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INDUSTRIE INDUSTRIE AUT AUTOMOBILE OMOBILE Cap sur les véhicules décarbonés



L'industrie automobile est probablement le secteur qui a connu le plus bel essor économique depuis le début de la révolution industrielle. Elle emploie aujourd'hui plus de 50 millions de personnes et engrange un chiffre d'affaires annuel de l'ordre de 2 000 milliards de dollars.
Ce développement, qui n'a été ralenti par aucune crise économique, y compris celle de 2008, a apporté bien-être, confort et mobilité à notre société moderne. Revers de la médaille, il a aussi généré des problèmes majeurs de pollution et une surconsommation de carburants qui a conduit à l'accélération de l'épuisement des réserves pétrolières mondiales. La croissance du parc automobile, qui atteindra 1,6 milliard de véhicules en 2030, aggravera davantage ces problèmes. Pour y faire face, l'industrie automobile mise sur les véhicules qui émettent peu ou pas de polluants et consomment moins de carburant : ce sont les véhicules décarbonés et les véhicules à faible intensité carbonique.
Véhicules électriques : des perspectives prometteuses
Le véhicule électrique a déjà connu ses «heures de gloire» à la fin du XIXe siècle. A cette époque, 1850-1900, il représentait plus de 50% du marché mondial de l'automobile. Le mode de propulsion électrique a été, par la suite, complètement abandonné au profit des moteurs thermiques en raison, notamment, de l'abondance du pétrole. Ironie de l'histoire, c'est le spectre de la raréfaction du pétrole, qui est, en grande partie, à l'origine du regain d'intérêt que l'on connaît aujourd'hui pour le véhicule électrique. Ces dernières années, tous les constructeurs automobiles se sont lancés, avec toutes leurs forces, dans l'aventure de l'électrique. Selon les données publiées par l'AIE (voir figure 1), les prévisions de vente des véhicules électriques, de moins de 500 000 unités aujourd'hui, passeront à plus de 8 millions en 2020 et pourraient représenter, d'après certaines sources, 50% de parts de marché en 2050. Ce véritable engouement s'explique par les nombreux atouts des véhicules électriques. Ils présentent notamment un rendement énergétique (70%) trois fois plus élevé que celui des véhicules conventionnels (20%). Ils ne génèrent surtout aucune émission directe de polluants ou de gaz à effet de serre. Même en tenant compte de la pollution des centrales de production électrique, le bilan carbone reste largement favorable à la motorisation électrique. Le développement des véhicules électriques est, cependant, tributaire du règlement du problème de l'autonomie des batteries qui est, aujourd'hui, inférieure à 200 km. Pour y remédier, des budgets immenses sont consacrés à la R&D avec pour objectif la mise au point, avant 2020, de batteries d'une autonomie acceptable (400- 600 km). Quant au coût, autre handicap du véhicule électrique, une étude publiée par le Commissariat français au développement durable estime, qu'en termes de coût total de possession intégrant tous les coûts d'achat et d'entretien, le véhicule électrique sera compétitif dès 2020. Le développement des véhicules électriques bénéficie aussi d'importantes subventions des Etats. Dans certains pays tels le Japon, la Chine, la France et la Grande-Bretagne, des bonus variant de 5 000 à 11 000 euros sont accordés au public lors de l'achat d'un véhicule électrique. Aux Etats-Unis, le gouvernement fédéral a récemment publié un rapport qui recommande d'instituer un bonus de 7 500 US$. Ce rapport consacre aussi la filière électrique comme un axe prioritaire de la stratégie des Etats-Unis dans la réduction de leur dépendance vis-à-vis des importations de pétrole qui, faut-il le rappeler, leur coûtent 1,5 milliard de dollars par jour.
