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Les raisons de l'échec et les moyens de redressement



Les raisons de l'échec et les moyens de redressement
Hier, les travaux ont été organisés en deux ateliers : le premier avait pour mission de diagnostiquer l'état des lieux au sein de cette gauche et définir les défis qui l'attendent, les participants au deuxième devaient, quant à eux, dessiner l'ébauche de la stratégie des moyens pour faire face à ces défis.Entre pessimisme intellectuel et optimisme de la volonté. La vieille formule de Gramsci plane depuis deux jours au-dessus de l'élite de la gauche arabe réunie à Tunis par le Monde Diplomatique (version arabe) dans le cadre des premières rencontres intitulées «5 ans après le printemps 2011, défis, tâches et stratégies des moyens des gauches arabes».L'ambiance des discussions, en aparté comme autour des tables de travail, reflétait ce ballottage entre deux attitudes. L'une illustrant la lassitude des militants de gauche devant des horizons flous, la dislocation des rangs et l'incapacité à accompagner les poussées populaires, et l'autre l'espérance et la disposition inspirées de la nature humaniste de cette tendance et sa solidarité inconditionnelle avec les opprimés.Au siège de la fondation Rosa Luxemburg de Mutuelle Ville dans la capitale tunisienne, les participants ont avancé laborieusement hier pour unifier les points de vue qui diffèrent afin de définir les mouvements de changement qui traversent les pays arabes et l'inertie qui caractérise la gauche dans cette sphère géographique.Ceci malgré le récit collectif et les grilles de lecture empruntées au même corpus doctrinal. Il y a eu consensus, toutefois, pour dire que les référents conventionnels ont montré leurs limites, d'où l'incapacité des partis de gauche à accompagner les transformations et les nouvelles exigences sociales «nées de l'échec des bourgeoisies arabes à mener à terme le projet d'édification des Etats-nations».C'est aussi Gramsci qui disait que les différentes gauches ont échoué dans leur projet de lien «organique» avec le peuple. Sentence partagée par Djamel Zenati, ancien député du FFS, en rupture de ban avec ce parti, pour qui la gauche a failli à sa mission dans un contexte de guerre des empires, de capitalisme en folie et de terrorisme transnational. En ce qui concerne le monde arabe, les causes responsables du recul de la gauche sont nombreuses et diffèrent dans ses détails d'un pays arabe à l'autre, en raison des contextes et des spécificités économiques et sociales.Etat des lieuxHier, les travaux ont été organisés en deux ateliers. Le premier avait pour mission de diagnostiquer l'état des lieux au sein de cette gauche et définir les défis qui l'attendent. Les participants au deuxième atelier devaient, quant à eux, dessiner l'ébauche de la stratégie des moyens pour faire face à ces défis. Débats auxquels avaient pris part aussi des représentants de Podemos l'Espagnol, Syriza le Grec et des formations de France, de Belgique et de Pologne. Les débats, certes riches, ont avancé lentement, compte tenu du tâtonnement dû manifestement à la rareté des espaces d'échange.Les Tunisiens en force appellent à redéfinir la gauche, arguant du fait que le concept de révolution socialiste a changé et assimile aujourd'hui de nouveaux sujets d'intérêt, comme les droits de l'homme et l'environnement, sans perdre de vue le contexte de mondialisation imposé par «l'empire» capitaliste en position hégémonique depuis l'effondrement du bloc Est.De par leur expérience avant-gardiste, d'acteurs indéniables dans la révolution de 2011 et éléments incontournables dans la construction de l'avenir du pays, les cadres de la gauche tunisienne veulent repousser les limites de l'identité politique de la gauche, «devenue une prison», afin de pouvoir accueillir de nouvelles forces apparues dans le sillage des développements et des révoltes récentes. Faute de quoi, cette gauche serait menacée dans son existence. Des positions contradictoires ont été exprimées, notamment par les représentants égyptiens et d'autres qui ont averti que l'autoflagellation est contre-productive.De son côté, Hassan Madan, du Bahreïn, a souligné dans sa contribution que l'une des causes de l'échec du «printemps arabe» est liée à la faiblesse de la gauche arabe, qui est induite par trois facteurs : d'abord l'ampleur du despotisme, ensuite le rôle dangereux des puissances régionales pour faire dévier les mouvements de protestation et la désolidarisation de l'Occident des forces démocratiques sur place, et enfin la faiblesse des institutions de la société civile et le rôle ténu joué par les progressistes et les forces de gauche, notamment à cause de la répression et la marginalisation subies face à la bipolarisation des régimes corrompus/islamistes.Eléments de propositionsSelon Fathi Koleib, membre du Front démocratique de libération de la Palestine (FDLP), «les partis de gauche ayant élaboré les programmes de lutte et participé avec efficacité à dessiner les projets de libération nationale et démocratique dans leurs pays respectifs, sont appelés aujourd'hui, plus que jamais, à être le fer de lance des mouvements populaires et le moteur principal de la révolution et du changement dans leurs sociétés».Mais cela suppose, poursuit-il, une double révolution, interne et dans la relation avec les autres, pour essayer de solutionner l'état d'affaiblissement politique, intellectuel et organisationnel caractérisant la plupart des mouvements de gauche qui sont appelés, entre autres, à revoir et critiquer l'expérience de la gauche arabe durant l'étape précédente, riche d'enseignements, et appréhender la question de la démocratie et lui donner la primauté dans la vie interne des partis. Le défi est si grand pour cette mouvance aussi qui doit, selon Djamel Zenati, «retrouver ses capacités d'analyse, d'anticipation, de proposition et d'encadrement du mouvement social. Il est impératif de mettre la question sociale au c?ur de la problématique démocratique.Elle constitue l'unique voie à même de susciter l'émergence d'une conscience saine, insensible au clientélisme autoritaire et imperméable à la corruption communautariste». Hier aussi, la représentante du MDS, Messaouda Cheballah, a partagé la proposition de son parti de dresser un Nuremberg du terrorisme islamiste comme condition sine qua non pour assainir les règles du jeu démocratique et priver aussi bien les régimes despotiques et corrompus que les partis de la mouvance islamiste, du levier de la terreur utilisé comme obstacle devant la participation des populations et surtout les forces politiques du changement, à leur tête les mouvements de gauche. Les débats se sont poursuivis jusqu'à une heure tardive, interrompus par une participation à l'hommage rendu à Ahmad Ibrahim, le leader du parti de gauche, Al Massar, disparu voilà 40 jours.


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