Algérie

La mare aux enfants



L?histoire s?est passée pas loin de Tissemsilt, dans la commune de Amari, ce qui est ici, entre autres, une occasion de ne pas pouvoir ne pas en parler. Cinq enfants pauvres sont morts noyés dans une mare, chacun en tentant de secourir l?autre tombé avant. La première, 14 ans, tombe et se noie. La seconde, petite fille de 11 ans, plonge pour la secourir et se noie. Suivent les 4 autres enfants, la dernière étant la seule rescapée. Où étaient les adultes ? Nulle part. La première leçon de ce drame est que les enfants sont solidaires, sans distinction de sexe ou d?appartenance politique. La seconde est que quand la première victime s?est noyée, c?est une fille de 11 ans qui s?est jetée la première. Cet acte de solidarité qui a ému tout le monde est une vraie leçon de courage dans un pays devenu l?empire des mous. Aujourd?hui, en 2007, quel adulte pourrait en faire autant ? 200 000 morts plus tard, l?Algérie en est encore à se cacher la tête sous terre, expliquant qu?il n?est rien arrivé. L?Etat en est encore à exhiber ses réserves de change aux visages des pauvres, à laisser les harraga partir se noyer en mer et à déplier des statistiques pour prouver qu?il n?y a ni chômage ni suicides. Le Président lui-même, devant un pays qui se noie dans la corruption et le détournement, avoue en privé qu?il ne peut combattre la mafia parce que trop forte. Parce que, certainement, il a peur de mourir. Qu?aurait fait la jeune Fouzia de 11 ans ? Elle aurait plongé. L?équation est simple : 33 millions d?Algériens sont dans une mare, qui se noiera le dernier ? Lao Tseu avait expliqué en son temps que « dans une mare aux poissons, il y a autant de mares que de poissons ». C?est dire que chacun voit l?Algérie comme il veut. Belkhadem la voit très bien, stable, sûre et pleine de croissance. A Tissemsilt, près des mares aux enfants, on ne la voit pas sûrement de la même façon.


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