Algérie

Leçon d?histoire




La célébration du 50e anniversaire de la conférence de Tanger aurait pu être un moment historique fort dans les relations intermaghrébines forgées dans les années de lutte commune pour le recouvrement de la souveraineté nationale. Le conflit du Sahara occidental et l?obstination du Maroc à vouloir saisir la moindre occasion, investir le moindre espace public pour tenter d?influer sur le cours des événements et imposer l?option marocaine de l?autonomie du Sahara sont venus encore une fois rappeler à Tanger que la construction du Maghreb ne peut pas se faire contre la volonté de tous les peuples de la région sans exclusive. En instrumentalisant politiquement cette date anniversaire chère dans le c?ur des Algériens et des peuples de la région qui n?ont pas attendu la création de l?Union du Maghreb arabe pour réaliser que leur destin est commun, le Maroc a une nouvelle fois raté la marche de l?histoire tout en éloignant, au plan régional, la perspective de la construction maghrébine et, sur un plan bilatéral, la normalisation des relations algéro-maghrébines. Fallait-il attendre autre chose de Rabat même dans des occasions aussi symboliques que la conférence de Tanger qui devrait naturellement inciter les Etats de la région à remiser au placard leurs dissensions pour un ressourcement partagé, puisé dans l?histoire commune écrite en lettres de sang ? En se faisant représenter à un haut niveau par M. Belkhadem qui avait participé aux festivités non pas seulement en tant que secrétaire général du FLN, mais aussi (officiellement ou non) en tant que chef du gouvernement, bien qu?il n?ait eu au programme de la visite de Belkhadem aucune activité officielle, l?Algérie a voulu témoigner de son attachement à cette page glorieuse de l?histoire maghrébine en marquant cette date anniversaire du sceau de l?Etat. L?Algérie aurait pu faire de cet événement une affaire strictement partisane en mettant en réserve le secrétaire général du FLN pour éviter tout amalgame comme cela fut le cas avec la polémique qui avait opposé Belkhadem à un membre du gouvernement marocain sur l?affaire du Sahara occidental. On aurait bien pu laisser le soin au FLN de se faire représenter par une délégation qui n?a aucun lien avec l?Exécutif. L?Algérie a-t-elle fait preuve de bon sens historique en déléguant à Tanger Belkhadem ou a-t-elle manqué de lucidité politique en l?envoyant au charbon dans des conditions politiques tendues marquées ces dernières semaines par un forcing de Rabat pour la réouverture des frontières terrestres avec l?Algérie ? Une demande poliment rejetée par l?Algérie qui pose le problème de la normalisation dans sa globalité. Le fait que Belkhadem n?ait pas eu un agenda officiel en tant que chef du gouvernement à l?occasion de son déplacement à Tanger est un geste politique majeur qui signifie qu?Alger ne voit pas dans la conjoncture présente la nécessité de rencontres politiques à un haut niveau. En d?autres circonstances, tradition et hospitalité obligent, un chef du gouvernement, même s?il se déplace dans un cadre partisan ou privé, est toujours reçu royalement surtout dans des pays supposés frères. Le fait que M. Belkhadem n?ait pas été reçu à titre officiel à un haut niveau par le Premier ministre marocain et par le souverain marocain, sans doute parce que l?Algérie n?en a pas exprimé le v?u, est un signe patent que les relations politiques entre les deux pays se sont détériorées à la faveur des développements de l?affaire du Sahara occidental. Le dérapage du ministre marocain a-t-il tout fait capoter ? L?Algérie a-telle été piégée ? En voulant placer la mémoire et l?histoire au-dessus des contingences politiques l?Etat ? parce que qu?on le veuille ou pas, sa responsabilité est directement engagée à travers l?incident diplomatique regrettable survenu à Tanger de par la présence de Belkhadem aux festivités ? l?Algérie a agi par naïveté ou ignorance en voulant croire que l?histoire s?écrit encore au passé et que les réalités du présent ne pourront jamais parasiter les relations entre Etats puisées d?une histoire commune que l?on pensait apte à résister à tous les aléas de la politique. La mise au point de Belkhadem aux déclarations du ministre marocain qui demandait, un rien provocateur, à l?Algérie de soutenir le projet marocain d?autonomie du Sahara occidental s?imposait et grandit l?Algérie qui a donné aux autorités marocaines une belle leçon d?histoire et d?humilité en leur rappelant que l?histoire et les principes de soutien de l?Algérie à l?indépendance des peuples sous domination ne se marchandent pas.

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