Algérie

Environnement, Dégradation des côtes algériennes



L’environnement en Algérie est des plus dégradés. C’est même une lapalissade. Sous les effets dévastateurs des années de terreur et les poussées des multiples demandes sociales, les pouvoirs publics se sont contentés de parer au plus pressé.

Résultat des courses, un spectacle désolant dans nos villes et villages dont le « décor » frise dans certains endroits l’apocalypse. Mais au-delà des désagréments que cela procure aux autochtones et visiteurs, ainsi que les effets sur la santé humaine, la dégradation de l’environnement à aussi un coût. Un coût économique que des études des programmes des Nations unies a quantifié dans beaucoup de pays, notamment ceux de la rive sud de la Méditerranée. En ces temps de chaleur où la ruée vers les plages est de mise, qu’en est-il du coût de la dégradation environnementale sur nos côtes ? Un début de réponse a été esquissé dans une étude récente (décembre 2005) du programme de l’assistance technique de l’environnement méditerranéen (METAP) relevant des Nations Unies, où il est expliqué que la dégradation de l’environnement peut représenter des coûts considérables pour l’économie à travers différents chemins.

La dégradation de l’environnement en Algérie coûte 3,6% du PIB
Selon l’étude du METAP, la dégradation de l’environnement établie pour Algérie coûte 3,6% du PIB. Cela correspond à 97 milliards de dinars algériens par an (1,7 milliard US$). En plus de 1,2% du PIB en rapport avec les coûts de la dégradation à l’environnement en général. Les études antérieures basées sur une approche du secteur, et ce en examinant séparément l’eau, le sol, l’air, les zones côtières, le patrimoine culturel, les déchets municipaux et les coûts de l’environnement en général ne fournissent pas de détails sur la manière dont les coûts s’accumulent dans une région particulière telle que la zone côtière. Des études où la dégradation côtière a été considérée comme le résultat de « l’érosion côtière qui affecte 250-300 km de plages, l’extraction de sable de 10 millions de mètres cubes pour les 10 dernières années, le dragage de 20 millions de mètres cubes de sol de 18 ports, et la surexploitation de la pêche ». Pour mener leur étude, les experts du METAP ont choisi comme « région pilote » sept communes le long du littoral de l’est d’Alger. La proximité proche d’Alger se traduit par une forte densité de la population dans la zone pilote avec une moyenne de 3197 habitants par km2. La population totale est de 313.471 habitants, avec 287.412 vivant dans les régions urbaines et 26.065 dans les régions rurales. La région inclut des régions urbaines et industrielles denses, en particulier à Mohammadia et Bordj El Kiffan, mais aussi aux alentours de Réghaïa. Selon l’étude, « la région pilote est, à cause de la zone de drainage, affectée par un ensemble général d’industries, y compris les industries hautement polluantes telles que les travaux de galvanisation, les industries chimiques, les industries du papier, les industries pétrolières et les industries médicales, avec des émissions des métaux lourds, hydrocarbures et matière organique ». A la frontière ouest de la région pilote (oued El Harrach), il est indiqué que les normes de la protection de l’environnement sont dépassées par le mercure, le cuivre, le plomb, le nickel, l’arsenic, le cadmium et le chrome. Résultat d’une dégradation de l’environnement typique aux régions en expansion urbaine et faiblement incontrôlées dans la protection de l’environnement, un constat d’échec a été établi : « Les dépenses actuelles de la protection de l’environnement et de la restauration sont clairement insuffisantes et pourraient aggraver la dégradation de l’environnement de la région. Les pertes associées à la dégradation de l’environnement se situent actuellement entre 1,5 et 3,7 milliards DA par an ou 3 et 7% du PIB moyen. » Des coûts comprenant ceux associés aux effets à la santé à long terme et la dégradation des écosystèmes naturels, « qui ne peuvent pas être estimés de manière fiable », précise l’étude. Avec les dépenses pour la protection de l’environnement qui est de l’ordre de 5 milliards de DA, notent les experts du METAP, les coûts actuels pourraient être réduits considérablement. Les mesures les plus urgentes, estiment-ils, du point de vue des coûts réducteurs sont ceux en rapport avec le traitement des eaux usées et la protection de ressources en eau. La protection et la conservation des plages restantes et les espaces verts sont aussi cruciaux. Avec ces mesures, l’étude note que les coûts de dégradation pourraient être réduits à 30-40%. Ecologiquement riche et varié avec des rivages rocheux, des plages sablonneuses et des zones humides, une grande partie des activités économiques se sont concentrées sur les 1200 km de côtes dont dispose l’Algérie. Il est même établi que plus d’un tiers de la population vit dans les communes côtières. Parmi les problèmes environnementaux énumérés pour la zone côtière, figurent la pollution de l’eau, de l’air et de l’eau souterraine dans et autour des centres urbains et industriels, l’expansion incontrôlée de régions urbaines avec la perte de sol agricole et d’espaces verts, l’érosion côtière, l’extraction de sable et la perte des ressources naturelles renouvelables. La législation ne semble pas faire défaut puisque l’Algérie dispose d’une législation « spécifique » en rapport avec la protection et l’évaluation de la zone côtière (loi n°02-02 du 5 février 2002), et approximativement 15 lois supplémentaires et décrets relatifs à la gestion des zones côtières. La législation inclut les deux lois générales qui concernent le développement durable, l’évaluation de l’impact de l’environnement, l’usage du sol et le développement urbain, aussi bien que des lois plus spécifiques concernant des aspects tels que les déchets (y compris les déchets industriels), le tourisme, l’usage des plages et les ressources des pêches. Pourtant, Les experts du METAP considèrent que l’Algérie « enregistre un retard de 10 années par rapport aux pays européens ».

