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Le phénomène prend de l'ampleur à Relizane



Scolarisés ou non, des enfants travaillent dur pour gagner quelques dinars. Au chef-lieu, il n'y a pas un marché, un quartier ou une ruelle où on ne les trouve pas à proposer toutes sortes de produits à vendre.Dans la wilaya de Relizane, on en voit de tout : des enfants qui sont obligés par leurs parents de se lever tôt pour mendier, d'autres pour aller travailler, d'autres contraints par leurs parents à marcher pieds nus pour inciter les âmes charitables à leur faire l'aumône. Mais ce qui est le plus à plaindre, c'est ce phénomène de l'exploitation de l'enfant par les adultes sans qu'aucune institution légale intervienne pour dénoncer cet abus ou pour au moins sensibiliser les parents aux dangers auxquels sont exposés leurs enfants qui s'adonnent à des travaux réservés aux adultes, comme déplumer et vider des milliers de poulets, un travail malsain qui est fait de nuit, loin des yeux, le chargement de camions au marché de gros, le lavage de voitures, le ramassage de la pomme de terre dans les champs ; bref, autant de travaux pénibles qui peuvent affecter l'enfant.
Cet état de fait est généré par la détérioration de leurs conditions sociales, et le plus souvent le chômage auquel le chef de famille est confronté. À Relizane, il n'y a pas un marché, un quartier ou une ruelle où on ne trouve pas des enfants qui proposent des produits à vendre. Ils vendent de tout : des sachets en plastique, du pain traditionnel, des cigarettes... Lors de notre virée dans deux marchés de Relizane-ville, nous avons accosté des enfants innocents en train de vendre leur marchandise. Nous nous sommes rapprochés de ces chérubins.
Amine, un enfant de 14 ans, élève scolarisé en troisième année moyenne, nous dira : "Nous survivons au jour le jour, sans savoir si nous avons un passé ou un avenir. Nous sommes attachés au sol, préoccupés surtout de ce que nous mangerons demain". Mohamed, 13 ans, se confie : "C'est plus fort que moi, je suis obligé de travailler pour subvenir aux besoins de ma famille. Mon père a eu un accident et il ne peut pas travailler. C'est pour cela que je suis obligé de me lever tôt pour aller travailler."
Si dans plusieurs pays le dispositif législatif relatif à la protection des droits de l'enfant est suivi à la lettre, chez nous, par contre, il n'est jamais appliqué. Un jeune mineur de 15 ans nous raconte, les yeux cernés : "La pauvreté m'a poussé à entrer dans le monde du travail tôt suite à l'expiration du contrat de travail de mon père qui était gardien dans une école, avec un salaire dérisoire. C'est pour cela que j'ai quitté les bancs de l'école pour subvenir aux besoins de ma famille." D'autres frappent aux portes pour chercher du pain rassis ou des produits recyclables. Nombreux sont les enfants qui sont obligés de travailler pour survivre.
Des personnes n'ayant pas atteint l'âge de la majorité s'adonnent à de pénibles besognes pour aider leur famille à subsister. "Aucun contrôle ne peut se faire sur ces enfants qui travaillent dans les rues, les champs ou les commerces, car aucune disposition n'existe dans la loi du travail les concernant", affirme avec regret un cadre de l'inspection du travail, car il faut savoir que la loi 90-11 ne protège que les enfants âgés de moins de 16 ans qui ont un emploi à travers un contrat de travail et ne protège pas ces centaines d'enfants qui travaillent hors du circuit légal, selon l'inspecteur du travail. Dans le but de faire face à ce phénomène, la direction de la jeunesse et des sports, en collaboration avec l'Odej (Office des établissements des jeunes), organise depuis juillet dernier une campagne de sensibilisation et d'information dans les Odej. Au programme de cette manifestation, des conférences-débats, des sketchs, des animations encadrées par des psychologues.
Dans cette wilaya, de nombreux enfants sont disponibles et ne rechignent pas au travail. Il suffit d'installer des étals de fortune ou d'exposer sa marchandise dans des paniers à même le trottoir. Meriem M. A., psychologue dans un établissement scolaire, pense que la situation actuelle des enfants "exploités" est dramatique.
La gravité de la situation est illustrée le long des autoroutes. Le travail des mineurs compte aujourd'hui parmi les problèmes qui affectent le plus notre société. Il met en difficulté la santé morale et la sécurité physique des enfants. Exposés à toute forme d'exploitation dans différents secteurs d'activité, notamment celui du bâtiment et de l'agriculture, nos enfants sont en danger, dit-elle. Selon le chargé des affaires de la famille à la direction de l'action sociale de Relizane, la pauvreté oblige les parents à envoyer leurs enfants travailler pour subvenir aux besoins de toute la famille.
L'accès difficile à la scolarité, l'éloignement géographique et le faible niveau d'éducation et d'information des parents sont autant d'obstacles et de facteurs aggravants.
E. Yacine


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