Algérie

La visite de Sarkozy coïncide avec une tournée de l'artiste Macias en Algérie ou en Egypte ?



A moins d'une décision tranchée à la toute dernière minute, Enrico Macias ne devrait pas prendre place à bord de l'Airbus A- 319 «bleu, blanc, rouge» appelé à décoller, début décembre, de Paris vers Alger pour les besoins de la visite d'Etat de Nicolas Sarkozy. Hier en milieu d'après-midi, alors que l'artiste rentrait d'un concert réussi à Genève, aucune indication ne laissait présager un retour probable dans son pays de naissance, quarante-six ans après son départ sur fond de dénouement sanglant de la guerre d'Algérie. Prévisible aux yeux des observateurs de la relation franco-algérienne, l'idée d'associer le chanteur à la délégation des invités du chef de l'Etat était toujours à l'ordre du jour ce week-end. Mais, à ce stade des préparatifs du voyage présidentiel, le nom de Macias n'était pas encore porté sur la liste des participants au voyage avec la mention «confirmée». «Au jour d'aujourd'hui, rien ne permet d'attester que le chanteur prendra bel et bien place à bord de l'avion présidentiel qui s'envolera sur Alger, avant d'appareiller vers Constantine», a indiqué au Quotidien d'Oran une source française généralement bien informée sur les bruits et chuchotements sous les lambris de la République française. Selon des informations obtenues par Le Quotidien d'Oran de bonne source, l'agenda algérien de Sarkozy coïncide à une échéance calendaire près avec la feuille de route artistique de Macias. Engagé depuis 2005 dans une tournée mondiale sans fin, le chanteur sera du 2 au 5 décembre en Egypte. Or, à s'en tenir à une déclaration antérieure du porte-parole de l'Elysée, ces dates sont bien celles de la visite d'Etat de Sarkozy en Algérie. En Egypte, il donnera un premier concert au Caire, suivi d'un second à Alexandrie. Pas plus tard que ce week-end, son déplacement au pays des «pharaons» semblait plus que jamais à l'ordre du jour. En témoigne, selon une information obtenue de source musicale mais non confirmée dans l'entourage de l'artiste, le récent séjour parisien de l'organisateur égyptien. Voici à peine quatre jours, ce dernier y était venu pour mettre les dernières touches organisationnelles à la tournée égyptienne. Une tournée qui, à l'image de récents voyages en Turquie, en Jordanie, aux Emirats arabes unis, à New-York, en Amérique Latine, donnera la part belle au répertoire arabo-andalou de l'artiste. Sollicité, hier, par l'Agence France-Presse, l'artiste a confirmé qu'il avait fait part à Nicolas Sarkozy de son «désir de pouvoir l'accompagner» en Algérie. «Mais je lui ai dit qui si cela posait des problèmes, il ne fallait pas qu'il se gêne pour me le dire», a précisé le chanteur dans une allusion à peine voilée sur la polémique et l'opposition éventuelle que son voyage pourrait susciter sur la rive sud de la Méditerranée. Macias, qui s'exprimait depuis Genève, n'a pas donné le moindre éclairage sur la manière dont le chef de l'Etat français a accueilli sa demande. Interrogé par la même agence, l'Elysée est resté évasif sur le sujet. Pour toute réponse, ses communicants - paraphrasés par l'AFP - se sont contentés d'indiquer que le voyage du chanteur était «effectivement» évoqué, mais sa faisabilité se heurtait «à des réticences en Algérie». Aucune précision n'a été donnée de même source sur la nature de ces «réticences». S'agit-il de l'agitation, du reste inévitable de milieux traditionnellement opposés au retour constantinois de l'artiste ? Ou de réserves émanant de milieux officiels ? L'AFP n'y apporte pas de réponses. Très proche de Nicolas Sarkozy depuis son arrivée, en 2002, à la tête du ministère de l'Intérieur, Enrico Macias a cultivé cette relation au point de devenir l'un de ses soutiens les plus médiatiques durant sa marche vers l'Elysée. L'artiste en a profité pour lui soumettre - avec le soutien de son épouse Suzy - une liste d'enfants algériens menacés d'expulsion du territoire français dans les bagages de leurs parents «sans papiers». De plaidoyers en forcing, le «constantinois» a fini par obtenir la régularisation définitive d'une somme de