Algérie - 08- La guerre de libération


Hommage à Abane Ramdane
Il y a 55 ans, Abane Ramdane, l’architecte du rassemblement national sous l’égide du FLN, est assassiné par ses pairs. Son tort est évidemment de vouloir dénoncer la tyrannie se profilant à l’horizon. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que ce patriote, jusqu’à l’ultime instant de sa vie, n’a pas abdiqué. Pour lui, le peuple algérien, en combattant le système colonial, n’a besoin d’un nouveau maitre. Ainsi, depuis son arrivée au FLN, Abane Ramdane ne lésine pas sur les efforts pour que l’Algérien soit libre et autonome.

En tout état de cause, bien qu’il ait été entre les mains des geôliers au moment du déclenchement de la révolution algérienne, juste après sa libération de prison le 18 janvier 1955, Abane Ramdane parvient rapidement, grâce à son génie, à gravir les échelons et à acquérir des responsabilités. Le tract, rédigé par ses propres mains le 1er avril 1955, étaie, si besoin est, cette thèse. S’adressant au peuple algérien dans un message limpide, il leur rappelle leur devoir : « Depuis cinq mois, ton armée de libération nationale combat pour que l’Algérie recouvre sa dignité, sa liberté et sa souveraineté.» Dans le même ordre d’idée, il les exhorte à renforcer les rangs des combattants.

D’une façon générale, selon Abane Ramdane, la lutte ne pourra aboutir si les Algériens ne soutiennent pas le combat libérateur et si les autres partis ne renforcent pas, par la même occasion, les organisations mises en place depuis le 1er novembre 1954, à savoir l’ALN et le FLN. En tout cas, en cette année 1955, la tâche paraît tellement immense dans la mesure où ses anciens compagnons de lutte sont divisés sur la voie à emprunter. Très vite, Abane Ramdane s’aperçoit que les centralistes sont récupérables comparativement aux attitudes récalcitrantes des messalistes.

Quoi qu’il en soit, la lutte ne pouvant s’arrêter à cause de certaines positions hostiles au FLN, Abane Ramdane engage des contacts [le comité central a rejoint depuis la résistance] avec les formations susceptibles de renforcer les rangs du FLN, telles que l’UDMA de Ferhat Abbas et l’association des Oulémas. Quelques mois plus tard, il réussit à obtenir la dissolution de ces formations et l’intégration individuelle de leurs militants dits modérés au sein du FLN.

Tout compte fait, pour prouver aux autorités coloniales que la révolution algérienne n’était pas un soulèvement anarchique, Abane Ramdane, avec le concours décisif de Larbi Ben Mhidi, projette la tenue d’un congrès national. Le 20 aout 1956, les congressistes adoptent un programme pouvant mettre à l’abri l’Algérie de toute propension à la dictature. Ainsi, quels que soient les effectifs de l’armée, ces derniers ne doivent en aucun cas prendre le pas sur les politiques.

Hélas, la défaite de la ligne politique défendue par Abane Ramdane, à partir d’aout 1957, condamnera l’Algérie indépendante à passer d’un système de sujétion à celui d’une domination d’une catégorie de nationaux. De toute façon, après l’annulation des deux principes soummamiens, à savoir la primauté du politique sur le militaire et de celle de l’intérieur sur l’extérieur, le recouvrement de l’indépendance ne pourrait accoucher d’un système démocratique. Saad Dahlab, cheville ouvrière lors des négociations d’Evian, qualifiera plus tard la réunion du CNRA d’aout 1957, où les colonels ont tout bonnement supprimé les deux principes de la Soummam, de « premier coup d’État ».

De toute évidence, pour ne pas contrarier leur voracité de pouvoir, les colonels, où la responsabilité des 3B est incontestable, attirent Abane Ramdane dans un guet-apens. Prétextant des escarmouches entre les maquisards algériens et l’armée royale marocaine, le fils d’Azouza est appelé soi-disant à aplanir le différend avec le roi Mohammed V. Arrivé sur place, Boussouf et ses sbires ne lui laissent aucune chance. Pour résumer le sentiment animant les assassins d’Abane Ramdane, Ferhat Abbas, dans l’Autopsie d’une guerre, note que ces derniers « se sont comportés comme les héritiers des Beni Hilal [une armée dévorant tout sur son passage] pour qui la légitimité se fonde sur la raison du plus fort. »

En somme, cette règle, après l’assassinat d’Abane Ramdane, devient quasiment une loi tacite. Plusieurs patriotes sincères ont payé de leur vie toute dénonciation de la dérive tyrannique. À titre d’exemple, on peut citer le commandant Moussa. De toute façon, étant donné que la force est le seul moyen de gravir les échelons, les maitres d’aujourd’hui ne sont pas sûrs d’être ceux de demain. Ainsi, les assassins d’Abane Ramdane vont être, dans peu de temps, dépassés sur ce terrain. En effet, après l’unification de l’armée des frontières sous la houlette de Houari Boumediene, ce dernier va écarter les 3B du pouvoir en 1962. Depuis cette date, l’Algérie n’échappe pas à ce système. Ainsi, aucun homme ne pourrait accéder au pouvoir si l’armée ne le soutenait pas. Cinquante ans après, en mélangeant l’emploi de la force et l’entretien d’une clientèle, le système, fondé en 1962, a encore de beaux jours devant lui.

Ait Benali Boubekeur
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