Algérie - Revue de Presse

Décédé en décembre 2004 L'inimitable Abdellah Mohia



Décédé en décembre 2004 L'inimitable Abdellah Mohia
Publié le 05.12.2023 dans le Quotidien l’Expression

Abdellah Mohia ou Mohand Ouyahia a marqué, de manière indélébile, la culture algérienne d'expression amazighe.
Il est considéré comme l'un des piliers de la dramaturgie en Algérie et le repère incontournable du théâtre d'expression kabyle, voire son fondateur.
Son oeuvre est à ce jour la source d'où puise la majorité des hommes de théâtre qui oeuvrent à promouvoir le théâtre amazigh. Abdellah Mohia nous a quittés prématurément en décembre 2004 alors qu'il pouvait encore vivre et enrichir notre culture mais la maladie et le destin en ont décidé autrement.
Abdellah Mohia n'avait que 54 ans lorsqu'il nous a quittés. Ses proches rapportent qu'il avait des tas de projets d'écriture en cours de concrétisation. Et de nombreux chantiers inaboutis alors que certains étaient très avancés. Les confidents du fils d'Ait Eurbah (Tassaft) ont même révélé qu'Abdellah Mohia avait traduit «La République» de Platon en langue amazighe. Mais, 20 ans après son décès, son oeuvre reste à ce jour non éditée. Aucune de ses oeuvres, qu'elle soit théâtrale ou poétique, n'a été imprimée et publié chez un éditeur.

Fondateur du théâtre d'expression kabyle
Chose déplorable car avec la reconnaissance de tamazight comme langue nationale et officielle et son introduction dans l'enseignement, l'oeuvre de Mohia est plus qu'indispensable et l'une des plus indiquées pour servir de support pédagogique. Son oeuvre enregistrée sous des supports audio et largement diffusée sur Internet, mérite d'être sérieusement prise en charge et éditée dans les meilleures conditions et les meilleures formes qui soient, Mohia faisant partie de la crème des auteurs algériens. Son oeuvre est de haute facture.
À ce jour, le théâtre d'expression amazighe a du mal à lui trouver un digne héritier car Abdellah Mohia a tellement placé la barre très haut! Mohia a vécu son enfance principalement à Azazga avant d'être scolarisé au lycée «Amirouche» de Tizi Ouzou, où il décrocha brillamment son baccalauréat. Après quoi, il regagna l'université d'Alger en 1968. Il obtint une licence en mathématiques en 1972 et partit en France pour poursuivre ses études supérieures et finit par s'y installer.
Son engagement en faveur de l'identité amazighe le poussa à y consacrer tout son temps. Il adhéra naturellement au «Groupe d'Études amazighes», créé à l'université Paris VIII (Vincennes).
Il y participa à l'animation des revues publiées par ce groupe dont Bulletin d'études amazighes (BEA) puis Tisuraf. Son penchant pour le théâtre prit toutefois le dessus. Il finit par fonder une troupe théâtrale «Asalu». C'était en 1983, au lendemain du printemps berbère. Il mit alors le paquet sur l'adaptation de pièces théâtrales universelles dont les auteurs sont ce que ce genre a donné de mieux à l'instar de Molière, Beckett, Brecht, etc.

Allier l'authenticité à l'universalité
L'objectif que s'était assigné Mohia, et qu'il a atteint avec brio, consistait à allier harmonieusement, authenticité et universalité, dans son oeuvre. Bien qu'il s'agissait d'une tâche très difficile, Mohia est parvenu à son but. Il a réussi à conférer à son oeuvre une originalité que lui reconnaissent tous ses pairs ainsi que les critiques. En plus de ses compétences personnelles, Mohia avait eu l'ingénieuse idée de fonder des ateliers pour mener ses travaux d'adaptation. Ce travail de groupe a permis d'aboutir aux résultats concluants que l'on connait. Mohia est également comédien puisqu'il a joué lui-même la majorité des pièces de théâtre qu'il avait adaptées en kabyle comme Am win yetsradjun Rebbi, Sinistri, Si Lehlu, Tachvaylit, etc. Le vide qu'il a laissé sur la scène théâtrale amazighe est, à ce jour, impossible à combler surtout en l'absence d'une relève qui puisse hisser son oeuvre aux cimes atteintes par celle de Mohia.
Aomar MOHELLEBI

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