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Les miraculés du «terrorisme routier» occupent 50% des lits




Les miraculés du «terrorisme routier» occupent 50% des lits
Les chiffres macabres du «terrorisme routier» continuent de tomber chaque jour avec leur lot de victimes qui viennent élargir les longues listes des rescapés condamnés à vie.Alors que le nombre d'accidents de la route est en nette augmentation dans notre pays, avec un triste palmarès de plus de 4000 morts annuellement et plus de 60 000 blessés, les structures spécialisées dans la prise en charge de ces personnes font, quant à elles, sérieusement défaut. L'établissement hospitalier spécialisé de rééducation et réadaptation fonctionnelle Kasdi Merbah de Tixeraïne (Alger), un centre à vocation nationale, illustre bien le drame causé par ces accidents de la route et le dur quotidien des victimes. Des blessés médullaires affluent chaque jour de tout le territoire national vers cet hôpital de 24 lits, qui sont quotidiennement occupés à 50% durant des mois, voire des années par ces victimes qui finissent tétraplégiques ou paraplégiques.Des patients qui arrivent après avoir été, bien sûr, pris en charge dans les services d'urgence en neurochirurgie, en maxillo-facial et en chirurgie orthopédique. Avec un taux d'occupation de 100%, le centre est aujourd'hui dépassé et a atteint les limites de ses moyens humains et matériels. Pour le professeur Amara Djelloul, chef de service, la problématique des accidents de la route est très complexe et la prise en charge des victimes l'est aussi. Pour lui, il y a un gros travail à faire auprès des accidentés bien avant qu'ils n'arrivent à l'hôpital. Des précautions à prendre durant l'évacuation pour justement éviter de graves complications. Il s'agit donc, outre la prévention routière, d'organiser les secours de ces blessés qui doivent être adaptés, voire médicalisés, et dirigés vers des services spécialisés dans les plus brefs délais.«Ils sont nombreux à arriver chez nous après être passés dans de nombreux services dans un état lamentable et critique. Les patients souffrent de complications orthopédiques, respiratoires, urinaires et cutanées très graves, telles les escarres qui ne relèvent pas de la rééducation. Ce qui nécessite des moyens humains en quantité et en qualité et du matériel 24h/24, d'autant qu'ils sont condamnés à rester hospitalisés des mois, voire des années. Ce sont des patients sujets à des infections multiples, il est donc important d'assurer une assistance pour l'hygiène corporelle quotidienne, une surveillance et des traitements. La rééducation fonctionnelle que nous sommes censés assurer ne vient qu'en seconde phase. Le renforcement d'un personnel spécialisé et plus qu'urgent»,explique le Pr Amara.Une activité qui n'est pas facile à assurer lorsque le nombre de malades dépasse les normes requises en matière de prise en charge, a-t-il indiqué. «Il faut souligner que notre centre est à vocation nationale et n'accueille pas seulement les accidentés de la route, mais des victimes d'accidents du travail (chutes pour les travailleurs en bâtiment, lors de la cueillette des olives, accidents suite aux plongeons, malformations congénitales, etc.). Ce sont généralement les garde-malade, membres de la famille des victimes, qui aident énormément les infirmiers et infirmières motivés, à qui je rends un grand hommage, mais cela n'est pas suffisant», a-t-il ajouté.Le centre de Tixeraïne a atteint aujourd'hui ses limites et est en saturation. Le Pr Amara compare la situation à un entonnoir évasé à l'entrée alors que la sortie est toujours la même. «Ces patients sont condamnés à des hospitalisations de longue durée, à des consultations de contrôle, à la réhospitalisation en attendant que d'autres arrivent tous les jours dans des situations aussi dramatiques», a-t-il signalé avant de déplorer les mauvaises conditions de prise en charge. Outre l'indiscipline de certains paramédicaux, les travaux de réfection dans les pavillons où les malades sont hospitalisés rendent la tâche encore plus compliquée et plus ardue.Actuellement, les salles de rééducation sont mobilisées pour des travaux d'extension inutiles, décidés par la direction sans l'avis du chef de service, qui déplore aussi la mauvaise qualité des lits d'hospitalisation, inadaptés pour les patients tétraplégiques et paraplégiques. Le professeur Belmihoub Abderrazak, médecin rééducateur et chef d'unité appareillage à l'hôpital de Tixeraïne, est tout aussi alarmé par le nombre de victimes d'accidents de la route qui arrivent au service. Un fléau qui prend de l'ampleur et qu'il faut prendre au sérieux, suggère-t-il. Il estime que les campagnes de sensibilisation ne suffisent pas pour endiguer ce phénomène. «Il faut choquer par les images et les témoignages des victimes.»Le Pr Belmihoub déplore, par ailleurs, l'absence de centres hospitaliers dédiés à ces victimes qui ont à l'origine une simple fracture des membres qui nécessite des soins spécialisés, et en arrivent à l'amputation ou à la paralysie, non sans conséquences néfastes sur leur existence. «Ces patients ont besoin de petits et grands appareillages dont les coûts varient entre 50 000 et 200 000 DA. Entre 30 et 40% des lits du service sont occupés par les victimes de la circulation, mais il faut savoir que le personnel n'est pas formé pour ce type de pathologies. L'hôpital subit en fait l'insuffisance des autres secteurs», a-t-il signalé. Pour lui, un programme national pour la prise en charge des victimes s'impose, avec la création d'hôpitaux au niveau national, dédiés spécialement aux accidentés de la route et dotés de personnel médical qualifié.




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