cas, au grand soulagement de parents inquiets du devenir scolaire de leurs bambins. Enrico Macias - de son vrai nom Gaston Ghrnassia - n'a jamais désespéré de revenir sur les lieux de sa naissance et sur les premiers pas de sa jeunesse. Les Algériens et Français, qui le côtoyaient ces derniers temps, avaient décelé dans ses propos une «envie folle et toujours intacte» d'y partir, en dépit du «décollage» raté du printemps 2000. La visite d'Etat de Sarkozy est venue pour servir d'opportunité inespérée et réactiver un vieux rêve. Un projet de retour qui, en huit ans, a connu trois sorts contrastés. A la période des retrouvailles imminentes avec Constantine entre 1999 et 2000, a succédé celle, défaitiste, d'un voyage «à jamais compromis», puis celle, nourrie d'espérance, d'un «retour toujours possible sur les terres de la musique «malouf». Suggéré au détour des lignes par un média parisien, évoqué par le journal d'information en ligne «Tout sur l'Algérie.com», le projet de voyage a repris de plus belle. Dans les médias des deux pays, comme sur les lèvres des politiques. Interrogé par notre confrère L'Expression, le chef du gouvernement, Abdelaziz Belkhadem, a fait remarquer que l'Algérie officielle n'avait pas «le droit de choisir» les invités accompagnateurs du chef de l'Elysée. «Ceux qui viendront avec le Président Sarkozy seront nos invités», a dit celui qui, avec l'ancien ministre de la Communication, Mohieddine Amimour, Khaled Bensmaïn (l'ex-SG du MDA benbelliste), et noms du vivier islamiste, avaient pris la tête de la fronde contre l'arrivée de Enrico Macias en Algérie. En rupture de ban avec l'Algérie depuis le milieu des années soixante - sa voix a été interdite des ondes de la chaîne 3 dans la foulée de la guerre israélo-arabe de juin 1967 -, l'artiste a perdu le contact avec la rive sud. Reste que, comme il le répète à satiété, sa relation avec «El Blad» n'a pas été irrémédiablement rompue. Au gré de ses activités artistiques et des opportunités de rencontres parisiennes, son chemin croisait l'itinéraire d'Algériens de tous horizons: artistes et hommes de culture résidant ou de passage à Paris, officiels du monde politique algérien et même responsables des partis de l'opposition. «Invité officiellement» par le Président Bouteflika lors d'un dîner-gala en octobre 1999 à Monaco, en marge du forum économique de Davos, l'artiste ne s'est jamais senti si proche de ses rêves. Revoir son domicile natal, se recueillir sur la mémoire des siens et repartir sur les premiers chemins qui ont servi de rampe de lancement à sa carrière cinquantenaire. Avant d'aspirer au retour au bercail, Enrico Macias a accompli un premier retour dans l'espace algérien par la porte du Centre culturel algérien. A la mi-1999, à la surprise de tous, il prenait place sur la scène du CCA, institution officielle s'il en est. Accompagné d'un orchestre andalou algérien, il interprète des titres emblématiques du «malouf» constantinois. Une espèce d'avant-première d'un futur récital parfait au «Printemps de Bourges» qui se traduira par un album en hommage à son beau-père, Cheikh Raymond Leyris, maître du «malouf» constantinois au côté du Cheikh El Hadj Mohamed Tahar Fergani. Dès lors, les choses s'étaient accélérées à un grand rythme. Dans un premier temps, l'artiste était invité officiellement à la résidence de l'ambassadeur d'Algérie de l'époque, Mohamed Ghoualmi. Dans la foulée, ministres, patrons de médias publics et hauts fonctionnaires le rencontraient à intervalles réguliers à Paris. Avec l'invitation de Bouteflika à Monaco, la machine organisationnelle de son retour semblait irréversiblement lancée. Le patron de l'Office Riadh El-Feth, autre organisme officiel algérien, s'y était déplacé pour boucler le voyage. Un déplacement d'une dizaine de jours partagé entre agenda mémoriel et programme musical en cinq étapes (Alger, Constantine, Béjaïa, Annaba et Oran). Tout semblait fin prêt jusqu'à ce que, au matin d'un second concert à l'Olympia, un communiqué signé par Tréma Music, son producteur de l'époque, n'annonce le report sine die de la tournée.
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