"Le feu peut être l'ami de la forêt"

img src="http://www.lexpressiondz.com/img/article_medium/photos/P170822-10.jpg" alt=""Le feu peut être l'ami de la forêt"" /Dans l'entretien qu'il nous a accordés, notre chercheur nous explique comment les anciens déchiffraient le langage de la nature.L'Expression: Dda Akli, pouvez-vous vous présenter et présenter votre oeuvre atypique à nos lecteurs'Akli Semani: Oui, bon, ma présentation à moi ne prendra qu'une ou deux lignes. Je suis un vieil homme qui aime la vie. A 71 ans, j'aime encore faire travailler ma tête. D'ailleurs, je viens de terminer ce calendrier que j'ai commencé, il y a plus de vingt ans. Contrairement aux calendriers en vogue de nos jours, celui que je viens de concevoir ne donne pas de l'importance aux dates. Ceux d'aujourd'hui rythment le quotidien et les besoins de la vie actuelle mais ignorent royalement les besoins de la nature pour son équilibre et les besoins de l'homme à s'y adapter. Jadis, les gens n'avaient guère besoin de compter sur le bulletin météo tous les jours. Les périodes étaient si précises qu'ils savaient le jour de pluie une année à l'avance.J'ai toujours été passionné par la méthode des anciens de compter les périodes de l'année. Les mois étaient très importants dans ce calendrier, mais les petites périodes qui les traversaient l'étaient encore davantage. Nos ancêtres les divisaient en périodes de jours, de trois jours, de 10 jours et pour certaines périodes de 40 jours comme «Smayem» justement.En évoquant «Smayem», pouvez-vous nous situer cette période et surtout nous dire l'importance de la connaître dans la lutte contre les feux de forêts'«Smayem», pour les anciens, est la période la plus chaude de l'année. Elle commence le 25 juillet et s'étale sur une quarantaine de jours. La première vingtaine était appelée «Smayem Ounavdhou», elle prend fin le 15 août laissant place à une seconde moitié qui s'étend sur 15 autres journées. Les anciens savaient qu'en cette période de l'année, les forêts étaient une proie facile pour les feux. Il y en avait d'ailleurs chaque année. Les anciens ne spéculaient pas beaucoup sur les causes. Ils en éliminaient les causes les plus objectives par le débroussaillement des forêts. En ouvrant les chemins qui les traversent. En nettoyant les fontaines. Le jour de «l'Ansla», le 7 juillet de chaque année, nos ancêtres réunissaient toutes les herbes, broussailles séchées et les brûlaient. On voyait partout de la fumée, ce jour-là.Et, que doit-on faire aujourd'hui pour s'inspirer de ces méthodes'Les gens n'ont pas grand-chose à faire pour s'inspirer. Ils n'ont qu'à suivre les pas des anciens dans la forêt. Il faut d'abord savoir qu'en période de " Smayem ", il y a toujours le feu dans les forêts. Dans ses proportions normales, le feu est l'ami de la forêt. Il tue beaucoup de germes et microbes nuisibles. Il ne devient ennemi qu'une fois, qu'il touche à l'équilibre. Pour l'en empêcher, les anciens lui coupaient les routes avant l'arrivée de la période estivale. Ils vivaient au rythme des saisons. Aujourd'hui, hélas, on a tendance à croire que les pompiers sont les seuls à se battre contre les feux de forêts. Bien au contraire, la protection est, à mon avis le dernier maillon étant l'acteur qui intervient une fois l'incendie déclaré. Les vrais acteurs, sont ceux qui travaillent, tout le long de l'année, à encercler le feu et le maîtriser en le laissant dans ses proportions normales. Les villageois, les élus locaux, les services des forêts sont aussi concernés que les pompiers. Mais...Mais, jusque-là, cette coordination tarde à voir le jour et les feux continuent de consumer le couvert végétal nord-africain...Oui, ça va venir avec le temps. Les gens vont comprendre doucement que seule la coordination peut parvenir à l'objectif. Il faudra s'inspirer des méthodes des anciens. Il faudra aussi connaître le rythme des saisons. Il faudra surtout comprendre que personne au monde ne peut nous donner la meilleure formule. C'est nous qui connaissons mieux que quiconque la nature de notre territoire, l'Afrique du Nord. Le calendrier des anciens peut servir à aider les pouvoirs publics dans la lutte contre les incendies. Il peut aussi servir au développement de l'agriculture par la connaissance des périodes de l'année qu'il offre.