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Le Maghreb sur une poudrière



Le Maghreb sur une poudrière
La colère du rifLes indications chiffrées de la situation financière des deux pays voisins de l'Algérie ne leur laissent pas beaucoup de marge.La situation économique de l'Algérie a constitué l'essentiel des «rapports» et autres commentaires de spécialistes, ces trois dernières années. La chute des prix du pétrole auront été pour nombre d'observateurs le principal indicateur de leurs analyses, estimant qu'une grave crise économique en Algérie engendrerait une situation catastrophique pour tout le Maghreb. Les années sont passées et l'économie nationale a montré un niveau de résistance remarquable, de sorte que les mêmes experts ont changé de ton et évoquent aujourd'hui un accompagnement par les institutions financières internationales sur le nouveau modèle de croissance. Ce qui peut paraître aujourd'hui, comme une bonne nouvelle, aux yeux du FMI et de la Banque mondiale, constitue, en fait, la seule raison d'espérer une évolution positive de la situation économique et sécuritaire pour la région du Maghreb. Et pour cause, les observateurs attentifs de toute la région notent avec une certaine inquiétude une résistance beaucoup moins robuste des indices économiques du Maroc et de la Tunisie.Les chiffres macroéconomiques de ces deux pays n'appellent pas à l'optimisme. Et pour cause, la Tunisie a clôturé l'année 2016 avec un déficit commercial de plus de 5 milliards de dollars, en hausse par rapport à 2015. Pour le Maroc, la situation est bien plus critique, puisque le déficit commercial a été estimé en 2016 à 17 milliards de dollars, également en hausse en comparaison avec l'année précédente. Les deux pays affichent une dette extérieure qui dépasse les 50% de leur PIB, avec près de 8 milliards de dollars pour la Tunisie et quelque 30 milliards de dollars pour le Maroc. A ces chiffres pas très reluisants et qui se dégradent d'année en année, il faut ajouter celui des réserves de changes. Ce matelas financier nécessaire pour tout Etat n'est que de 4,93 milliards de dollars pour la Tunisie et quelque 22 milliards de dollars pour le Maroc. Ces indications chiffrées de la situation financièrs des deux pays voisins de l'Algérie ne leur laissent pas beaucoup de marge et les gouvernements marocain et tunisien sont systématiquement soumis à la dure réalité des arbitrages. Cela a forcément un impact sur le front social et cela se voit depuis des mois dans les deux pays. La population du Rif marocain qui s'est soulevée à la suite de la mort d'un vendeur de poisson dans des conditions suspectes incriminant des policiers, ne décolère toujours pas, près de 7 mois après l'incident. Les manifestations se font quasi quotidiennes et les revendications de plus en plus politiques. Les meneurs de la constatation dans la ville de Al-Hoceima défient Rabat et lui rappellent le caractère traditionnellement frondeur de cette région, mais cette fois, avec un discours structuré et un mouvement, «Hirak», très organisé et qui prend de l'ampleur à mesure que la répression augmente. Le principal leader du «Hirak», Nasser Zefzafi, poursuivi par la justice marocaine, passe pour un véritable résistant au yeux des habitants du Rif qui ont organisé une marche imposante pour marquer leur soutien au blogueur, qui n'a pas sa langue dans sa poche lorsqu'il s'agit de critiquer le Makhzen.La situation dans le Rif est à deux doigts d'échapper au contrôle du gouvernement, lequel n'a pas réussi à convaincre les habitants de la région frondeuse de sa légitimité acquise par les urnes. De fait, le Maroc est dans une sorte d'impasse, puisque les réformes politiques engagées par Mohammed VI, dans la foulée du printemps arabe, ne parviennent pas à solutionner la crise du Rif. En plus de l'absence de l'outil politique, il est entendu que le royaume ne dispose pas de moyens économiques. Il lui est quasi impossible de répondre positivement aux revendications de la population pour d'évidentes raisons financières. Les chiffres de l'économie n'étant pas bons, et l'offre politique inopérante, le Maroc est, pour ainsi dire, dans un cul-de-sac d'où il est difficile d'en sortir, d'autant que ce pays vit à plus de 20% de son PIB sur le trafic de drogue. L'économie criminelle étant ce qu'elle est, on imagine mal le roi agir dans un sens ou dans l'autre, sans l'assentiment des barons de la drogue. Le piège ne date pas d'hier, mais l'explosion sociale crainte par nombre d'observateurs, pourrait déboucher sur une situation de chaos dans ce pays. Cette grande fragilité du royaume qui commence à peine à susciter l'intérêt des «experts» est bien plus importante que celle de l'Algérie et constitue, disent les mêmes experts, un véritable foyer de tension dans la région, à surveiller de très près. En face du Maroc, le pays de la «révolution du Jasmin» traverse une période très critique au plan socio- économique. Les stigmates de «la révolution» et les promesses non tenues des Occidentaux, ont créé un état de délabrement de l'économie, au point où le président Beji Caïd Essebsi s'est vu obligé de recourir à l'armée pour protéger des sites de production. Les mouvements de grèves et les manifestations quasi quotidiennes dans ce pays, notamment dans de nombreuses villes du sud du pays, dont Tataouine, font écho aux difficultés réelles de l'économie tunisienne qui ne parvient pas à créer suffisamment d'emplois. L'ampleur de la colère populaire dans ce pays fait craindre un effet dévastateur sur l'économie. Les Tunisiens qui s'élèvent contre une mauvaise distribution des richesses et la corruption ne semblent plus sensibles aux actes symboliques et aux effets de manche de leurs dirigeants. La pression qu'ils exercent sur le pouvoir pourrait être détournée, comme au Maroc d'ailleurs, par des forces hostiles à la stabilité du Maghreb.Il faut dire que si les deux pays ne parviennent pas à une stabilité dans les toutes prochaines années, le cauchemar des Occidentaux ne sera pas le centre du Maghreb, mais ses ailes...


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