Algérie - A la une


C'est ma vie
Au premier, regard ce fut le coup de foudre. Assia avait alors 17 ans. C'était l'année du bac, et il venait remplacer le professeur de français sorti en congé de maternité. Lui ne l'avait même pas remarquée. Elle savait qu'un jour le destin allait les réunir.Cette année-là , Assia avait mis les bouchées doubles. Elle voulait coûte que coûte décrocher son examen et entamer des études universitaires. C'est avec brio qu'elle sera admise et optera pour une licence de lettres arabes. Elle obtiendra son diplôme et choisira de faire carrière dans l'enseignement, comme son père, un ancien directeur d'école. Mais elle se rendra compte très tôt que la pédagogie n'était pas son fort. En revanche, le milieu de l'éducation l'attirait. Sans doute par nostalgie à son premier amour, se disait-elle. Elle versera alors dans l'administration. Elle était au contact des élèves mais sans les inconvénients de l'enseignement.La rentrée scolaire de cette année-là s'annonçait plutôt mouvementée. De nouveaux enseignants, des départs en retraite, des mutations, les emplois du temps à fignoler ; bref, elle avait du pain sur la planche !Le nez fourré dans sa paperasse, elle n'avait pas aperçu ce beau jeune homme aux cheveux lisses, aux yeux noisette, à la denture blanche, qui franchira le seuil de son bureau. Après un bonjour très courtois, Assia, un peu surprise par cette visite inattendue, lève la tête. Elle n'a pas eu le temps de répondre à son salut, qu'elle sentit le sang lui monter à la tête. Elle vit le prof de français. «C'est lui, je le reconnaîtrai entre mille. Mon Dieu ! Il a vraiment embelli.»Elle met de l'ordre dans ses dossiers, bafouille, face au regard intimidant de son visiteur venu s'enquérir de son emploi du temps. Elle se confond en excuses, puis de sa voix douce lui répond.- Je suis désolée, pour les enseignants de langue française, ils sont encore au tirage- Ils seront prêts quand '- D'ici mardi.- D'accord. Je repasserai.Il lui adressera un regard furtif et quittera les lieux aussi discrètement qu'à son arrivée. Il n'avait pas remarqué cette fois aussi les yeux verts pétillants de Assia, la blancheur éclatante de sa peau.«Je ne sais pas comment le dire mais j'avais l'impression que j'étais sur un nuage. Quelle coïncidence ! Par quel miracle il a été muté dans ce lycée 'C'est la volonté divine, il n'y avait pas d'autres explications.»Assia brûlait d'envie de savoir s'il était marié. Sitèt dit, sitèt fait. Elle jeta un œil sur les fiches de renseignements. Quel soulagement ! Monsieur est libre comme le vent. «J'étais étonnée par l'effet que cet homme avait sur moi, moi, connue pour ma fierté, moi, la jeune fille réservée. J'ai compris que j'étais amoureuse pour la première fois. Mais je n'allais pas pour autant lui tomber dans les bras, mais je priais pour que son cœur batte pour moi.»Dieu a répondu à ses prières, et Sofiane lui aussi tomba sous le charme de Assia. Son sourire discret, sa douce voix, la couleur de ses yeux le fascinaient. Il ne tarda pas à lui avouer son amour, et ainsi naquit une véritable idylle. Issue d'une famille d'intellectuels mais au demeurant conservatrice, Assia rencontrait Sofiane loin des regards curieux. Il lui parlera du projet de mariage, mais sa concrétisation ne se fera pas avant l'acquisition de son logement.- Je voudrais avoir tous les atouts de mon côté avant de demander ta main. J'aimerais que tu me fasses confiance, c'est ça le plus important.Assia adhérera à cette démarche. Le couple continuera à se fréquenter pendant cinq années, durant lesquelles Sofiane équipera petit à petit son appartement.- Aujourd'hui je suis prêt à rencontrer ton père.La demande officielle aura lieu et Sofiane était un bon parti. Mais le père de Assia aura cette phrase mémorable :- Je ne t'accorderai pas la main de ma fille avant que je me renseigne sur ta famille, tes origines, sur toi. Je voudrais savoir où ma fille mettra les pieds. Accorde-moi 15 jours.Sûr de lui, Sofiane n'avait peur de rien et savait qu'il réussirait à la perfection au test. Le délai tire à sa fin et Sofiane, comme prévu, reçoit un coup de téléphone du père qui lui annonce sans ambages son refus.-Nous avons appris que derrière tes apparences de gentleman se cache un homme de mauvaise réputation. Tu nous feras le plaisir de ne plus approcher notre fille. Quant à Assia elle sera dorénavant escortée jusqu'à son lieu de travail.Profitant d'une baisse de la garde, elle finira par esquiver et se rend à la librairie que tient le père de Sofiane. Son frère finira par la retrouver et fera irruption dans le magasin. Rouge de colère, il sommera violemment sa sœur de le suivre. Sofiane s'interposera. Ce qui n'a pas été du goût du chaperon. N'était la sagesse de Sofiane qui ne voulait pas répondre à la provocation par respect et amour pour Assia, une bagarre aurait éclaté. Assia, en pleurs, suivra son frère. Elle était ferme et ne comptait pas revenir sur sa décision : «J'épouserai Sofiane, avec ou sans votre consentement !» La vie sans lui n'avait aucun sens pour moi. C'était l'homme le plus gentil, le plus honnête, le plus respectueux, le plus aimant et le plus attentionné que je n'ai jamais rencontré. J'étais prête à tout pour vivre avec lui. J'ai fait une tentative de suicide, et j'ai eu droit à une semaine d'hospitalisation.Là, mes parents ont bien compris. Cette année nous fêtons notre 22e année de mariage. Notre fille est à l'université, notre fils passe le bac, nous avons construit une belle petite maison, et nous nous aimons plus qu'au premier jour.Pour mes parents, Sofiane est devenu le gendre le plus aimé. Ils ont fini par le connaître et ont compris que leur fille avait toutes les raisons de l'aimer et de s'entêter à l'épouser. Comme quoi il ne faut jamais croire les ragots. Et comme dit l'adage bien de chez nous : «Celui qui ne me connaît pas me salit.»




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