Algérie

Ecrivain le jour, balayeur du métro la nuit




Ecrivain le jour, balayeur du métro la nuit
Le métro de Buenos Aires ferme, il est 23h00. L'écrivain, Enrique Ferrari, s'enfonce dans un monde sous-terrain avec seaux et balais pour nettoyer la station, et empocher le salaire qui lui permet d'écrire des polars. Sous le nom de « Kike », il a été édité dans six pays et traduit dans quatre langues. Et il a reçu des prix. Mais c'est insuffisant pour en vivre. « C'est une étrangeté du capitalisme bourgeois que de penser que nous, les ouvriers, nous n'avons rien à voir avec la culture », lance le romancier, las qu'on l'appelle « l'écrivain du métro ».C'est « De loin on dirait des mouches » (éditions Moisson Rouge, 2012) qui a fait sa renommée. Avec ce roman policier, son troisième livre, publié en Argentine en 2011, il a remporté le prix Silverio Canada à Gijon, en Espagne. Il a aussitôt été publié en France, au Mexique et en Italie. Dans ce livre, il transforme en cauchemar la vie d'un chef d'entreprise millionnaire, qui découvre un cadavre dans le coffre de sa voiture, pendant dictature militaire argentine (1976-1983). Le livre dépeint en filigrane les travers de la société de l'époque. A 44 ans, Kike Ferrari a écrit cinq romans, mais aussi des contes et des essais. « Vivre de la littérature ' Pour l'instant, l'argent ne suit pas », dit le solide gaillard qui arbore de multiples tatouages. Sur son bras gauche : le visage de Karl Marx.Dans un réduit de quatre mètres carrés dans la station de métro Amia, l'auteur-balayeur profite de sa pause pour corriger un texte sur un vieil ordinateur portable toujours près de lui. « J'écris quand je peux et où je peux, et mon obsession dans la journée est de trouver un moment pour dormir », confie t-il.Pour l'amour de l'artSans formation académique, Kike est un lecteur vorace, père de trois enfants. Dans son appartement, dans un coin de la salle à manger, où les livres s'empilent sur une table. Il va en faire don à la bibliothèque du syndicat du métro. Kike est aussi délégué syndical. « Je comprends la surprise, mais je ne suis pas un énergumène, il y a plein d'ouvriers qui écrivent, font de l'art ou de la musique », s'enthousiasme celui qui se présente comme « un écrivain libre qui vit du nettoyage du métro ». Avant , il a été boulanger, chauffeur-livreur, vendeur. Au début des années 2000, il émigre illégalement aux Etats-Unis, avant d'être expulsé trois ans plus tard, mais avec son premier ouvrage sous le bras, « Opération Bukowski », publié à Buenos Aires en 2004. « Je travaille dans une ville abandonnée. En fonction des déchets que laissent les gens, je peux te dire s'il a fait chaud ou froid, et quel est l'état d'esprit des voyageurs. Dans un univers qui est toujours surpeuplé, je suis celui qui arrive après la fête », plaisante-t-il. Supporteur de River Plate et passionné de rock, il a grandi dans une maison sans beaucoup de livres. « Je ne pense pas à la littérature en terme de carrière », assure-t-il. Mais avant de prendre son service, peu avant minuit pour aller passer la serpillère, il rêve de « gagner un prix international » ou que « Steven Spielberg veuille adapter l'un de ses livres ».



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