Algérie - Revue de Presse


Répression et réconciliation  Il est évident que la perception de la nature de la solution à apporter à la violence -ou plutôt au terrorisme- dépend fortement du rapport entre l’Etat et la nationalité des personnes à incriminer. La thérapie que devrait appliquer l’Algérie à ses nationaux qui évoluent dans le champ de la violence, comme auteurs, est fatalement différente de celle qu’appliquent les Etats-Unis par rapport aux adeptes de la violence qui ne sont pas Américains. Ces derniers peuvent bien «s’amuser» à bombarder des villes et villages entiers, tuer «chirurgicalement» un nombre important de civils parmi les populations (ne parle-t-on pas de centaines de milliers de morts en Irak?), ce qui ne peut être le cas pour le pouvoir algérien qui fait intervenir les forces armées algériennes sur le territoire algérien. Y a-t-il contradiction entre les démarches successives des pouvoirs qui se sont succédé ou bien y a-t-il une même ligne directrice stratégique autour de laquelle ont été élaborées et mises en œuvre des politiques d’action cohérentes? Dans les différents comportements des pouvoirs successifs, si on peut bien parler de pouvoirs successifs, ou qualifier ceux-ci d’alternances au sein de ce qui est appelé «le système», on pourrait identifier deux lignes de conduite apparemment bien distinctes dans les politiques d’action qu’elles ont inspirées mais dont l’une a été au service de l’autre dans la phase terminale. La première ligne de conduite a suivi un processus de concessions, complètement en contradiction avec la fermeté qui a porté l’action sécuritaire. Celle-ci a démarré par la politique de la Rahma (ou plutôt de la main tendue) et avait abouti à la réconciliation nationale en passant par des étapes intermédiaires dont celle de la concorde civile. Pratiquement en opposition aux éclaircies conditionnelles de la première, la deuxième démarche a commencé par un discours de fermeté et des actions répressives sur le terrain pour soutenir ce qu’on appelait la lutte antiterroriste, à savoir, en résumé, l’ouverture de camps dits de sûreté dans le Sud, la dissolution du FIS, les fameuses sentences prononcées par Zeroual (traîtres, criminels et mercenaires), l’affichage «wanted, mort ou vif» des têtes des émirs des mouvements armés sur les murs d’Alger avec, comme dans le Far West des cow-boys de l’époque, l’offre de centaines de millions de centimes par «tête de pipe» pour ceux qui auront des informations susceptibles de les arrêter ou de les neutraliser physiquement, le passage en boucle sur l’écran de la TV des «ridjalloun wakifoun»… Deux lignes de conduite apparemment contradictoires, semblant évoluer l’une indépendamment de l’autre, évoluent en parfaite cohérence. L’action «militaire» servait à la fois à créer des situations d’impasse pour ce qu’on appelle la violence -si on peut appeler ainsi des massacres collectifs et des embuscades- et à rabattre les éléments des groupes armés vers la réconciliation.La politique de la Rahma, quant à elle, était destinée à réduire la pression sur les forces de sécurité et les populations en contribuant à dégarnir les maquis, c’est-à-dire à réduire la capacité de nuisance des groupes armés, quand bien même les populations n’arrivent pas toujours à comprendre qu’on puisse retrouver dans la rue, libres de circuler comme bon vent ils le souhaitent, ceux dont la tête a été mise à prix. Il est alors naturel que des incompréhensions demeureront toujours sur les approches que fait le pouvoir du traitement à appliquer au phénomène de ce qui est appelé terrorisme, lequel est défini selon le principe des oscillations stratégiques. N’est-ce pas qu’une amnistie pour des crimes définis comme terroristes décriminalise ces derniers et re-confère la caution politique à leur cause alors qu’il avait été investi durant une décennie dans le retrait de la couverture politique au terrorisme, une telle stratégie n’ayant cependant pas pu ou pas su s’adosser à une politique bien claire et bien comprise? Il sera peut-être bien difficile à l’avenir de les contraindre, ou du moins à contraindre ceux qui avaient pris les armes par conviction, à renoncer à leur réhabilitation politique, c’est-à-dire à exercer de nouveau le droit à militer alors qu’il semble que pour le moment ils ne présentent guère des aspirations à leur intégration dans le champ politique, du moins ceux qu’on appelle les irréductibles et qui font de l’extrême violence le point de départ de leur stratégie, ce qui signifierait leur non disponibilité au dialogue quand bien même cette perspective leur est assurée par le pouvoir.
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