Conférence de presse à la librairie Chaïb-Dzaïr : Tlemcen, une cité prestigieuse

Sihem Oubraham - El Moudjahid

Ph. Nesrine

Dans la perspective de ressusciter l'histoire de Tlemcen, une rencontre sur l'histoire de cette ville a eu lieu, mardi après-midi, à la librairie de l'ANEP.

Animée par M. Fouad Soufi, chercheur historien, cette rencontre axée sur Tlemcen et sa région, entre dans le cadre de la présentation de l'oeuvre intitulée Tlemcen capitale du Maghreb central, un ouvrage paru aux éditions Dalimen et signé par Abderrahmane Khelifa, historien et archéologue. A défaut de la présence de l'écrivain, les organisateurs se sont trouvés dans l'obligation d'organiser cette conférence. M. Soufi est revenu sur l'histoire de Tlemcen élue capitale du Maghreb central par les Ziyanides et qui « recèle 80% du patrimoine islamique algérien », a-t-il indiqué. Devenue un havre de paix pour les monarques, cette citée est considérée comme une "ville de lumière", car abritant des hommes de sciences, des arts et des lettres. Tlemcen jouit d'un passé d'une importance plurielle. Son emplacement géographique merveilleux et son statut politique, dans les temps anciens, l'ont consacrée capitale du Maghreb central (Algérie). D'un point de vue linguistique, la ville de Tlemcen forge son nom d'un vocable composé de deux lexiques berbères qui sont « tilem » qui veut dire rassembler, réunir, et « cèn » signifiant le duel, ou les deux. Ainsi, ce nom signifie la réunion de deux natures différentes, à savoir les deux composantes géographiques de cette ville que sont : le Tell et le Sahara. En d'autres termes, le nom « Tlemcen » veut dire la ville qui réunit deux reliefs et deux climats différents, celui du Tell et celui du Sahara. Les historiens, At-Tabari, Ibn Khaldoun, et Ibn Ar-Raqîq, notent que son origine remonte aux temps de la tribu berbère Zenata, qui résidait dans cette région ainsi que dans les régions avoisinantes. Les "Banou Ziyan" y bâtirent des châteaux aux décors magnifiques et de très belles maisons ils érigèrent des jardins et des vergers à travers lesquels ils firent circuler des cours d'eau, ce qui permit à Tlemcen de devenir la plus importante métropole du Maghreb, a-t-il affirmé. Les gens venaient la visiter depuis les pays les plus lointains. Ainsi, les différents domaines des sciences et des industries se multiplièrent très vite, les savants émergèrent et les sommités de la région devinrent très célèbres. « Tout cela lui donna accès à concourir avec les grandes villes des autres pays islamiques ainsi qu'avec les bases califales ». Durant la période ottomane, elle a été connue comme l'une des plus importantes régions du beylik de l'ouest. Elle se distinguait par ses grandes écoles et ses établissements culturels, mais également par ses grandes personnalités de renom. Cet historien a également souligné que Tlemcen a joué un rôle très important depuis le Moyen âge, puisque c'est à ce moment-là que les grandes tribus zénètes se sont attribuées un pouvoir et à partir de ce centre politique et économique, « il en a résulté une capitale avec ses monuments, ses palais, ses édifices, ses médersas qui étaient réputées dans l'ensemble du Maghreb et même en Orient », a-t-il affirmé. Situé à 800 m d'altitude, Tlemcen (en berbère les sources) de part sa proximité de la mer jouit d'un climat tempéré, méditerranéen et de richesses naturelles très diversifiées. Recevant des pluies abondantes son sol très fertile a assuré une implantation des populations depuis les temps les plus reculés. L'occupation humaine eut lieu dès la nuit des temps. Après une période préhistorique, une période numide avec en particulier le règne du roi berbère Syfax, avec comme capitale Siga, survint la période romaine. Les Romains lui donnèrent le nom de Pomaria (les vergers), la ville était de 32 à 430 après J.C. un poste fortifié tenu par une cavalerie d'éclaireurs romains à l'extrémité occidentale du limes d'Afrique. De par sa position géographique, Tlemcen développe ses relations économiques avec l'Afrique et l'Europe la capitale devient un grand centre commercial avec un quartier franc El Kessaria. Tlemcen a été un point de fixation surtout pour le commerce, puisque ce fut un des grands boulevards de la route de l'or qui allait jusqu'à Tombouctou, Gao en passant par l'Andalousie et même l'Italie. Il y a lieu de rappeler, que la ville de Tlemcen possède plusieurs ruines qui remontent aux différentes époques islamiques. Elles témoignent de la prospérité de cette ville et de son niveau de civilisation et d'épanouissement scientifique et intellectuel. Cependant, les plus importants vestiges en dehors des mosquées et de la forteresse El Mechwar, sont celles de la ville d'el Mansourah. Il s'agit d'une cité quasiment militaire, érigée par le sultan mérinide Abou Yacoûb au 7e siècle de l'hégire. Le sultan, après maintes vaines tentatives pour assiéger la ville, ordonna de construire un important camp militaire afin de renforcer un blocus qu'il avait déjà engagé contre elle, et pour que ce camp soit aussi une base de vie pour l'effectif de son armée. Ainsi, en 698 H./1299, ce sultan envoya un bataillon qui campa près de la ville de Tlemcen et l'encercla sévèrement pendant plus de huit ans. C'est durant cette période que la ville d'El Mansourah fut construite, on a prétendu faire de son nom un signe de bon augure, car il signifie la victoire, le succès, la réussite, le triomphe, etc., ce qui donna à la ville d'El Mansourah le sens de "la ville victorieuse". En effet, la ville de Tlemcen, en dépit du très long blocus et des harcèlements et attaques, demeura infaillible et imprenable. Quant à El Mansourah, elle finit par succomber à la résistance chevaleresque de Tlemcen, et fut réduite à des débris et vestiges desquels on devrait tirer des leçons de morale à plus d'un titre.