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La malédiction des ayatollahs


La malédiction des ayatollahs
Trump envoie un message inconséquent
Encouragé par la Russie et la Chine, l'Iran a dessiné les contours d'une relation, sans doute plus que méfiante, mais néanmoins revisitée, avec l'Occident, ne serait-ce que pour donner à son économie une bouffée d'oxygène, à l'heure des grands enjeux régionaux.
Pris en tenaille entre ses promesses électorales, notamment celle de «déchirer» l'accord sur le nucléaire iranien pour contenter son cercle sioniste et satisfaire aux exigences d'Israël, et les obligations découlant des accords internationaux conclus par son prédécesseur Barack Obama, le président républicain Donald Trump a vite fait de se ranger à la doctrine des Bush qui veut qu'un bon ennemi est forcément un ennemi mort. C'est la raison pour laquelle il ne fallait pas s'étonner outre mesure de sa décision récente de ne pas «certifier» l'accord conclu avec l'Iran et d'inviter le Congrès à durcir au maximum les sanctions infligées depuis des décennies au régime des ayatollahs.
Celui-ci, radicalement conservateur par-delà quelques timides mouvements de la tendance libérale incarnée par l'actuel président Rohani, trouve son essence politique dans un magma de certitudes religieuses et philosophiques selon lesquelles rien de bon ne saurait venir du grand Satan et surtout pas au moyen de négociation ou autre gage de bonne volonté. Pour les maîtres doctrinaires de l'Iran, les Etats-Unis ont un programme et un seul: détruire l'islam et fomenter, partout où cela est nécessaire, des changements de régime qui profitent à leur économie.
Tout ceci pour dire combien il aura fallu de courage et de ténacité à l'aile réformatrice, incarnée par le président Rohani, pour entraîner le pays dans une voie qualifiée de «hasardeuse» par le Guide suprême, celle de la négociation pragmatique avec Washington et ses alliés occidentaux, au prix de concessions surprenantes que les radicaux ont eu beaucoup de mal à avaler, n'eut été la nécessité de la relance d'une machine économique en péril. Les sanctions ont eu, en effet, un impact cruel sur un Iran qui pouvait, grâce à ses richesses en hydrocarbures et en gaz, prétendre à un véritable Eldorado.
Encouragé dans cette démarche par la Russie de Vladimir Poutine ainsi que par la Chine, l'Iran a dessiné les contours d'une relation, sans doute plus que méfiante, mais néanmoins revisitée avec l'Occident, ne serait-ce que pour donner à son économie une bouffée d'oxygène à l'heure de grands enjeux régionaux. Et c'est cet espoir que Donald Trump est venu tuer dans l'oeuf, balayant avec un mépris glacial les cris d'alarme de ses alliés européens qui ont tôt fait d'expédier leurs entreprises pour conquérir les marchés les plus juteux en l'absence consentie de l'Oncle Sam. En lui envoyant Federica Mogherini pour tenter de l'amadouer, la France, l'Allemagne et le Royaume-Uni pensent-ils sérieusement que leurs arguments auront plus de poids que ceux de Netanyahu et de ses porte-voix à la Maison- Blanche' Sans doute pas, mais il leur faut prendre date et s'assurer que l'unilatéralisme du bouillant milliardaire finira droit dans le mur, au cours des prochains mois. Il est vrai que tout plaide pour cela. En s'attaquant sans équivoque à l'accord iranien, Trump envoie un signal éloquent à la Corée du Nord avec laquelle le Département d'Etat prétend être «prêt à des négociations directes». Il conforte pleinement Pyongyang dans ses arguments selon lesquels non seulement l'administration américaine n'est pas fiable, mais que, de surcroît, «il n'y a rien à discuter» dans les circonstances actuelles qui voient les Etats-Unis et la Corée du Sud mener des manoeuvres navales communes d'intimidation. Dans la même veine, il offre de l'eau au moulin des ayatollahs qui ont longtemps dénoncé la stratégie du courant réformiste avec les mêmes réserves que Pyongyang et qui obtiennent, à leur grande joie, confirmation de leurs homélies politiques. Peu leur importent les conséquences néfastes des sanctions, quand bien même elles seraient aggravées et quand bien même elles ont été dernièrement appliquées par la Russie et la Chine. Peu leur sied que la conjoncture internationale marquée par la chute des prix du pétrole impose une gestion de crise de plus en plus dure à un pays où le chômage affecte la population la plus jeune et la plus dynamique. Trump leur offre sur un plateau le Plan d'action global conjoint dont la remise en cause n'aura, en vérité, que peu de conséquences supplémentaires sinon de ruiner les efforts d'ouverture de la coalition modérée et réformiste, partisane d'une politique étrangère responsable. Ce faisant, il confirme aux yeux de l'opinion internationale son inconséquence et son irresponsabilité dont il faut craindre qu'elles n'enfoncent un jour ou l'autre le monde dans un tourbillon nucléaire désastreux pour la planète tout entière.
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