Algérie - A la une

La rue, animal sauvage


La rue, animal sauvage
D'où vient cette peur de la rue si bien partagée par les dirigeants à plusieurs niveaux d'échelle ' En d'autres termes, pourquoi déployer 40 000 policiers à Alger, soit l'équivalent de l'armée portugaise, tunisienne ou hongroise, afin de contrer des groupes d'opposition qui marchent pacifiquement ' L'argument officiel est connu, tous ceux qui marchent dans les rues sont là pour déstabiliser le pays, voire le système solaire, et ils sont généralement payés par des intérêts étrangers, voire par des marques de baskets américaines. La réalité est plus complexe, ce réflexe d'interdire l'espace public comme on interdit une conférence privée, un mariage ou un bar et d'y rassembler toutes ses forces de toutes ses forces, est lié à la peur, qui, elle-même, vient de l'ignorance.De la rue, étrange espace représenté en haut lieu comme un animal violent, hostile et imprévisible, non domesticable comme les autres animaux, médias, stades ou mosquées. Une foire peuplée d'étranges créatures que l'on peut nourrir avec des prêts Ansej, un peu d'huile et de sucre mais qui ont toujours faim et se rassemblent en permanence dans une formule où la seule mythologie est la théorie du chaos.Ni le Président ni le Premier ministre ou les généraux ne connaissent en réalité la rue, pour l'avoir désertée il y a très longtemps. A-t-on déjà vu un ministre ou un wali dans un café, chez le coiffeur, au restaurant ou simplement se promener dehors ' En ce sens, la rue est la rivière de l'échec, puisque dès qu'un homme de la rue devient ministre, chef de daïra ou PDG, il cesse de la fréquenter et n'y retourne plus jamais, passant le reste de son temps à la haïr au lieu de lui parler. Ce qui explique cette peur de la rue, labyrinthe qui mène partout mais ne conduit nulle part. Les policiers n'ont pas été déployés pour sauver le pays. Mais pour sauver un groupe d'hommes qui ne veulent pas retourner à la rue.




Votre commentaire s'affichera sur cette page après validation par l'administrateur.
Ceci n'est en aucun cas un formulaire à l'adresse du sujet évoqué,
mais juste un espace d'opinion et d'échange d'idées dans le respect.
Nom & prénom
email : *
Ville *
Pays : *
Profession :
Message : *
(Les champs * sont obligatores)