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Jeux et sports traditionnels


Jeux et sports traditionnels
Les enfants d'aujourd'hui ont une réelle prédilection pour les jeux individuels. Si l'émergence des nouvelles technologies a ouvert de nouvelles perspectives pour l'humain en offrant un accès quasi direct aux différents contenus qu'elles mettent à sa disposition, elle n'est cependant pas sans conséquences sur l'éducation des générations futures.La façon de jouer des enfants d'aujourd'hui est différente de celle de leurs aïeuls. Les jeux vidéo et d'ordinateur sont devenus leur divertissement favori. Bien que ce genre d'activité ludique fasse souvent appel à l'attention de l'enfant, à sa mémoire, à sa reconnaissance visuelle ainsi qu'à la bonne coordination ?il-main, il est bien clair que la motricité globale de l'enfant, l'expression des sentiments et la créativité, indispensables à son développement, sont peu stimulés, voire absents. Mais le plus regrettable dans cette carence est l'effondrement de la culture ludique, dû essentiellement à l'individualisation du processus dynamique d'interaction.Autrement dit, les sports traditionnels, qui avaient cette formidable capacité d'affermir et d'entretenir les liens sociaux, ont désormais quasiment disparu. Ainsi, loin du simple chahut d'enfants, ces jeux sont de formidables disciplines, qui donnent aux gamins les bases de l'éducation sociale. Saisissant l'importance de ces activités, le Dr Fethi Belghoul, directeur de l'Institut d'éducation physique et sportive d'Alger, s'engage dans un profond travail de recherche sur ce qui est communément appelé «les jeux et sports traditionnels». «Notre projet est de tenter de faire la radioscopie de la culture ludique des deux pays ciblés (Algérie et Tunisie), d'étudier les situations de jeux et sports traditionnels sous l'angle de la logique interne, plus précisément sur la base d'une perspective qui valorise l'ethnomotricité, définie par la science de l'action motrice comme ??champ et nature des pratiques motrices envisagées sous l'angle de leur rapport à la culture et au milieu social au sein desquels elles se sont développées''», explique le chercheur. L'idée centrale du projet étant d'avoir une description détaillée des jeux et des sports qui va au-delà des règles et des manières de jouer. Le travail se concentrera également sur la signification et l'environnement socioculturel où seront pris en compte les cadres temporel, symbolique, spatial, social et aussi technique de ces activités. Allant à contresens de la tendance générale dans les sociétés savantes, qui veut que les pratiques associées au corps et au travail physique soient à reléguer au second plan, le projet part du postulat inverse, mettant au devant le rôle social de ces activités. «Notre hypothèse sera que les activités ludiques et corporelles offrent un domaine profondément investi par les normes et les valeurs de leur société d'accueil.Les jeux et les sports traditionnels autorisent une lecture sociologique, qui dévoile les grandes orientations d'une culture, les choix fondamentaux de celle-ci à l'égard du lien social et de la communication, de l'espace et du temps, à l'égard des productions technologiques et des rapports avec l'environnement», développe Belghoul, qui qualifie le sport de «miroir de la société» mais aussi «en retour un agent dynamique de transformation ou de maintien de cette société». Dénonçant la logique de la rentabilité, qui a écarté les jeux et sports traditionnels des terrains de la société, le directeur de l'IEPS insiste sur leur rôle social. «Le jeu et le sport du patrimoine avaient un vrai rôle social : régulateur de tension dans les défis publics, moyen de communication avec les autres et système d'intégration du joueur dans un milieu nouveau. C'était un monde en perpétuel mouvement, qui, tout en paraissant figé, reflétait là un monde complexe de diversités, d'ouverture sur d'autres mondes, d'autres cultures», instruit-il.Culture ludiqueD'après le Dr Belghoul, ce travail de recherche est le fruit de nombreux déplacements dans différentes régions du pays. Ces pérégrinations avaient pour objectif d'étudier les traditions culturelles ludiques. «Nous avons constaté que les jeux traditionnels dans la région du Sahara, à la différence de ceux du Nord, ont réchappé de la dissolution. Nous avons, de ce fait, décidé de mettre en lumière les cultures ludiques, tout en s'évertuant à connaître la place du jeu traditionnel avec toute sa dimension ludique dans l'éducation sportive», instruit-il. Effectuant une analyse didactique et pédagogique des jeux traditionnels pour en connaître les significations, le directeur de l'IEPS donne l'exemple du «zerbout» (la toupie) - très connu par les enfants- et qui contribue au développement psychomoteur, ainsi que l'aspect spatio-temporel chez le joueur. «On observe alors que les finalités du jeu traditionnel sont celles des sports institutionnels.C'est pourquoi nous voulons investir dans un produit purement culturel qui représente notre identité. On arrivera à travers cela, non seulement à sauvegarder notre identité culturelle, mais également à déceler et développer les atouts de ces jeux au profit de la société», développe le chercheur. Distinguant trois aspects présents différemment dans les sports et les jeux traditionnels (à savoir les aspects cognitif, psychomoteur et euphorique), il préconise d'exhorter les enfants à s'impliquer dans les jeux traditionnels, au lieu de s'orienter vers les sports institutionnalisés, comme le football, pour apprendre les valeurs éducatives et sociétales. «Sachant que les jeux traditionnels, comme les jeux d'échecs, ou encore ?'krida'' (jeu des osselets) contribuent au renforcement des capacités cognitives chez l'enfant ainsi que ses interactions sociales. Cela lui permettra également de développer une bonne motricité», explique-t-il encore.Allant plus loin dans son analyse, le chercheur s'interroge sur la capacité de ces jeux populaires à présenter «une des solutions, non seulement comme modérateurs, mais aussi comme initiateurs d'une nouvelle conception des relations sociales, de par leur ancrage local. Par tous ces aspects contextuels, les activités ludiques des enfants, compétitives, festives et corporelles s'imposent comme un miroir de tendances culturelles et sociales plus générales». Généralement méconnus de l'Occident, la description des ces activités peut, selon Dr Belghoul, concourir à renforcer l'hypothèse selon laquelle le patrimoine ludique de chaque société est une singularité culturelle rendant compte des mentalités, des modes de vie et de pensées d'une société ou d'un groupe humain et leur identité à un moment donné.Fort de ces analyses, le chercheur fixe plusieurs objectifs à son projet, dont le plus remarquable est de «mettre en place un module de formation pour l'utilisation des jeux traditionnels dans les programmes d'éducation physique et sportive de l'enseignement primaire, secondaire, universitaire, culturelle, et touristique».


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