Algérie - Actualité littéraire

Djoher Amhis Ouksel, dissèque l’œuvre de Mouloud Mammeri



Djoher Amhis Ouksel, dissèque l’œuvre de Mouloud Mammeri
Elle publie un recueil de ses textes aux éditions Imal : Djouher Amhis dissèque l’œuvre de Mouloud Mammeri
Djouher Amhis Ouksel poursuit son travail de défrichement. Essayiste exigeante, elle s’intéresse aux auteurs algériens dont elle dissèque les ouvres. Son dernier ouvrage, publié aux éditions Imel, rassemble ses articles consacrés à Mouloud Mammeri, écrivain et anthropologue.
«Je livre aux lecteurs et lectrices un ensemble de travaux consacrés à Mouloud Mammeri. Ils sont destinés à enrichir la connaissance de notre culture et à rendre hommage à cet aguram [sage, NDLR] qui a pris conscience très tôt de la richesse de notre patrimoine», met en avant l’auteure dans sa présentation. Notant que sa contribution «est le fruit d’une expérience d’éducatrice», Mme Amhis précise que l’objectif du recueil est double : faire connaître l’homme hors du commun et inciter à une réflexion approfondie de «ses mots d’oracles».
«Lors du centenaire de sa naissance [2017, NDLR], on a mesuré l’apport exceptionnel de ce chercheur. Il était sur tous les fronts. Il fallait se hâter car «l’histoire va fermer», tranche-t-elle, rappelant à raison le «devoir de contribuer à préserver cette richesse culturelle». Plusieurs thèmes sont traités dans les textes formidablement bien écrits et documentés.
Toute l’œuvre y est bien disséquée : de ses textes de jeunesse et l’éveil à la nécessité de connaître, défricher et préserver la culture ancestrale, aux œuvres de fiction, auxquelles Mme Amhis a consacré des essais (publiés aux éditions Casbah), en passant par les écrits engagés, l’œuvre de Mammeri est présentée avec un sens inégalé de la pédagogie que les lecteurs ont toujours apprécié.
«C’est en pédagogue chevronnée qu’elle [Mme Amhis, NDLR], aborde l’œuvre de M. Mammeri», note Ghenima Rekis Kemkem, enseignante et formatrice de formateurs, dans sa préface. Expliquant que le projet de Mme Amhis consiste à «faire connaître un grand intellectuel et œuvrer à la promotion de la lecture», Mme Kemkem relève que l’auteure «décrypte avec minutie» l’œuvre et «propose des pistes de lecture pour nous révéler toute la richesse, la diversité et la profondeur de cet Amusnaw qui jouissait déjà de son vivant d’une audience immense». Natif de Taourirt Mimoun, Mouloud Mammeri s’est intéressé à la culture des ancêtres. Parti chez son oncle installé à Rabat (Maroc) comme précepteur du futur Roi Mohamed V, il revient à Alger pour poursuivre ses études au Lycée Bugeaud (actuel Lycée Émir Abdelkader).
«Défricher sans arrêt»
Ayant entamé un cursus au lycée Louis-le-Grand, à Paris, il est mobilisé, après le débarquement américain. Enseignant à Ben Aknoun à la sortie de la Seconde guerre mondiale, il publie son premier roman très remarqué, La Colline oubliée (1952). Suivra une œuvre romanesque marquée par une histoire nationale brûlante (Le Sommeil du juste, L’Opium et le Bâton, La Traversée).
Engagé dans la lutte de libération, il est contraint de se rendre au Maroc. Revenu au pays, il enseigne le berbère à l’université, dans le cadre de la section d’ethnologie. Un autre travail exigeant d’anthropologues et de linguistes aboutira à la publication de plusieurs essais (Les Isefra de Si Mohand ou M’hand, L’Ahellil du Gourara, Yenna-yas Ccix Muhand, Tajerrumt n’tmazigt (tantala taqbaylit), etc.) Mammeri «défriche sans arrêt, car l’angoisse le saisit, celle d’une perte irrémédiable car «l’histoire va fermer» (Michaux).
«Il y a urgence à fixer, pour les prochaines générations les témoignages d’une grande civilisation eut ainsi à développer la conscience historique», souligne Mme Amhis dans une conférence prononcée à la librairie de l’ANEP, le 1er mars 2018 publiée sous le titre : Mouloud Mammeri : un intellectuel d’exception, un «aguram» (p43).
Dans le même texte, elle affirme : «La démarche de Mouloud Mammeri est celle d’un amusnaw, un grand du savoir doublé d’une prise de conscience remarquable. Recueillir, recenser, transmettre, exploiter toute cette richesse accumulée que les différentes dominations ont tenté de falsifier voire effacer.
Tout son savoir est mis au service de cette quête inlassable, il est vraiment «un aguram», «mot berbère ancien qui désigne le sage, le chaman détenteur du savoir des Anciens et gardien des valeurs culturelles du groupe». Pour les lecteurs qui ont apprécié son œuvre foisonnante, Mme Ouksel est elle-même une sage. Eternelle reconnaissance pour son travail, acharnée d’éducatrice et d’essayiste.
Nadir Iddir
El Watan
Djoher Amhis Ouksel, Mouloud Mammeri,
Aguram n Ath Yenni, Edition IMAL 850 DA
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