L'EFFACEMENT DES MEPHISTOS

Les fiches de police, les reconnaissances bagages et les fouilles au corps ont disparu des aéroports algériens. A priori d'une futilité contraignante, ces procédures gênantes incommodaient par une suspicion lourde qui aveulissait les voyageurs en leur endossant le profil désagréable de sous-hommes locataires de goulag. En farfouillant dans les profondes intimités des voyageurs, les policiers s'érigeaient en parfaits méphistos qui écrabouillaient le peu de ce qui reste de la dignité citoyenne.On connaît les origines et les causes de ces désagréments qui n'ont rien à envier à la culture des sentences sans jugement généralisées dans tous les aéroports du monde. L'ère est à l'effacement des individus et la multiplication des lois d'exception, ici et là, en désintégrant les petits espaces intimes et privés, a tendance à transformer l'humanité en un vaste camp de concentration.Mais il suffit parfois de peu de choses pour qu'un rien devienne immense avec la faculté d'offrir à un peuple de se réconcilier avec lui-même. En développant une discrétion remarquable notre police nationale nous gratifie d'une belle leçon d'efficacité. Contrairement aux idées empiriques reçues, elle anoblit par son effacement aux pieds des avions l'image de l'Etat jusqu'ici sérieusement ternie et permet aux voyageurs de retrouver la stature d'une citoyenneté perdue. Elle a sans doute compris que la puissance d'un Etat n'était pas dans l'impétuosité assourdissante des uniformes ni dans leur encombrement sur les routes bloquées.Beaucoup reste à faire et l'Etat demeure cette montagne arcboutée qui garde ses pestilences jalousement préservées au nom d'un assortiment de tares où l'inexpérience, la cupidité, la gabegie, la corruption et la bureaucratie sont réunies.Gageons que ce ne soit qu'un début d'une aération que les Algériens voudraient forte et fructifiée pour que l'Etat dans sa représentation dans tous domaines change de tenue pour s'ériger comme un parfait catalyseur d'une sérénité que tout le monde réclame de tous ses v?ux.