique permettant de souligner les yeux en colorant les cils et en leur donnant plus de longueur apparente. A l'origine, c'était de la poudre d'antimoine. L'antimoine est une poudre noire aux reflets bleutés qu'on concassait et qu'on broyait jusqu'à obtenir une poudre. Les Français l'ont découvert lors de l’occupation de l'Algérie au milieu du XIXe siècle. A l'époque, les tribus nomades et semi-nomades des hauts plateaux l'utilisaient déjà comme produit de beauté, mais aussi à des fins prophylactiques : en l'occurrence pour se prémunir des différents trachomes et maladies des yeux. Son nom, dit-on, vient de la langue anglaise qui elle-même le tire de la langue italienne où mascara veut dire «masque». En 1913, le chimiste T.L.Williams et sa sœur, Maybel, lancent un mascara fait de poussière de charbon mélangée à de la vaseline. Williams vend alors son produit par correspondance et crée une société qu’il appelle Maybelline, combinaison du nom de sa sœur et de «Vaseline». Maybelline est aujourd’hui une importante société appartenant au groupe L’Oréal.

Tatouages féminins des temps jadis

En Algérie, les tatouages étaient souvent pratiqués par les Béni Adès, sortes de tziganes, suspects de sorcellerie, plus maquignons que tatoueurs, ou par les 'Amer, qui leur ressemblaient fort. Réputations peut-être surfaites... En tous cas, la renommée passait parfois en proverbe. A l'époque on prétendait communément, ici et là, qu'il n'y avait de beaux chevaux qu'en «Abda» et de fins tatouages qu'en «doukkala» ; ou encore qu'il n'y avait de jolies femmes qu'en «Abda» et de beaux tatouages qu'en «chaouia»... Selon le témoignage de vieilles femmes aurésiennes au visage ou aux bras tatoués, toutes les tatoueuses n'avaient pas la même technique. Elles pensaient généralement que l'hiver est une mauvaise saison pour tatouer, mais si on les interrogeait, on s'apercevait vite qu'elles n'avaient pas toutes la même pensée sur ce sujet.
Les coutumes des Beni Snouss, par exemple, pouvaient cependant le donner à penser. On croyait, tout au moins dans cette contrée tlemcénienne, que les tatouages avaient une efficacité particulière s'ils étaient pratiqués pour la «'ancera». C'est le jour où les rites prophylactiques avaient le plus d'action et il n'était pas surprenant que le tatouage en bénéficiait.
Dans le prolongement ouest des Beni Snouss, les tatoueuses marocaines ignoraient cette influence alors qu'elles ne manquaient pas de participer à cette fête du solstice d'été avec tous les gens du pays.

Le khalkhal, anneau de cheville à têtes de serpent affrontées

De tous les bijoux traditionnels algériens, celui des Aurès -le Khlhal- est le plus hautement traditionnel. Massif et brut comme les montagnes qui l’ont engendré, il possède une vieille histoire transmise sous forme de légendes. Citons, tant elle est pittoresque, la légende populaire qui se rattache au bracelet «khalkhal» en forme de serpent dont les deux têtes affrontées constituent le système de fermeture :
L'ancêtre des lointaines tribus aurésiennes, Bourak, vieillard centenaire et aveugle de surcroît, avait, de ses deux femmes, deux garçons, Daoud et Abdi, qui engendrèrent les tribus des Ouled Daoud et Ouled Abdi. Tous nomadisaient bon an mal an dans les rudes montagnes des Aurès…Un jour, un gigantesque serpent cerna le campement. S'étant employé, durant trois nuits, à épouvanter ses occupants, le serpent se fatigua. Profitant de ce qu'il dormait, Daoud, le fils ainé, le couvrit d'herbes sèches et le fit brûler.
Du reptile, il ne resta plus qu'un tas de graisse plus ou moins calcinée que les abeilles butinèrent avec joie. Daoud et Abdi craignirent alors que la récolte de miel n'en fut empoisonnée. S'étant concertés au préalable, ils décidèrent de faire goûter le miel à leur père qui, vieil aveugle inutile, était le premier, à leurs yeux, à pouvoir être sacrifié.
Bourak goûta donc le miel, se frotta le visage de ses mains poisseuses et...miracle !, recouvra la vue. Ayant appris la vérité mais plein de joie, il pardonna à ses fils. Se sentant revivre, il exigea d’eux seulement de lui trouver une nouvelle femme. Or, il ne fut qu'une vieille femme, surnommée Aicha la folle, pour consentir à épouser le miraculé. C'est d'elle que naquit la tribu des Ouled Aicha, troisième clan aurésien dont les femmes, depuis son émergence, portent le khalkhal, bracelet à têtes de serpent affrontées.
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