Algérie - Revue de Presse



Dans un pays où les chiffres sont approximatifs et lesstatistiques aléatoires, voire inexistantes, le Centre national dedocumentation et d'information, le CNIS, relevant des Douanes, faisait figurede rare oasis dans le désert de l'information économique.C'était, avec les limites inhérentes à ses moyens, un desmeilleurs indicateurs de tendance pour ceux qui tentent de suivre l'évolutionde l'économie algérienne. On pouvait, à la lumière de ses rapports réguliers surles exportations et les importations, prendre la mesure de l'ampleur croissantedes déséquilibres structurels de l'économie rentière. Quand les données du CNISétaient mises en perspective, le journaliste ou l'économiste disposait del'illustration chiffrée d'une économie qui importe tout (voitures, alimentation,médicaments, lait, blé, etc.), et qui n'exporte quasiment que des hydrocarbures.Le CNIS, dans la froide neutralité des statistiques, donnait à voir cesdernières années, avec l'aisance pétrolière, les tristes « records»d'importations battus d'une année sur l'autre.L'illustration glaciale d'une économie de rente organiséeautour de la consommation... D'année en année, les chiffres du gaspillage et dela stérilité constituaient une alerte silencieuse récurrente: l'activité seréduit à l'exportation d'énergie fossile et à l'importation du reste.Mais pourquoi en parler au passé ? Tout simplement parceque le CNIS n'existe plus. Une disparition sans préavis de la part du ministèredes Finances ou de la direction générale des Douanes. C'est par un décretpublié dans le dernier Journal officiel qu'on apprend que le Centre national dedocumentation et d'information est dissous et que ses moyens matériels et sespersonnels sont mis à la disposition de l'administration centrale des Douanes. Onse met à lire et à relire avec attention le décret, on cherche vainement uneindication ou une phrase indiquant que ses missions sont assumées par une autrestructure. Apparemment, l'information va disparaître avec le Centre, comme sinos gouvernants, irrémédiablement brouillés avec les chiffres, ne supportaientplus la traduction statistique de la réalité. «Cachezce sein que je ne saurais voir !», faisait dire Molière à Tartuffe.Le CNIS donnait-il de « mauvaises » indications en montrantque l'Algérie était le déversoir de toutes les marchandises du monde, y compriscelles que l'on serait en mesure de fabriquer sur place ? Donnait-il par sesrapports réguliers une consistance au sentiment que les importateurs sont, sinonau pouvoir, du moins suffisamment puissants pour peser de manière décisive surles politiques publiques ? Etait-il devenu l'insupportable messager puniuniquement en raison de la teneur du message qu'il était chargé de transmettre ?On se perd en conjectures puisque ni les Douanes, ni leministère des Finances, ni les services du Chef du gouvernement (le décret dedissolution est signé par Abdelaziz Belkhadem) n'ontjugé utile d'expliquer aux nombreux usagers du service fourni par le CNIS, dontles journalistes, les raisons qui ont conduit à sa dissolution.C'est d'autant plus surprenant que dans la production et lamise à disposition des données relatives aux importations et exportations, leCNIS était l'outil de référence qui avait largement démontré son utilité. Entout cas, la méthode laisse perplexe: s'agirait-il de détruire le thermomètrepour supprimer la maladie ?
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