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Ecritures africaines
Littérature n Aujourd'hui l'Afrique, riche de sa diversité culturelle et qui en est consciente, refuse désormais de se laisser faire, d'être reléguée à une représentation stéréotypée, réductrice de son image.Elle veut ? et cherche à le faire ? occuper une place de choix sur la scène internationale, ce lieu qu'on appelle «le monde». Elle veut, elle aussi, y jouer un rôle significatif. C'est pour cela que les écrivains de la nouvelle génération s'emploient à l'exprimer dans leurs écrits.«Les écritures africaines interrogent aujourd'hui le monde qui relègue l'Afrique à une espèce de rôle de mamelle de production de matières premières», dira Armand Gauz, écrivain ivoirien, et de renchérir?: «Le monde nous relègue dans cette territorialité et les écritures africaines explosent cette territorialité. Elles inscrivent l'Afrique comme un territoire dans le monde, autonome et à part entière.»A la question de savoir où vont aujourd'hui les écritures africaines, Armand Gauz, romancier, auteur de «Debout-Payé», publié à Paris en 2014, aux éditions Le Nouvel Attila, un livre salué par la critique, notamment pour la qualité de son style, de ses satires sociales, et de son humour, répond?: «Il faut considérer la littérature africaine au pluriel, parce qu'il y a plusieurs écritures?: un écrivain sud-africain, certes il est africain, mais va-t-il prendre la même direction qu'un écrivain égyptien?ou malien ' Est-ce que le fait de partager le même continent fait qu'on doit partager le même destin littéraire, l'écriture va au-delà de ça, elle est extraterritoriale.»Ainsi, la littérature africaine est diverse et plurielle. «Et c'est cela qui fait son originalité, sa force», celui qui, de son vrai nom Armand Patrick Gbaka-Brédé, a remporté le prix des libraires?Gibert Joseph?2014, pour?«Debout-Payé», et celui du meilleur premier roman français de l'année 2014 au classement annuel des «Meilleurs livres de l'année du magazine ?'Lire''» Meilleurs livres de l'année du magazine «Lire»?pour «Debout-Payé».«Debout-Payé» raconte l'histoire d'Ossiri, étudiant ivoirien sans papiers, atterri en France dans les années 1990 pour démarrer une carrière de vigile. A travers ce personnage, le romancier pose un regard aigu sur la France. Le roman est aussi «un chant en l'honneur d'une famille où, de père en fils, on devient vigile à Paris, et plus globalement en l'honneur de la communauté africaine, avec ses travers et sa générosité».Selon la critique, Armand Gauz distingue trois époques mythiques du métier de vigile et aussi des relations entre la France et l'Afrique : l'âge de bronze dans les années 1960 (la Françafrique triomphante), l'âge d'or dans les années 1990 et l'âge de plomb, après les événements du 11-Septembre. Cette épopée est ponctuée par des interludes : les choses vues, entendues et pensées lorsque Gauz travaillait comme vigile au Camaïeu de Bastille et au Sephora des Champs-Elysées. Le romancier, qui montre comment l'immigration évoluait en France, brosse le tableau de la société française. «Un portrait saisissant, drôle, riche, sans concession».Un écrivain est en rapport étroit avec la réalité. Il est le porte-parole d'une histoire, d'un vécu. Et il ne peut s'empêcher de transposer tout cela par le travail de l'écriture. Dans ses écrits, l'Histoire est présente. Elle lui colle à la peau. D'où la question?: si l'Histoire colle à la peau, on peut dire que la peau est le réceptacle de la mémoire?' «Aussi», affirme Armand Gauz : «Parce que c'est la première chose qu'on voit. Mais ce n'est pas forcément un réceptacle. La peau est la première chose qu'on voit, hélas?! On a trop tendance justement à s'arrêter à la peau, qui n'est autre qu'un revêtement, alors que ce qui compte, c'est que la peau est lieu d'échange entre ce qui est à l'intérieur et ce qui est à l'extérieur. Ce que dit la peau, c'est regarder à l'intérieur. On s'arrête malheureusement à la peau, alors que finalement on se ressemble tous.»Yacine Idjerl Quant à savoir comment Armand Gauz définit l'écriture, celui-ci répond?: «Je ne la définis pas. Je la vis. Je la projette ? et me projette en elle. Quand on écrit un texte, plus on avance, plus on se rend compte que les gens ont diverses manière d'entrer dans le texte. Donc, on ne peut pas définir l'écriture, l'inscrire dans une représentation type. Par contre, c'est l'écrivain qui doit être clair avec lui-même. Et encore, l'écrivain n'arrive même pas ? ou difficilement ? à coller l'idée de départ avec celle de la fin. Il n'arrive pas à trouver la chose subtile pour dire ce qu'il a envie de dire. Même dans les échecs, on peut trouver des succès parce que les portes d'entrées sont diverses et tout cela dépend du lecteur et des conditions et des situations et des ambiances dans lesquelles naît et évolue l'écriture. C'est vraiment très complexe. Et du coup, pour moi l'écriture, c'est donner du complexe aux gens, quelque chose de difficile. L'écriture, c'est parler avec quelqu'un.» Armand Gauz explique, en outre, qu'il écrit par passion. «La passion y est naturellement. Et ce n'est même pas par besoin. Je m'intéresse à des gens, je parle à des gens. Ça a commencé pour moi par être une tribune. Je racontais, j'inventais, je fabriquais. J'adorais ça. Et j'adore toujours ça», dit-il. Enfin, interrogé sur ce qui l'a motivé à venir à l'écriture, Armand Gauz souligne?: «En écrivant des lettres à ma maman. J'étais séparé de ma famille, j'étais à l'internat, et il fallait que je parle de ce que je vivais, de ce que je voyais. C'était une manière de me raccorder à la famille. C'est comme ça que j'ai commencé véritablement à écrire. Mes lettres étaient de grands événements à la maison, parce que je rapportais les faits de manière assez drôle et descriptive. Et ma mère me disait souvent cette phrase qui était, à l'époque, énigmatique?: «toi, tu es un écrivain né.» Y. I.





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