Algérie - A la une

Lettre de province
Par Boubakeur Hamidechi[email protected]/* */«Ça va mal et ça dure» se répètent, sur le ton de la lassitude, les Algériens. Car faute de comprendre où le pouvoir est en train de mener le pays, ils craignent l'imminence de quelques catastrophes au point de se réfugier dans des attitudes individualistes qu'ils considèrent d'ores et déjà comme les ultimes bouées de sauvetage. En se consolant donc comme ils peuvent n'ont-ils pas fini par ne s'intéresser qu'à la survie ' Celle qui passe notamment par l'acquisition des biens de consommation et explicitement celle qui relèvent du domaine alimentaire?! Une préoccupation quasi-quotidienne consistant à scruter la valse des prix dans les marchés pour ensuite évaluer les possibilités des portemonnaies. En soi, l'exercice n'est pas à dédaigner surtout lorsqu'il est exclusivement pratiqué par la ménagère. Laquelle serait, selon les légendes des économistes, la seule à savoir poser les bons diagnostics ! Mais suffit-il seulement d'identifier les causes à l'origine de l'érosion du pouvoir d'achat alors qu'il est impératif d'exiger des explications aux dirigeants quant aux raisons macro-économiques qui seraient en train de ronger la totalité du tissu ' Car ce qui serait tragique à terme n'est pas tant la réduction du train de vie des ménages mais plutôt la perspective d'un dénuement collectif.En effet, contrairement à ce que l'on croit, la pauvreté et la misère sont loin d'être des conditions sociales similaires. Alors qu'il est admis de dire de l'indigence qu'elle n'est qu'une dépréciation économique occasionnelle, l'on omet, par contre, de qualifier la seconde comme un état social définitif. Irrémédiable comme le serait la peine capitale au sens pénal de la référence. C'est-à-dire le point critique d'où l'on n'échappe jamais par soi-même. Le déclassement social à son plus bas niveau. Bref, le 3e sous-sol de la société et la litière de la marginalité. Mais de ce tableau tragique éclairé par tous les clignotants rouges, le gouvernement ne semble pas vouloir en tenir compte. Et c'est d'abord son déni de la réalité qui désempare, une fois de plus, l'opinion publique au moment où les niches de la misère apparaissent un peu partout. Avec le retour d'une inflation à deux chiffres (n'a-t-elle pas progressé de 5,4% en moins d'une année?') et un tissu industriel qui demeure en friche, la politique de l'emploi n'est-elle pas à son tour mise à l'index 'En effet, dès l'instant où même le ministre chargé de l'animer en vient à mettre en exergue l'existence de milliers d'emplois saisonniers dans l'agriculture et les centaines d'autres précaires dans le BTPH, l'on apprécie la rouerie politicarde dont se sert le gouvernement pour maquiller la panne. C'est que durant des années, la valse des doctrines économiques destinées à remettre sur les rails l'activité du pays et la relance d'une production nationale ont toutes buté, à la fois, sur le mur de l'informel contrèlant l'importation tout autant que la corruption ayant pris en otage les projets structurants financés par l'argent public. Or, dans le contexte particulier où les perspectives économiques sont de plus en plus sombres à la suite de l'effondrement des recettes pétrolières, les pouvoirs publics (ou du moins ce qu'il en reste tant l'influence des lobbies est prégnante au sein de l'appareil d'Etat) n'ont-ils pas pour devoir d'associer des experts au-dessus de tout soupçon d'intérêts afin qu'ils établissent un plan qui s'apparenterait à ce qui se fait dans les situations de catastrophe. Une procédure semblable au plan Orsec destiné à secourir une économie demeurée sous l'influence des prédateurs. Hélas, il n'en sera rien. Ainsi, Sellal «and co» ont-ils décidé de recourir à la même formule qui, depuis 29 années, avait servi de feuille de vigne aux pouvoirs.La fameuse tripartite d'où ne sortirent que des recommandations abstraites mais suffisantes pour valider une échéance de plus dans la même praxis. En effet, par son insoutenable carence d'imagination et de clarté dans les objectifs, le pouvoir réactive un simple cadre technique de concertation toutes les fois où l'urgence le lui impose. Autrement dit, il n'a eu de cesse de tirer profit d'une «boîte à outils» datant de 1997 jusqu'à lui servir actuellement d'institution de régulation économique alors qu'elle n'était qu'un cadre étriqué dédié à la négociation, voire à l'élaboration des consensus. C'est par conséquent au moment où l'opacité sur la légitimité même du pouvoir est à l'ordre du jour que le recours à cette fausse concertation se multiplie.En effet, moins d'un an après le cérémonial de Biskra, le Premier ministre vient de donner un feu vert à un autre rituel pour le 5 juin prochain qu'il avait déjà placé sous le thème du «pacte social pour le changement global». Or, la singularité de cette annonce n'est-elle pas soulignée par l'indigence criante du sommet de l'Etat dans le domaine doctrinal ' Alors qu'il navigue, depuis deux années au moins, sans ligne d'horizon, est-il encore en mesure d'énoncer avec précision la problématique dans tous ses aspects 'Non seulement du point de vue économique mais également dans la formulation, sa réactivité est notoirement désordonnée. De plus, cette dernière renseigne sur la qualité intellectuelle du personnel qui exerce des responsabilités au sein de cet exécutif. En déficit donc sur ce double plan, que reste-t-il désormais à ce gouvernement pour se dédouaner auprès de l'opinion sinon la manœuvre médiatique afin de maquiller le chaos dont il a été à l'origine.En clair, le fait de convoquer une tripartite à la veille de la parenthèse estivale ne caricature-t-il pas la fébrilité qui est en train de s'emparer des chambellans de la maison du pouvoir ' Même esquissés à grands traits, leurs desseins ne suggèrent-ils pas la gueule de bois de tous les lendemains de l'ivresse du pouvoir”? '
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