Algérie - 01- Indépendance

Colonel Chaabani"Heureux les Martyres qui n'ont rien vu!"



Colonel Chaabani
Abderrahmane Chaabani

Suite aux déclarations de Ben Bella à la chaîne TV Al-Jazira, reprises par le quotidien Echourouk du 09.12.2002, déclarations selon lesquelles «Mohamed Khider aurait été assassiné par Boumediene, la mort du colonel Chaâbani est l'œuvre de l'armée et que l'assassinat de Mohamed Khemisti, ministre des affaires étrangères, par Zenadi Mohamed est un crime passionnel».

Je tiens à dénoncer, en tant que frère du colonel Chaâbani, les déclarations mensongères et diffamatoires sur les tenants et les aboutissants ayant trait à l'assassinat du colonel Chaâbani. La vérité qu'a voulu taire Ben Bella est qu'il est le seul responsable de la mort du colonel Chaâbani. Les éléments matériels de réponse pour éclairer cette page de l'histoire d'Algérie qu'on a voulu déchirer à jamais, sont à la portée des chercheurs et étudiants au niveau de la bibliothèque nationale d'Alger. Quant aux témoignages de personnalités politiques -et non des moindres- «président Boumediene, colonel Zbiri» : Premièrement : il ressort de la 1ere page du quotidien Alger Républicain daté des 28 et 30 juin 1964 que la première décision prise par Ben Bella à l'encontre du colonel Chaâbani a été son éviction du bureau politique du FLN «instance suprême de l'État» sans se référer au Comité Central, lui enlevant son immunité en tant que membre dirigeant de la direction politique du pays, préparant la voie à tous les dépassements qu'allait subir ce que Ben Bella qualifie de « chaâbaniste ». Le second acte orchestré par Ben Bella, probablement dicté par l'Égypte de Nasser, car la direction réelle du pays était entre les mains de Djamel Abdenasser, a consisté à signer deux décrets consécutifs à l'encontre du colonel, l'un le destituant de son grade et l'autre le radiant du corps de l'ANP, le mettant par là même en situation de hors la loi. A cela il faut ajouter les décrets relatifs à la confiscation des biens des «contre-révolutionnaires» visant en particulier les opposants politiques. Quant aux tribunaux révolutionnaires créés à l'effet de juger de manière expéditive les opposants politiques des wilayas historiques II, IV et VI, sur le plan politique, et à l'occasion de la fête de l'indépendance (05 juillet 1964), Ben Bella a déclaré que le colonel Chaâbani aidé par la France a fomenté une tentative criminelle sécessionniste et que les actes commis par Khider et Aït Ahmed relèvent des tribunaux militaires. Le discours de Ben Bella se trouve reproduit dans tous les journaux de l'époque, disponibles à la bibliothèque nationale sous forme d'une reliure semestrielle.

Quant aux tribunaux révolutionnaires, ils avaient pour mission de rendre des jugements expéditifs à l'encontre des opposants politiques de la wilaya II à sa tête Hassani, du FFS de Aït Ahmed et de Chaâbani de la wilaya VI. Ainsi, le nombre des prisonniers politiques était de l'ordre de 2500 (voir pages 79 à 82 de l'interview accordée par Boumediene en octobre 1966). Après avoir arrêté le colonel Chaâbani et ses compagnons, ils seront transférés à Oran, où ils seront mis dans des cachots individuels de 80 cm de large sur 180 cm de longueur; telles étaient les « villas » affectées aux opposants politiques dont parle Ben Bella à Al-Jazira. Les cachots de la prison de Sidi El Houari ont vu passer Mohamed Khobzi, ministre du Commerce « proposé par Chaâbani dans le premier gouvernement algérien, le Dr Taleb Ibrahimi, Mohamed Djeghaba ministre des Moudjahidine, Saïd Abadou, Hocine Sassi député dans le 1er Parlement, le commandant Cherif Kheireddine et d'autres cadres du FFS dont Ali Mecili. Après avoir séjourné du 08 juillet 1964 au 03 septembre 1964 dans un cachot bien décrit par le commandant Bouragaâ, le défunt colonel fut présenté devant 4 militaires subalternes en civil composant la cour martiale créée par décret présidentiel le 28 août 1964 pour ne juger que le colonel Chaâbani. A noter que les membres de cette juridiction ont été désignés avant la création de la cour martiale dont les décisions ont été sans appel et exécutoires. Telle était la dernière invention de Ben Bella pour formaliser l'assassinat politique d'un colonel.

Ainsi la parodie de procès a commencé le 02 septembre 1964 pour se terminer le 03 septembre 1964 vers 3h00 du matin : la sentence que l'on sait et l'assassinat une heure plus tard du colonel, après le refus d'utiliser son droit de grâce au profit du plus jeune colonel qu'a connu l'Algérie durant et après la guerre de libération. Le 04 septembre 1964 tous les quotidiens ont rapporté la mort du colonel Chaâbani et la grâce accordée par Ben Bella à Zenadi Mohamed assassin de feu Khemisti Mohamed, ministre des affaires étrangères. En ce qui concerne la rencontre de la mère de feu Chaâbani, celle-ci s'est déroulée en la présence de la femme de Ben Bella, du Dr Nekkache, de M. Batal, tous deux anciens ministres de Ben Bella, et durant laquelle Ben Bella a vanté les qualités morales et les compétences intellectuelles de feu Chaâbani tout en le qualifiant de Chahid (Martyr), et en nous promettant de faire une déclaration par laquelle il restituerait la vérité sur les causes véritables de ce drame. A aucun moment, la mère de feu Chaâbani n'a déclarée à Ben Bella qu'il n'était pas responsable de la mort de son fils. Comment pourrait-elle tuer une seconde fois son fils ? Le témoignage du colonel Zbiri sur ce drame est plus illustratif quant à la responsabilité de Ben Bella. D'ailleurs, ce dernier le justifie par le fait qu'il ne pouvait accorder la grâce de peur de se faire déposer par l'armée. Cependant, neuf mois plus tard, Ben Bella a été déposé par les militaires. En outre, une heure après la mort de Chaâbani, Ben Bella a pris l'avion accompagné du colonel Zbiri (chef d'état-major) pour rendre compte à son maître Nasser, lequel avait dénoncé le mouvement chaâbaniste dans le Sud algérien. La dénonciation du congrès de la Soummam par Ben Bella s'explique par le fait que Nasser d'Égypte n'a pas été informé au préalable (voir témoignage de Ben Tobbal).

Quant à l'absence de Ben Bella du congrès, elle s'explique par le fait qu'il n'a pas voulu courir le risque de répondre à ses compagnons, compte tenu du danger que cela représentait pour sa personne.


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