Algérie

« La malchance d?être au mauvais endroit au mauvais moment »


Azouz Begag, ministre français de « l?ascenseur social », comme il se définit, ne cachait pas son ressentiment et son amertume face aux médias. Il n?a rien pu faire pour éviter les évènements de Clichy-sous-Bois ni soustraire le délicat dossier dont il a la charge aux atteintes de la violence. C?est presque un aveu d?échec qui sort de la bouche de Azouz Begag qui, face aux questions de certains journalistes, était à deux doigts de tordre le cou à une solidarité gouvernementale de pure façade. Implicitement, Azouz Begag a reproché aux médias de surdéterminer, dans les violences de Clichy-sous-Bois, les déclarations intempestives de Nicolas Sarkozy au détriment d?une information plus circonstanciée de l?action du ministère dont Azouz Begag est actuellement responsable. En ligne de mire, c?est encore une fois le virevoltant ministre de l?Intérieur qui s?attache à tirer les dividendes politiques des affrontements de Clichy-sous-Bois. De nombreux jeunes de cette banlieue, interpellés après plusieurs nuits de confrontation avec les services de sécurité, ont été jugés selon la procédure de comparution immédiate. La justice a eu la main particulièrement lourde, de fortes peines ont été prononcées et pour certaines assorties de deux mois de prison ferme. Cela a même porté les avocats de la défense à douter de l?indépendance de la justice et à évoquer un verdict préfabriqué dont la finalité est de corroborer le discours musclé de Nicolas Sarkozy à l?égard des jeunes des banlieues. Les familles des deux jeunes victimes ont, dans le droit prolongement de la surenchère liée aux violences de Clichy-sous-Bois, refusé de parler au ministre de l?Intérieur français qui voulait les rencontrer, déclarant qu?elles entendaient être reçues par le Premier ministre Dominique de Villepin. Les deux jeunes victimes de Clichy-sous-Bois s?ajoutent à la longue liste de personnes mortes dans des conditions tragiques lors de l?incendie des maisons vétustes où elles étaient logées. Toutes ces victimes ont en commun d?être originaires du continent africain ; d?être aussi Arabo-Maghrébins. La très haute pression sécuritaire mise en ?uvre par Nicolas Sarkozy dès son retour au ministère de l?Intérieur a eu l?effet de favoriser l?escalade de la violence et les reproches les plus vifs lui sont faits sur les arrière-pensées électoralistes qui accompagnent son action. C?est non sans un certain malaise que les détracteurs de Nicolas Sarkozy l?accusent ouvertement de se frayer un chemin vers l?Elysée en mettant sens dessus-dessous la banlieue avec le calcul de se gagner les faveurs d?un électorat traditionnellement acquis aux thèses de l?extrême droite et de Jean-Marie Le Pen, mais que le ministre de l?Intérieur ne désespère pas de récupérer à l?échéance présidentielle de 2007. A mots à peine couverts, Nicolas Sarkozy est soupçonné de vouloir faire flèche de tout bois et même, sans jeu de mots, de tout sous-bois depuis qu?une partie de Clichy s?est embrasée. L?escalade a conduit, dans la journée de lundi, à un lancer de grenade lacrymogène dans l?enceinte d?une mosquée. L?incident a choqué les musulmans de Clichy-sous-Bois qui constatent que toutes les initiatives pour apaiser les vives tensions consécutives aux affrontements de ces derniers jours n?ont pas été prises. En témoigne le nombre de jeunes qui ont été jugés en comparution immédiate parce qu?« ils avaient eu la malchance d?être là au mauvais endroit et au mauvais moment ». Du coup, c?est toute la philosophie de l?intégration qui devient un problème et cela a justifié dans une large mesure la montée au créneau de Azouz Begag qui s?est publiquement autocritiqué pour ne pas avoir suffisamment donné de la voix et laissé le terrain de l?intégration miné par les man?uvres politico-policières et les risques de dérives. Azouz Begag, qui avait écrit Le gone du chaâba, n?est pas sans ignorer que la vie n?est pas toujours un beau roman qui s?écoule comme un long fleuve tranquille.
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