Blanchisserie générale

Le règne du président Abdelaziz Bouteflika s'apparente de plus en plus à une succession de cycles de lavage. Cela a commencé avec le début du solde de tout compte des violences de la décennie noire. Amnistie généralisée, impunité et blanchiment de l'argent du maquis pour favoriser la réinsertion des éléments armés dans la société. S'ensuivront des lois et des décrets imposés sans débat ni respect de la vérité et de la justice, pour parachever le processus de «réconciliation nationale», immense opération de recyclage des acteurs des violences, islamistes armés ou agents de l'Etat.En parallèle, la «normalisation» à marche forcée des institutions et des mécanismes de pouvoir voulait clore la parenthèse du vide institutionnel créé par le séisme de 1992. Une normalisation qui a abouti à ce formidable tour de passe-passe qui a abouti à la dissolution du DRS ? fer de lance de la guerre des années 1990 et de la gestion sécuritaire du politique ? en une entité non encore officielle. La grande lessive, la gigantesque opération de blanchiment de l'histoire, du sang et des milliards a fonctionné a plein régime.Pourquoi s'étonner aujourd'hui que Chakib Khelil, Omar Ghrib, Amar Ghoul ou autres «produits» des mandatures de Bouteflika passent par la case des ablutions publiques aussi tapageuses que scandaleuses ' Aujourd'hui, la machine à laver le sang et la prébende continue de faire des ravages dans la structuration même de nos valeurs. Pis, elle permet même de se refaire une virginité politique, brouillant complètement toute grille de lecture : comme cet conversion antifrançaise, de Khelil à Ouyahia, faisant presque oublier le lobbying pro-Paris d'un Bouchouareb qui s'en sort très bien après le scandale des Panama Papers.Un lavage à fond, donc, mais est-ce que l'effet du détergent est garanti pour une longue durée ' Peut-on vraiment laver le sang et la corruption plus blanc que blanc ' Espérons que non, sinon Bouteflika nous aura préparés à vivre dans le pire des mondes : sans justice ni vérité encore une fois, avec des faux-semblants et des impostures érigés en modèles. Quatre mandats (pour le moment) pour ce résultat.