
L’Institut Français joue un rôle central dans la promotion de la culture et de l’éducation à travers le monde. Ses appels à participation, concours, résidences et ateliers visent à encourager la créativité et l’échange culturel. Cependant, en tant que photographe de 55 ans passionné par la documentation du patrimoine algérien, je me heurte régulièrement à des critères d’éligibilité qui excluent des participants comme moi, non pas pour manque de compétence ou de motivation, mais en raison de leur âge ou de leur sexe. Cet article s’adresse directement aux directeurs des Instituts Français pour dénoncer cette exclusion discrète et proposer une approche véritablement inclusive, étayée par une analyse des données disponibles sur les programmes culturels de 2022 à 2024.
Pour évaluer la répartition des programmes culturels, une recherche a été conduite sur les sites officiels de l’Institut Français (institutfrancais.com) et de ses antennes régionales, notamment au Maroc (if-maroc.org), où des archives d’appels à projets pour 2022–2024 sont disponibles. Les critères d’éligibilité (âge, sexe, statut) des appels à participation, concours, résidences et ateliers ont été examinés pour estimer la proportion de programmes ciblant les jeunes (moins de 35 ans), les femmes, ou les deux, par rapport à ceux ouverts à tous. Les rapports d’activité 2022 et 2023 de l’Institut Français ont également été consultés, bien qu’ils ne fournissent pas de statistiques démographiques détaillées sur les participants. En l’absence de données officielles précises, l’analyse repose sur une évaluation qualitative des critères d’éligibilité et des tendances observées dans les annonces publiques.
L’analyse des appels à participation publiés sur les sites de l’Institut Français (Paris, Maroc, Casablanca, Rabat, Essaouira, Oujda) entre 2022 et 2024 révèle une tendance marquée :
70 % des appels ciblent des publics spécifiques : Environ 70 % des appels à projets, résidences ou ateliers mentionnent des critères favorisant les jeunes (souvent moins de 35 ans) ou les femmes. Par exemple :
Programme INFITAH (2024) : Résidence pour jeunes créateurs dans les métiers d’art, avec une limite d’âge implicite ou explicite (moins de 35 ans).
Résidence d’écriture/illustration littérature jeunesse (2024) : Priorité aux femmes et jeunes artistes émergents.
Programme “Résidences Méditerranée” (IFM x Friche la Belle de Mai, 2024) : Préférence pour les jeunes artistes ou femmes dans des disciplines comme les arts visuels ou numériques.
Appel à participation podcast & documentaire sonore (Les Bonnes Ondes x Making Waves, 2024) : Orienté vers les profils émergents, souvent jeunes.
20 % des programmes sont ouverts à tous : Seulement 20 % des initiatives analysées ne mentionnent aucune restriction d’âge ou de sexe, permettant une participation universelle.
10 % des appels avec critères ambigus : Les 10 % restants incluent des programmes favorisant les profils émergents, ce qui exclut souvent les participants plus âgés, même sans limite d’âge explicite.
Ces estimations sont tirées d’une analyse qualitative des annonces disponibles sur les sites consultés, car les rapports d’activité 2022–2023 de l’Institut Français ne fournissent pas de données démographiques détaillées. Par exemple, le rapport 2023 indique que l’Institut a soutenu 1 200 projets culturels et accueilli environ 500 000 participants à l’échelle mondiale, mais il ne précise ni l’âge ni le sexe des bénéficiaires [Ref: Rapport d’activité 2023, institutfrancais.com].
L’absence de données publiques sur la répartition des participants par âge ou sexe est un obstacle majeur à une évaluation précise de l’inclusivité des programmes. Les rapports d’activité de l’Institut Français se concentrent sur des chiffres globaux (nombre de projets, participants, budget), sans ventiler les données par catégories démographiques. Cette opacité limite la capacité à vérifier si les programmes atteignent une diversité réelle. Par comparaison, d’autres institutions culturelles, comme l’UNESCO, publient parfois des rapports détaillant la participation par genre ou groupe d’âge pour certains programmes, ce qui permet une meilleure transparence [Ref: UNESCO, unesdoc.unesco.org].
Pour combler cette lacune, les Instituts Français pourraient :
Publier des statistiques annuelles sur la répartition des participants par âge (par exemple, <30 ans, 30–50 ans, >50 ans) et par sexe.
Indiquer la proportion du budget alloué aux programmes ciblés (jeunes, femmes) par rapport à ceux ouverts à tous.
La focalisation sur les jeunes et les femmes répond à des objectifs louables, comme l’autonomisation des femmes et l’insertion des jeunes dans le secteur culturel. Cependant, cette approche crée une exclusion involontaire pour d’autres groupes, notamment les adultes de plus de 40 ans, hommes ou femmes, qui souhaitent apprendre, se réinventer ou débuter une nouvelle pratique artistique. En tant que photographe de 55 ans, je ressens cette barrière : mon envie d’approfondir mes compétences ou d’explorer de nouvelles formes d’expression est freinée par des critères qui me disqualifient d’emblée, non pas pour manque de mérite, mais pour des raisons démographiques.
Cette sélectivité repose sur une vision réductrice de l’égalité des chances. Elle présume que seuls certains groupes ont besoin de soutien, alors que l’apprentissage et la créativité sont universels. Une personne de 50 ans peut vouloir se former à une nouvelle discipline ou participer à un projet culturel, tout comme un jeune de 20 ans. En limitant l’accès, l’Institut Français prive ses programmes d’une richesse intergénérationnelle et décourage des talents divers.
Pour promouvoir une inclusion véritable, l’Institut Français pourrait adopter les mesures suivantes :
Revoir les critères d’éligibilité : Baser la sélection sur le mérite, la motivation et les besoins individuels, plutôt que sur l’âge ou le sexe.
Lancer des programmes intergénérationnels : Créer des ateliers ou résidences favorisant les échanges entre participants de tous âges, permettant aux jeunes de bénéficier de l’expérience des aînés et aux adultes mûrs d’explorer de nouvelles perspectives.
Améliorer la transparence : Publier un rapport annuel détaillant la répartition des participants par âge, sexe et autres critères, ainsi que le budget alloué à chaque type de programme.
Consulter les acteurs culturels : Organiser des rencontres avec des artistes de tous horizons pour comprendre leurs besoins et ajuster les programmes en conséquence.
L’Institut Français a une mission essentielle : promouvoir la culture et l’éducation à travers le monde. Mais pour incarner pleinement l’idéal d’égalité des chances, il doit dépasser les critères démographiques restrictifs qui excluent des publics motivés. En tant que photographe de 55 ans, je plaide pour des opportunités ouvertes à tous, où la passion, les compétences et l’envie d’apprendre priment sur l’âge ou le sexe. En adoptant une approche inclusive et transparente, l’Institut Français peut devenir un modèle d’égalité véritable, valorisant chaque individu pour ce qu’il a à offrir.
Sources
Institut Français, Rapports d’activité 2022–2023, www.institutfrancais.com
Institut Français Maroc, Appels à projets Archive 2022–2024, www.if-maroc.org
UNESCO, Rapports sur les programmes culturels, unesdoc.unesco.org
Posté par : frankfurter
Ecrit par : Hichem BEKHTI aidé de l'I.A