Véhicules conventionnels : un prodigieux gain en efficacité énergétique
Si l'on en juge par le soutien actif des Etats, le véhicule électrique est promis à un bel avenir. Il ne remplacera pas, pour autant, les véhicules conventionnels qui continueront à garder une part dominante du marché jusqu'en 2050, voire au-delà. Les véhicules conventionnels de demain seront, cependant, très différents de ceux d'aujourd'hui. Ils consommeront beaucoup moins de carburants et émettront très peu de polluants. La consommation moyenne de carburant des véhicules neufs des pays développés, actuellement de l'ordre de 5 l/100 km, passera, selon les objectifs inscrits dans les politiques de rationalisation énergétique de ces pays, à moins de 4 l/100 km en 2020 et à 1-2 l/100 km en 2050. Ce prodigieux gain en efficacité énergétique est possible grâce aux innovations technologiques des moteurs dont notamment l'injection directe très haute pression, la turbo compression, la commande électromagnétique des soupapes, le downsizing et autres techniques de taux de compression variables. Il l'est aussi grâce à l'équipement des véhicules d'instruments et de moyens d'aide à la conduite tels le système du «stop and start», le prompteur de changement de vitesses, le régulateur de vitesses, les jauges de contrôle de la pression des pneus…
Type de motorisation : le diesel remis en cause, même en…
Europe Les gains de rendement seront, selon les spécialistes, plus importants pour les moteurs à allumage commandé (moteur à essence) que pour les moteurs diesel. Al'horizon 2020, le rendement énergétique du moteur à essence sera probablement équivalent à celui du diesel. Ce rapprochement de l'efficacité énergétique des deux types de motorisation, d'une part, et les problèmes de pollution, plus contraignants, posés par le moteur diesel, d'autre part, semblent sonner le glas de la motorisation diesel. Même en Europe, terre de prédilection du diesel, la Commission de Bruxelles vient de proposer un projet de directive qui remet en cause le système actuel de taxation favorable au gasoil. Si elle était adoptée, cette nouvelle directive se traduirait par un renchérissement du prix du gasoil de 10% à 15%, ce qui supprimerait le principal avantage qui a permis la percée du diesel en Europe.
FIGURE 1 : PERSPECTIVES DE CROISSANCE DU MARCHE DES VEHICULES ELECTRIQUES (SOURCE : AIE)
Ce projet de directive est, bien sûr, fermement combattu par les constructeurs automobiles européens qui, par le bais de leur association, avertissent des conséquences financières et industrielles néfastes de sa mise en œuvre. Parions, toutefois, que cette directive, même si elle était bloquée momentanément par le lobby du diesel, finirait par s'imposer car elle vise, selon le propre texte de cette directive, à «garantir un degré élevé de cohérence dans la manière dont les différentes taxes sur l'énergie contribuent à la réalisation des objectifs que sont la réduction et l'écologisation de la consommation énergétique dans l'Union européenne». Outre la prééminence du mode de carburation à essence, la conception des moteurs conventionnels sera, dans l'avenir, de plus en plus adaptée au fonctionnement aux carburants alternatifs tels les biofuels et les carburants gazeux. Parmi ces carburants, citons notamment le Gaz Naturel Véhicule et le GPL carburant dont le développement est boosté actuellement par la découverte et la mise sur le marché de quantités de plus en plus importantes de gaz non conventionnels (gaz de schiste).
Algérie : en quoi sommes-nous concernés '
Certes, l'Algérie ne dispose pas d'industrie automobile et, encore moins, de quelques technologies dans le domaine. Elle se doit, cependant, en tant que premier importateur africain de véhicules automobiles, 390 000 unités en 2011, d'assurer la modernisation de son parc conformément aux standards internationaux et éviter que le marché national ne devienne un réceptacle de véhicules énergivores, fortement polluants et de technologie obsolète. Il n'est pas admissible, par exemple, que les véhicules importés aujourd'hui en Algérie, toutes marques confondues, soient, en termes d'efficacité énergétique et de pollution, moins performants que ceux qui sont commercialisés sur les marchés des pays développés. Cette situation se doit d'être corrigée par la mise en place d'une réglementation appropriée qui devra notamment arrêter une norme de consommation de carburant des véhicules importés similaire à la norme européenne (- 5 l/100 km). Cette réglementation devrait aussi rendre plus strictes les normes algériennes actuelles qui autorisent un niveau de pollution des véhicules trois fois plus élevé (sic) que les normes en vigueur en Europe (Euro 5). Elle devrait, enfin, instituer les mesures fiscales idoines à même d'enrayer le phénomène actuel de diesélisation du parc, préjudiciable à l'économie nationale, et d'inciter à la consommation des carburants gazeux, moins chers et plus disponibles localement.
Conclusion
Les contraintes environnementales et la raréfaction prévisible des ressources pétrolières sont en train de remodeler en profondeur les caractéristiques techniques du parc automobile mondial. La voiture du futur sera décarbonée, propre et économe en énergie. Elle utilisera de plus en plus des carburants alternatifs tels les carburants gazeux, l'électricité et l'hydrogène et peut-être même, un jour, l'air (véhicules pneumatiques). Notre pays, à l'instar des autres nations, gagnerait à moderniser progressivement son parc véhicules en profitant des nombreuses avancées dans le domaine de la technologie des moteurs. Cette modernisation est impérative tant pour la sauvegarde de notre environnement que pour la rationalisation de l'utilisation des ressources nationales d'hydrocarbures.
S. A.
*Ingénieur en raffinage et pétrochimie.


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