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Immigrants en Méditerranée



Immigrants en Méditerranée
Les images terribles de flots charriant des centaines de corps inanimés qui font le tour des médias du monde, propulsent de nouveau, au devant de la scène, la question toujours problématique de l'immigration clandestine qui fait tant peur à la rive nord de la Méditerranée. Cependant l'inquiétude de plusieurs Etats de l'Europe envers ce phénomène de grande détresse humaine n'incite pas à la réflexion objective sur les raisons de l'exacerbation d'un tel phénomène. Et pourtant Matteo Renzi, le président du Conseil italien, a récemment déclaré que «la seule solution aujourd'hui est la paix en Libye et la stabilité de ses institutions». Pour ce responsable politique italien, 91% des migrants qui arrivent en Italie depuis l'Afrique passent par la Libye, «exactement comme il y a trois ans lorsque les gens venaient de Tunisie en l'absence de stabilité dans ce pays». Aussi le chaos généralisé en Libye, dans lequel la responsabilité des Occidentaux est particulièrement engagée, encourage les mouvements les plus extrémistes à évoluer en toute liberté. Daech a diffusé une nouvelle vidéo, montrant l'assassinat d'une trentaine d'hommes, présentés comme des chrétiens éthiopiens. Le désordre en cours dans ce pays de la rive sud de la Méditerranée ne pouvait éviter une telle dérive. En 2011 l'intervention de l'Otan provoquait la chute du dirigeant libyen Mouammar Kadhafi. Depuis, la Libye pays particulièrement «stable» au nord de l'Afrique a basculé dans l'instabilité et le chaos généralisés. Les pays voisins comme l'Algérie, la Tunisie et l'Egypte se sont retrouvés confrontés à cette problématique situation à leur corps défendant. La Libye d'aujourd'hui, produit de ceux qui ont voulu la déstabiliser, se retrouve avec deux gouvernements et deux Parlements, l'un à Tripoli sous le contrôle de milices, et l'autre dans l'est du pays, qualifié par les médias dominants comme «reconnu par la communauté internationale». Rares sont les représentations diplomatiques qui ont résisté au chaos en gardant un service minimum dans un pays qui ne possède plus de structures étatiques solides. La situation humanitaire tend vers le pourrissement d'autant plus que les solutions politiques sont difficiles à mettre en pratique sur le terrain. Fin janvier, Human Right Watch a déploré une situation des droits de l'Homme «qui a touché le fond». L'ONG évoque 400 000 personnes déplacées dans le pays, 150 000 autres poussées à la fuite, et 250 assassinats ciblés depuis une année. Cette instabilité endémique a évidemment poussé les travailleurs étrangers vers le départ. Pour un pays comme la Libye, qui attirait des milliers de travailleurs étrangers pour faire fonctionner son économie, c'est une véritable saignée. Du temps de la Jamahiriya il y avait entre 1,5 et 2,5 millions de travailleurs, originaires en majorité des pays du Sahel et de la Corne de l'Afrique.Des pays fragilisés par les interventions occidentalesLa politique migratoire du gouvernement libyen du temps de Kadhafi consistait à faire appel à la main-d'?uvre étrangère tant l'économie avait besoin d'ouvriers et même de techniciens qualifiés. Des expulsions étaient toutefois exécutées en cas de retournement de conjoncture ou de changement d'humeur à Tripoli. Après que Kadhafi ait décidé de changer de politique envers les Occidentaux il était question de l'installation de zones pour les immigrants originaires des pays du Sahel notamment. Des camps de concentrations constituant un premier barrage vers l'Europe qui s'est engagée à «récompenser» Tripoli dans ses différents dossiers en suspens avec les Occidentaux. Pour la Fédération internationale des droits de l'Homme, «les Etats européens préféraient fermer les yeux après que Kadhafi eut monnayé son retour sur la scène internationale en jouant le rôle de gendarme pour l'Europe chargé d'empêcher les migrations illégales». Après la chute du régime de Kadhafi et sa liquidation physique dans des conditions controversées, plus d'un million de ces immigrés ont fui par voie terrestre, notamment vers la Tunisie, avec laquelle la Libye partage une frontière de 460 km. D'autres ont préféré regarder vers le Nord et traverser la mer en direction de «l'eldorado européen». Et dans le contexte d'affrontements entre milices rivales, un grand nombre de réfugiés et de demandeurs d'asile se retrouvent obligés de prendre le risque de traverser la Méditerranée en recourant à des passeurs. Selon l'Unhcr, en 2014 plus de 110 000 personnes sont arrivées de cette manière sur les côtes italiennes, dont la moitié originaires de Syrie et d'Erythrée. Ainsi il est loisible de constater que les zones pourvoyeuses d'immigrants sont les pays fragiles dont l'instabilité, pour la plupart est due, à l'intervention directe ou indirecte des Occidentaux.Un véritable retour de boomerang qui revient avec acuité à la face de l'Europe enfoncée dans ses problèmes économiques. La tendance ne fera que s'exacerber selon les observateurs. Le chaos libyen ne fera que pousser les nouveaux arrivants à tenter la traversée au péril de leur vie. Plusieurs témoignages de différentes ONG confirment que le nombre de migrants africains reste en augmentation à Tripoli et Benghazi. Et c'est justement dans ces zones que la situation des migrants est la plus périlleuse.M. B.


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