0,12 à 0,35% du PIB comme pertes pour le tourisme
Faisant partie de l’une des victimes directes, le secteur du tourisme subit de plein fouet la dégradation de l’environnement en Algérie. Dans le tourisme, les pertes peuvent survenir à cause de la baisse des taux d’occupation, dans les hôtels qui servent le tourisme vacancier. Un lien direct entre la faible gestion des déchets, le manque d’accès aux plages de qualité acceptable et la rentabilité de l’hôtel a été relevé. Comme il est relevé le manque d’investissements majeurs à cause des incertitudes liées à la qualité de l’eau de mer. Les pertes des plages sont aussi une cause qui a affecté les affaires négativement. Sur la base des déclarations des propriétaires d’hôtels, le taux de l’occupation augmenterait de 20 à 30 pour cent si la pollution côtière et les problèmes de litière n’existeraient pas, note les experts du METAP. Les plages fermées n’offrent pas d’occasions pour le revenu aux activités qui servent le tourisme de plage. En partie, ces pertes sont dédommagées par un usage plus intensif des plages ouvertes, avec un coût supplémentaire de transport, mais c’est aussi possible qu’il y ait une perte absolue. En tout, l’étude évalue les pertes économiques pour le tourisme à cause de la dégradation des plages entre 0,12 et 0,35% du PIB. L’activité de la pêche enregistre pour sa part des pertes. La zone pilote a enregistré trois types de pertes : celles due à la pollution de la région proche qui rend les prises invendables et exige une distance de pêche très longue, les pertes de production et de productivité biologiques (poissons, crustacés…) dues à la détérioration des prairies de posidonie et enfin les pertes de productivité dues à la pollution des oueds. Pour une journée de pêche, le voyage supplémentaire par bateau de pêche peut dépasser les 100 kilomètres. En plus du coût de l’environnement, on enregistre aussi les pertes du temps de travail et les coûts de combustible. Il y a lieu de considérer que la ressource elle-même telle que la crevette rouge fuit les fonds côtiers et se retrouve à des profondeurs de plus de 400-500 m obligeant les chalutiers à prendre plus de « risques » (pêche au large, moyens plus coûteux, pertes de chaluts, temps de pêche plus important, effort de pêche plus important). Un chiffre indicatif montre que les pertes dans les pêches correspondent à 0,19-0,05% du PIB. Le plus haut chiffre est plus vraisemblable parce qu’il n’a pas été possible de fournir un chiffre pour les pertes relatives aux zones des cultures et les régions des pépinières des rivières et le long des rivages dans la région pilote entre oued El Harrach et El Marsa. Le total des pertes annuellement de la production marine est estimé entre 27 et 98 millions de DA et varie de 0,05 à 0,19% du PIB. Par ailleurs, il a été relevé que les rendements agricoles ont été perdus à cause de l’urbanisation estimant entre 184 à 200 millions de DA leur coût total, soit entre 0,36-0,43% du PIB. Enfin et pour remédier à cette situation, les experts du METAP préconisent la mise en œuvre des lois existantes en insistant sur le besoin pour une gérance spécifique des ressources pour leurs mise en application. « Au niveau organisationnel, il y a un besoin d’améliorer les ressources et les capacités des organisations clés afin qu’elles soient en mesure de mettre en vigueur la législation et approuver les politiques environnementales », estiment-ils.

 


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