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Les 3 continents, le Festival qui fait pitcher le Sud



Les 3 continents, le Festival qui fait pitcher le Sud
Les ateliers Produire au Sud de Nantes, rattachés au festival nantais qui s’est achevé ce 28 novembre, souffle ses 20 bougies cette année. Leur formation à destination des professionnels du cinéma d’Afrique, d’Amérique latine et d’Asie se veut être une “bulle bienveillante d’accompagnement”.
C’est une journée de novembre au froid saisissant. On se frotte les mains en soufflant dans la file d’attente qui s’étire devant le cinéma Katorza, à Nantes. Les duos de réalisateurs et de producteurs qui participent au programme Produire au Sud, rattaché au Festival des 3 continents, ne vont plus tarder à pitcher leur projet.
Produire au Sud fête ses 20 ans cette année. En 2000, le festival s’interrogeait sur les possibilités de renouvellement de son attractivité en dehors de l’effet de programmation. Plusieurs festivals se dotaient alors de programmes professionnels, mais il n’existait pas de formations permettant à des projets extra-européens d’émerger.

Effet machine à laver

La productrice Élise Jalladeau a donc souhaité que des réalisateurs et des producteurs des trois continents couverts par le festival (Afrique, Amérique latine et Asie) puissent se rencontrer. L’objectif : établir un langage commun sur les pratiques afin que chacun trouve sa place dans la chaîne de production d’un film. « À cette époque, un certain nombre de pays de ces continents n’avaient que très peu de structures dans la filière cinématographique », explique Guillaume Mainguet, directeur actuel de Produire au Sud.

Formuler, reformuler son projet. Voilà l’essence du programme organisé pendant le festival. Les participants arrivent avec une ébauche et assistent à des sessions individuelles et collectives. « Cet effet de machine à laver les assure qu’ils parlent bien du même projet et qu’ils peuvent, au sein du binôme, poser les bases de la meilleure stratégie de production ou poursuivre le travail sur le développement du scénario », précise le directeur. En milieu de semaine arrive le temps des « pitchs », sorte de climax de la formation. « Il s’agit de la partie émergée de l’atelier. Les binômes sont face à des festivaliers, des étudiants en cinéma et quelques professionnels que j’ai invités. Ce n’est pas un marché, c’est un entraînement. »
“Participer à l’atelier nous permet de sortir de notre pays et de parler de son histoire.”
Devant l’écran du cinéma, après avoir « pitché », tous les tandems sont réunis. Les Népalais Kiran Pokharel et Sushant Shrestha, expliquent, très touchés : « Présenter notre projet et participer à l’atelier nous permet de sortir de notre pays et de parler de son histoire. » « C’est pour nous l’occasion de découvrir des pratiques différentes et de nous aider mutuellement », ajoutent Sheetal Magan et Carol Kioko, venues du Kenya et d’Afrique du Sud.

Les six duos présents ont été sélectionnés sur près de cent cinquante candidatures. L’intérêt pour le programme explique la multiplication, depuis quelques années, des ateliers Produire au Sud à l’étranger. Cette implantation à un niveau plus local permet d’avoir des équipes proches des réalités nationales et régionales. Il en existe dorénavant à Taïwan, en Thaïlande, en Israël, en Afrique du Sud, en Inde et au Maroc.
Yona Rozenkier, réalisateur du très beau Un havre de paix (2018), est passé en 2016 par Produire au Sud à Sdérot, en Israël. Son film, l’histoire d’un jeune homme victime d’un syndrome post-traumatique à la suite de son service militaire (obligatoire de 18 à 21 ans), était inspiré de son expérience personnelle et interprété par ses frères et lui-même. « Tous les fonds israéliens nous ont dit qu’ils aimaient le scénario mais que si je voulais obtenir un financement pour ce film, il fallait que je prenne de vrais acteurs. »

Impensable pour Yona Rozenkier. Produire au Sud lui a alors permis d’obtenir une aide extérieure, pas financière mais en termes de rencontres et de formation. « Le fait d’être choisi par le programme a fait qu’en Israël on nous a regardés un peu différemment, et on a donné plus d’attention au projet. C’était vraiment un tournant, parce que j’ai appris à pitcher et j’y ai rencontré des personnes qui sont devenues des collaborateurs et des amis. Surtout, c’est arrivé à une période où je me sentais très seul, où je remettais en question mes choix de vie. »
Des coproductions entre pays du Sud

Fêter ses 20 ans est l’occasion pour Produire au Sud de faire le bilan. Les réalités de l’Europe et des trois continents du festival ne sont plus les mêmes qu’à sa création. De nouvelles possibilités et méthodes de production ont émergé depuis quelques années, n’émanant plus seulement du « Nord. « La notion de coproduction, quand on en parle au sein des ateliers, ce n’est plus uniquement entre le pays d’origine des participants et l’Europe, ça peut être coproduire avec ses voisins, de “Sud à Sud”, affirme Guillaume Mainguet. Mais si Produire au Sud continue d’exister, c’est qu’il subsiste un déséquilibre. L’atelier reste une bulle bienveillante d’accompagnement pour aider certains producteurs et cinéastes à trouver la voie de la réalisation et peut-être lancer des vocations ou confirmer des envies très fortes de cinéma. »
Quarante ans du Festival des 3 continents, quarante ans de défrichage sans frontières
Cinéma
Dans la salle, c’est l’heure pour les douze participants de quitter le devant de la scène. Ils vont se remettre au travail pendant quelques jours. Avant de repartir avec des outils pour la suite, riches de rencontres et de motivation.

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