Algérie

Ibrahima Sory Tounkara Metteur en scène du «théâtre de la menace»



Ibrahima Sory Tounkara
                                    Metteur en scène du «théâtre de la menace»
De Béjaïa
Parcours - Ibrahima Sory Tounkara est comédien, dramaturge et metteur en scène guinéen (Guinée-Conakry).
Il a participé avec sa troupe à la 3e édition du «théâtre international de la menace» qui se tient à Béjaïa. Pour rappel, il a présenté L'Anniversaire, une pièce qui raconte l'histoire d'un jeune homme qui faisait partie d'une secte, une organisation secrète, et qui, un jour a cessé de croire aux pratiques de cette dernière. Il essaie alors de s'enfuir, mais la menace est toujours là, présente : il est recherché, et les membres de l'organisation finissent par le retrouver.
S'exprimant sur cette pièce, Ibrahima Sory Tounkara dira : «En Afrique, chacun se plaint d'une sorcière, d'avoir été marabouté, qu'on lui a jeté un sort, il trouve toujours une excuse quand il n'a pas réussi ou quand il a trébuché dans la vie, alors nous nous sommes servis du texte de Harold Pinter pour dire cette réalité, illustrer cette menace constante, au quotidien.»
Ibrahima Sory Tonkara fait du «théâtre de la menace» un genre théâtral inspiré de L'Anniversaire, un texte de l'Irlandais Harold Pinter. «Dans le texte, Harold Pinter parle de politique, nous avons récupéré ce texte et l'avons adapté aux réalités guinéennes», dira encore le metteur en scène. Interrogé sur le «théâtre de la menace», Ibrahima Sory Tounkara répondra : «C'est le type de spectacle où il y a une forte pression, soit policière, soit politique, soit sociale ' nous, nous avons voulu qu'elle soit sociale ' c'est-à-dire un genre de spectacle où l'homme est l'ennemi de l'homme, où l'homme est un loup pour l'homme, où l'homme se cache de l'homme». Quant à savoir si on peut considérer le «théâtre de la menace» comme une pratique théâtrale, Ibrahima Sory Tonkara soulignera : «Tout est pratique théâtrale pour moi, et après, c'est une question de démarche ; la vie c'est du théâtre ; je considère que telle pratique où telle expérience est un costume, un déguisement, un vêtement de scène.» S'exprimant en outre sur le rapport qu'a le théâtre de la menace avec le théâtre tel qu'il est pratiqué en Afrique, Ibrahima Sory Tounkara dira : «La correspondance entre ce théâtre et le type de théâtre que j'ai eu à faire réside dans le fait que l'on croit au marabout, à la sorcellerie. L'individu se trouve dans cette perpétuelle menace, est-ce vrai ou pas, je pense qu'il y a des phénomènes qui se font d'une façon un peu bizarre dans nos sociétés africaines, et pour moi, c'est là que se trouve la relation entre le «théâtre de la menace» et la menace permanente qui pèse sur la tête des Africains.»
Le texte de Harold Pinter adapté à la réalité guinéenne prend des couleurs authentiquement africaines. «Le texte comme tel était pour nous un peu difficile, pas difficile dans le sens où c'est un grand auteur, difficile parce que nous créons d'abord pour un public de chez nous, c'est pour ça qu'il fallait adapter le texte à la réalité guinéenne, donc nous avons essayé à travers la mise en espace d'enlever tout ce qui ne nous parlait pas dans le texte, et on a travaillé plus sur le visuel, ce sont plus des images que les gens voient.» Ibrahima Sory Tounkara, pour qui toutes les expériences théâtrales sont les bienvenues, estime que l'usage, voire le réemploi, du patrimoine sur les planches confère au travail une réelle authenticité. Pour finir, Ibrahima Sory Tounkara expliquera, à propos du théâtre en Guinée : «C'était un théâtre classique, celui de Molière, ou calqué sur le modèle français, puis avec l'indépendance, en 1958, il s'est développé un théâtre populaire où il n'y avait cependant pas de professionnalisme, mais néanmoins c'était un théâtre qui permettait d'éduquer et de sensibiliser les populations aux problèmes précis (politiques ou sociaux). L'on parlait à cette époque de propagande populaire de la révolution (révolution culturelle socialiste en 1968), puis en 1984, avec le changement de régime, il y a eu un vide jusqu'aux années 1990, où l'on a commencé à nous professionnaliser : les premiers ateliers, les premières écoles d'art en général, entre autres le théâtre, sont nés. Ce n'était pas du théâtre populaire.» Ibrahima Sory Tounkara reconnaît Toutefois qu'en Guinée «il y a de plus en plus d'auteurs, mais ils n'ont pas encore la force des dramaturges connus, et c'est pour cela que l'ont fait des adaptations».



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