Algérie

Cauchemar, an VI



Juin 2002, rue Al-Moutanabi, Baghdad: un homme, un artiste, nous guidait au milieu desétals de livres où des nouveautés étaient déjà en vente sous forme dephotocopies. Il parlait encore d'avenir, notre ami. Il disait son mépris pour «Abdelhalim Hafez», manière prudente de parler de SaddamHussein, et son incompréhension totale pour les Etats-Unis qui imposaient à sonpays un embargo meurtrier.Depuis, notre ami a été «libéré» par les Américains, il avu son pays s'effondrer, il a moins d'électricité que sous l'embargo, moinsd'eau potable qu'avant. Il a échappé à la mort par miracle à plusieurs repriseset il a fini par s'exiler, comme plus deux millions d'Irakiens. De son paysd'exil, il reste branché sur l'Irak.Cinq ans après sa «libération», il a moins de mépris pourSaddam Hussein - «il est mort avec dignité» -, mais l'incompréhension à l'égarddes Etats-Unis s'est transformée en haine absolue. Notre ami, le libéral, l'amateurde poésie et de peinture, a glissé, au fil de la décomposition de son pays sousles bienfaits de la «démocratisation» par le feu, vers une religiosité plusmarquée, plus forte. Dans son exil où il a l'assurance de la vie sauve, notreami, comme des millions d'Irakiens en Irak et dans le monde, n'a aucun doute: l'invasionde son pays est un cauchemar sans fin. Plus d'un million de morts, un paysdévasté où l'on vit plus mal que sous l'embargo et où l'on ne se soigne plus.Bush restera dans l'histoire de l'Irak comme la pire descalamités: il sera celui qui aura introduit le terrorisme dans leur pays etprovoqué un chaos destructeur. Cette guerre a été le fait de la jonction ausein du pouvoir de la plus grande puissance du monde entre des illuminés, degrands pillards et des voyous politiques qui ne reculent devant aucun mensonge.Et ils en ont fait des mensonges sur les armes de destruction massive, sur lesliens présumés de Saddam et d'Al-Qaïda et sur ladémocratie. Ils ont abusé et perverti des mots comme le droit, la démocratie etla liberté pendant qu'ils légalisaient la torture à Abou Ghraïb,créaient un goulag à Guantanamo, donnaient champ libre à des armées de mercenairespour tirer les Irakiens comme des lapins. Les Etats-Unis sont devenus le cauchemar des Irakiens et notre cauchemar à tous. Ils ontfavorisé la plus formidable des régressions, ils ont donné un élan à tous lescourants antidémocratiques qui existent dans le monde arabe et islamique, qu'ilssoient au pouvoir ou non.Pour les démocrates dans le monde arabe qui ne renoncentpas aux droits de leurs pays et de leurs nations, il est évident que leuraction ne peut souffrir d'aucune proximité avec l'empire. C'est que lecauchemar irakien, qui entre dans sa sixième année, nous apporte une réponseclaire: les Etats-Unis sont un adversaire de plus dans la lutte pour ladémocratie.



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