Algérie - A la une

L'adieu aux armes
Une vue du dernier congrès du FLNLe Xe congrès du FLN est celui de la rupture.Après des années de compromission des responsables avec les puissances de l'argent, le vieux parti a fini par se dévoyer complètement, n'ayant plus aucun programme si ce n'est celui du célèbre slogan «enrichissez-vous»! Abdelaziz Belkhadem a initié puis encouragé cette mutation qui a conduit aux soubresauts que l'on sait, les nouveaux venus s'emparant ou convoitant les postes clés au sein du bureau politique et dans les mouhafadhas, sans compter les parrainages juteux des candidatures au Sénat et surtout à l'Assemblée populaire nationale.Insidieusement, mais sûrement, le FLN a vécu cette métamorphose, bien sûr dénoncée par quelques-uns des mandarins en place qui voyaient d'un mauvais oeil leur mainmise compromise et leur avenir gravement menacé. Pour n'avoir pas voulu prendre en compte leurs griefs, Belkhadem a payé le prix de ses engagements et a dû s'esquiver, après une session houleuse du comité central. Abderrahmane Belayat lui a succédé dans une position ambiguë, choisissant de gérer la situation plutôt que de la diriger. Les tombeurs de Belkhadem s'étant attiré les foudres du pouvoir pour avoir joué...et perdu une carte «secrète», le FLN s'est retrouvé dans une situation de funambule.Et c'est là que Si Amar, en l'occurrence Saâdani, est «arrivé», un peu comme Zorro, sans se presser, pour donner l'ultime coup de barre que personne n'attendait. Prônant le rajeunissement des structures, et oeuvrant à la consolidation de son assise partisane, il sait exactement ce qu'il fait et mieux que cela, il le fait. Au grand dam de ses détracteurs et de tous les redresseurs réunis, évidemment, mais avec la bénédiction latente du pouvoir, déclare-t-il à qui veut bien l'entendre.Qu'on le croit ou non, sa démarche a le mérite de la clarté: elle annonce, en effet, la métamorphose du FLN à trois niveaux. Le premier concerne la nouvelle génération de militants, massivement nés après le recouvrement de l'indépendance et donc n'ayant rien de commun avec les compagnons d'armes des années de feu vraies ou supposées. Le second porte sur les partisans de la chkara, aujourd'hui en grand nombre dans les structures intermédiaires et à l'orée du comité central, sinon du BP, Saâdani étant à leurs yeux un symbole édifiant.Le troisième et dernier niveau est celui des «Mohicans», les derniers soldats de la légitimité révolutionnaire qui s'efforcent de conserver leur rôle et leurs privilèges mais sentent bien que les temps sont devenus incertains.Le Xe congrès va en quelque sorte servir de théâtre grandeur nature à une pièce dramatique dans tous les sens du terme, encore que la mobilisation des congressistes par l'équipe de Amar Saâdani n'a laissé aucune chance à ses détracteurs.Les redresseurs conduits par une vieille garde qui conforte, aussi paradoxal que cela puisse paraître, les arguments du maître de céans auront bien du mal à se faire entendre, beaucoup d'entre eux ayant d'ailleurs perdu tout crédit aux yeux d'une base militante lassée de les voir pérorer depuis trois décennies au moins. Cette base, jadis si prompte à obéir aux mots d'ordre, n'existe pratiquement plus ou, si elle conserve ici et là quelque force, ne se sent plus concernée par la politique ou les élections. Elle a été bousculée par les argentiers et les entrepreneurs qui, eux, se sont engouffrés puissamment pour régenter les gains et les dividendes au niveau des communes et des wilayas, lorgnant d'ores et déjà les étages supérieurs au motif qu'une oligarchie est apparue avec laquelle une conjonction peut être envisagée, à court ou moyen terme.Au crépuscule de ce Xe congrès, il y a un autre risque, celui de voir de nombreux transfuges rejoindre, avec armes et bagages, les formations les plus enclines à les recevoir, du côté du RND ou du parti de Benflis!Les opposants auront beau dénoncer l'illégalité de ces assises, convoquées au mépris des statuts et des dispositions du règlement intérieur, il leur faudra bien réaliser qu'en réussissant son examen de passage devant une salle mobilisée en la circonstance, Saâdani aura gagné son pari.Peu importe aujourd'hui que ce soit Abada lui-même qui déclare que «le FLN est un parti du pouvoir, un parti de l'Etat, du système. Le FLN est un parti national et un parti de la majorité. C'est pour cela que des gens veulent l'utiliser. Il doit être indépendant comme les autres partis. Saâdani, comme Belkhadem et même Ali Benflis, ont été désignés». Le FLN a donc toujours connu une histoire qui ne fut jamais un long fleuve tranquille et ses leaders ont tous vécu une chute brutale, avec des conséquences plus ou moins amères.A son corps défendant, depuis bientôt deux ans, le FLN est devenu la vitrine d'un autre bras de fer qui se joue dans un théâtre d'ombres et la victoire de Saâdani symbolise, qu'on le veuille ou non, la victoire d'un clan masqué sur un autre.La dernière péripétie sera néanmoins à marquer par une pierre...blanche, car la dérive actuelle s'inscrit en rupture totale avec les idéaux et les objectifs d'un grand mouvement politique porteur de justice sociale, de libération des peuples et de solidarité des non-alignés face aux appétits des grandes puissances.


Votre commentaire s'affichera sur cette page après validation par l'administrateur.
Ceci n'est en aucun cas un formulaire à l'adresse du sujet évoqué,
mais juste un espace d'opinion et d'échange d'idées dans le respect.
Nom & prénom
email : *
Ville *
Pays : *
Profession :
Message : *
(Les champs * sont obligatores)