Algérie

Incohérence


Devant les hommes d?affaires allemands, le chef de l?Etat a estimé dernièrement que l?Algérie a tourné la page de l?économie dirigée. Certes, il devait rassurer ses précieux interlocuteurs, venus de surcroît d?un pays qui a donné ses lettres de noblesse au capitalisme européen, mais pas au prix d?une demi-vérité. La mainmise de l?Etat sur l?économie nationale reste lourde, très lourde même, ce dernier n?ayant concédé réellement aux « lois du marché » que le commerce extérieur et une part de l?investissement dans l?extraction des hydrocarbures. Le meilleur indicateur de la persistance des réflexes économiques d?antan est la reconduction d?année en année de l?assainissement des entreprises publiques, alors qu?il est établi qu?une bonne partie d?entre elles est cliniquement morte. De 1989 à ce jour, 850 milliards de dinars tirés du Trésor public ont servi à cette opération. Les banques publiques, elles, ont bénéficié de 1200 milliards de dinars pour l?« assainissement » de leur portefeuille. Le changement du discours officiel sur cette politique, perceptible depuis deux années, n?a pas empêché la programmation dans la loi de finances pour 2005 d?une autre enveloppe de 37 milliards de dinars. La pression des travailleurs et des syndicalistes pour le maintien des emplois explique une partie de cet entêtement. Mais c?est surtout la « sacralisation » du secteur public par la sphère dirigeante qui est à l?origine de la mise sous perfusion insensée des EPE. Le calcul des gouvernants est double : maintien d?une source inépuisable de rente et mise à leur disposition d?un précieux outil électoral. Tout cela sur le dos de ce qui est appelé la « nouvelle économie », celle qui doit être appelée à prendre la relève du secteur public ou tout au moins à coexister avec elle en toute harmonie. L?ancrage de cette « nouvelle économie » se situe dans le secteur privé et dans la mise en partenariat des entreprises publiques avec des nationaux et des étrangers. Mais si le privé a acquis une meilleure marge de man?uvre que durant les décennies du « socialisme spécifique », il reste néanmoins toujours pénalisé par l?esprit soupçonneux de l?Etat à son égard, tenace reliquat de la « pensée » dirigiste. Hormis quelques spectaculaires réussites, il traîne la patte, quasiment livré à lui-même, sans soutien public réel et conséquent, souffrant de surcroît des maladies infantiles du capitalisme sauvage ancré dans le pays, principalement l?informel. Conséquence de l?incohérence générale qui règne au niveau de la conduite de l?économie nationale : l?Algérie se retrouve avec un secteur public agonisant et un secteur privé amorphe.
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