Algérie

De la Maison du peuple à El Aurassi



Faut-il s?attendre à quelque chose de la grand-messe syndicale qui s?ouvre ce matin au salon rose de l?hôtel El Aurassi ? Pas vraiment, voire pas du tout. Dans la forme, l?évacuation de la « maison du peuple », jadis la Mecque des « masses laborieuses », décidée par les patrons de l?UGTA, pour aller tenir leur conclave dans les salons feutrés de ce luxueux établissement algérois, est déjà un signe que l?appareil a pris de la hauteur? Qu?un aussi « grand » syndicat, comme il le prétend, se paye trois jours à El Aurassi pour mettre au chaud ses milliers de délégués, alors qu?il est incapable d?écouter les cris de ces autres milliers de laissés-pour-compte humiliés par des statuts particuliers déclassants, est symptomatique de cette rupture structurelle entre l?appareil et ce qui reste de sa base. Ce onzième congrès de l?UGTA a toutes les allures d?un non-événement n?était que ses résultats ? au demeurant connus d?avance ? préfigurent via les derniers rabibochages, les projections politiques du gouvernement. La centrale de Sidi Saïd, qui agit comme un bras séculier du pouvoir politique pour mater l?action des syndicats autonomes, est également un baromètre fiable et viable en prévision des futures mobilisations politiques. Et dans ce partage savant des rôles, l?UGTA, ce résidu de l?ère des glaciations, se soucie moins du sort du petit travailleur que de sa survie en tant qu?appendice. Que les travailleurs compressés ou en voie de l?être battent le pavé n?effraye plus l?état-major de l?union qui ne se sent pas forcément interpellé. Après tout, quand il s?agit de glisser quelques poignées de dinars dans les poches trouées par l?érosion du pouvoir d?achat du misérable salarié, c?est au gouvernement, voire au président Bouteflika de décréter la décision. Il est significatif de le constater au terme de chaque bipartite ou tripartite, que les partenaires qui auront négocié jusqu?à l?aube, attendent que l?oracle soit rendu depuis El Mouradia. Ce simulacre de négociation est juste destiné à donner quelque crédibilité de forme à l?UGTA pour qu?ensuite le vrai décideur Abdelaziz Bouteflika clôt le show de loin. Le deal est clair : l?UGTA fait semblant de négocier « âprement » avec le gouvernement et le Président intervient pour couper la poire en deux. Résultats des courses : les bipartites et tripartites sont devenues des moments forts de (re)mobilisation des troupes du président Bouteflika qui en tire les dividendes politiques. Quant à la centrale syndicale, elle trouve souvent son compte de son statut de partenaire unique quand bien même elle n?aurait été pour rien dans tous les « acquis » sociaux arrachés par la seule volonté du président? N?a-t-on pas vu d?ailleurs l?UGTA de Sidi Saïd remercier le chef de l?Etat pour avoir concédé les maigres augmentations des salaires de la Fonction publique ou encore du SNMG ? Quel bilan crédible présentera donc l?équipe sortante pour espérer convaincre les congressistes de lui offrir un autre bail ? En plus d?un deuxième mandat de fait ou de force, en tordant le cou au règlement intérieur de l?appareil, puisque ces assises devaient se tenir en 2005, les dernières années de l?UGTA furent une succession de profils bas consignés dans un « pacte économique et social » qui aura définitivement chloroformé son action, et pour longtemps.
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