Algérie

Le grand bazar




Ce qui particularise l?Algérie d?aujourd?hui, c?est bien cette énorme quantité de biens de consommation, de toute nature, qui se déverse dans les marchés et les boutiques, importés de tous les coins de la planète, souvent de qualité douteuse. Cette abondance distingue l?Algérie actuelle de celle des décennies 1960 à 1980 lorsque la pénurie était reine des lieux. Le paradoxe est qu?elle intervient à un moment où la classe moyenne, celle qui traditionnellement consomme le plus, est laminée, ce qui n?était pas le cas auparavant. Réduit aujourd?hui à une peau de chagrin, son pouvoir d?achat ne sert qu?à la satisfaction des besoins les plus essentiels, notamment alimentaires. L?Algérien dit moyen n?existe pratiquement plus de nos jours ; il est riche ou pauvre, mais de loin beaucoup plus pauvre que riche. Et si des millions de personnes sont carrément démunies et relèvent de l?assistanat public ou de l?entraide sociale, en revanche, le niveau de vie d?une minorité n?a rien à envier à celui des pays développés. Le marché algérien, que le discours officiel met constamment en avant pour attirer les investisseurs étrangers, est factice : il repose essentiellement sur les injections de capitaux par l?Etat qui les puise des entrées financières tirées des exportations des hydrocarbures. Ces ressources sont énormes depuis quelque temps. Mais la vraie richesse, celle qui doit être dégagée du travail productif de la collectivité nationale, est quasi inexistante. L?année dernière, l?Algérie a consacré 18 milliards de dollars aux importations, alors que les exportations n?ont fait entrer que 700 millions de dollars dans les caisses de l?Etat. Les achats à l?extérieur de biens de consommation, qui connaissent une hausse considérable, ne trouvent leur justification que dans le dérèglement du commerce extérieur : peu contrôlé par les pouvoirs publics, il est dominé par des milliers d?importateurs, dont une bonne partie agit en marge de la légalité. L?accord d?association que signera bientôt l?Algérie avec l?Union européenne - qui sera suivi de l?adhésion à l?OMC - risque d?aggraver la situation, car aux dysfonctionnements actuels vont s?ajouter ceux qui naîtront de la suppression des droits de douane. C?est à un gigantesque bazar, alimenté par toute la camelote du monde, que risque de ressembler, à court terme, l?Algérie, laquelle verra disparaître de ses horizons toutes ces usines et fabriques patiemment et durement installées depuis l?indépendance du pays. Un bazar, cadeau d?une mondialisation que les gouvernants n?ont su ni prévenir, ni contenir, ni en tirer profit.

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