HAWA : La légende de «Dar el mouahmate»

Photo : Makine F. Il ya un réel sentiment sacré pour les femmes enceintes dans les populations musulmanes et de surcroît concernant celles qui sont aux premiers mois de leur grossesse, «période des envies». «El mouahma» cette élue de la fécondité, un terme tabou jusqu'à aujourd'hui dans nombre de nos régions, est l'objet de toutes les considérations par ses proches, son époux, les voisins. Cette sacralisation presque de la femme durant sa période d'envie fait que l'on ne peut soustraire, dans la mesure du possible, le fruit désiré ou le mets souhaité. «Lui satisfaire son caprice naturel de par son état de future maman c'est faire un pas vers le Paradis», affirme Zineb, plusieurs fois grand-mère et arrière grand-mère.Elle se souvient qu'à chaque fois qu'elle attendait un enfant, pourtant très discrète et peu diserte sur ses grossesses, elle recevait à  l'improviste un plat fumant de «bouzelouf» patiemment préparé par une vieille tante. Ce geste lui fait raconter pour la énième fois la légende d' El Maakra, la femme fardée, cette courtisane de La Casbah qui après avoir offert son tajine de bouzelouf à  une voisine démunie, est morte la nuit même. Béatifiée par les Anges du ciel, celle qui fut la courtisane est entrée dans la légende des Kasbadjis.Une autre légende est liée aux femmes enceintes. Elle vient de Mascara. Elle raconte qu'il y avait une résidence, remplacée plus tard par les colons français par un hôtel, destinée à  ces futures mamans traversant le temps «des envies difficiles à  réaliser». Dar el mouahmate n'était autre qu'un établissement où les citoyens dans leur désir de plaire à  Dieu et en un geste de générosité venaient apporter des fruits hors saison, des primeurs destinées à  des femmes enceintes dont les moyens ne pouvaient satisfaire leurs caprices de gourmandise. Ne dit-on pas que la femme dans l'attente d'un bébé, si elle ne venait pas à  satisfaire son envie verrait son nouveau né venir au monde avec une stigmate, sceau du désir non contenté.