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Décès de Belaïd Abdeslam




Belaïd Abdeslam, ancien chef de gouvernement, est décédé à 92 ans, hier à l'hôpital militaire de Aïn Naâdja à la suite d'une longue maladie.Ce natif (1928) de Aïn Kébira, dans la wilaya de Sétif, aura marqué d'un sceau indélébile son action politique dans l'Algérie postindépendance par la multitude de postes de responsabilités ministérielles jusqu'à en être le chef de gouvernement (1992-1993). C'est sous feu Houari Boumediène que ce personnage controversé émergera après de longues années d'engagement militant en France en tant qu'étudiant en médecine avec, surtout, la création de l'Union générale des étudiants musulmans algériens (UGEMA).
Très tôt, il marquera son intérêt pour les questions en rapport avec le dossier des hydrocarbures en qualité de délégué aux Affaires économiques dans l'exécutif provisoire et cela lui vaudra d'être appelé par Boumediène qui, paradoxalement, ne le tenait pas en odeur de sainteté ainsi qu'il le révélera dans son ouvrage-témoignage : Chroniques réflexions inédites sur des thèmes sur un passé pas très lointain.
Militant de la première heure puisqu'il sera happé par les événements du 8 Mai 1945 et emprisonné. Jeune lycéen, il se forgera au nationalisme pur et dur et se heurtera aussi bien aux communistes qu'aux islamistes algériens. Il campera sur ses positions, aussi haut que le porteront ses responsabilités au sein du pouvoir. Et cela lui vaudra des inimitiés féroces et durables. Personnage controversé, il avait ainsi des positions tranchées et ne portait pas dans son c?ur les Oulémas, épinglant à loisir Bachir Ibrahimi et son héritier Ahmed Taleb et les «laïco-assimilationnistes». Il n'en démord pas jusqu'à la fin. Personnage politique à la stature d'un homme d'Etat, les étapes de sa vie se confondent avec celles de l'Algérie postindépendance. Il sera plusieurs fois ministre dans différents secteurs mais le plus emblématique est celui des hydrocarbures au moment où l'Opep et le mouvement des pays non-alignés montait en puissance. La guerre d'Octobre 1973 consacrera l'arme du pétrole. Dès lors, « Monsieur pétrole » sera dans les débats permanents sur les stratégies de souveraineté des richesses naturelles des pays en développement. Un moment phare des réunions périodiques des pays de l'Opep, à Vienne, (Autriche) a été le spectaculaire rapt des ministres du Pétrole et leur rapatriement sur Alger. Cette fonction de patron du pétrole le poussera à éditer un ouvrage : Le gaz algérien dans lequel il clouera au pilori son successeur Belkacem Nabi à qui il reproche « l'indexation du prix du gaz à celui du pétrole qui s'est avérée, selon lui, un fiasco puisque cela revenait à livrer gratuitement le gaz à nos clients. Une vérité qui a été cachée à l'opinion publique, dira-t-il. L'autre moment fort de Belaïd Abdeslam est incontestablement lié aux choix de la politique de développement à travers l'industrialisation et son échec. L'ancien chef de gouvernement en gardera un goût amer et c'est pourquoi il s'étendra longuement dans ses « mémoires » comme pour s'en dédouaner. Il s'insurge contre la litanie des « industries industrialisantes » « préconisées à l'Algérie par Gérard Destanne De Bernis », de « l'industrie lourde adoptée, conçue et construite suivant le modèle soviétique », de « l'agriculture sacrifiée au profit de l'industrie » et d'autres thèmes éculés de ce genre. Eloigné un temps de la scène politique, il tentera un retour lors des législatives de 1991 en tant que candidat FLN dans son fief. Les urnes feront sortir, à sa grande surprise, un islamiste du FIS. Il aura alors cette déclaration sibylline : « Les électeurs ont été mis devant le choix d'Allah et moi-même, c'était joué d'avance ! » Nommé chef de gouvernement et ministre de l'Economie, Belaïd Abdeslam (8 juillet 1992 au 21 août 1993) confessera dans un autre ouvrage toute la difficulté qu'il a eue à remettre sur les rails une institution menacée de déliquescence. Il aura cette observation pour les quelques mois de gouvernance : « Durant l'existence de mon gouvernement, puis depuis qu'il a été mis fin à mes fonctions de chef de gouvernement et même de nos jours, j'ai été et continue à être l'objet d'attaques ou, à tout le moins, d'écrits et de commentaires tendant à dénigrer mon action à travers les actes de mon gouvernement et à dénaturer les idées qui ont toujours guidé mes initiatives ou inspiré mes prises de position sur les problèmes relatifs à la vie de notre pays.» C'est dire. En 1999, il est candidat à la candidature en tant qu'indépendant aux élections présidentielles mais ne parvient pas à récolter le nombre de signatures suffisant.
Le défunt?aura mis à profit ses années de pratique politique et à la tête de hautes fonctions dans les plus hautes sphères pour nous léguer, aux étudiants, aux chercheurs une série d'ouvrages riches en témoignages, riches en documents officiels, riches et inédits.
Brahim Taouchichet


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