Algérie

Article 4 de la loi du 23 février 2005



Le front du refus des historiens Interrogé à la suite de la déclaration du Premier ministre Dominique de Villepin - avant que le président Chirac ne s?exprimât à son tour - sur la reconduction de l?article 4 de la loi du 23 février 2005 par la majorité UMP de l?Assemblée nationale, l?historien Gilbert Meynier estime que « Dominique de Villepin a évidemment raison sur ce point lorsqu?il commente l?article 4 de la loi du 23 février 2005. Mais nous sommes en régime démocratique dans lequel il y a un parlement qui vote la loi. Que le Parlement ait dérapé et qu?il ait évidemment cédé à des lobbies de nostalgie colonialiste n?enlève rien à ce constat. Ceci dit, pour l?application de la loi du 23 février 2005, étant donné le peu d?empressement de l?Exécutif à en reconnaître le bien-fondé, je pense que, comme d?habitude, on ne fera rien : on attendra que les lobbies en question se calment d?eux-mêmes, mais on ne fera non plus rien pour faire appliquer vraiment la loi : c?était déjà pratiquement ce que le ministre de Robien avait déclaré il y a environ deux mois... On restera sur un entre-deux ». L?historien ajoute : « Ceci dit, je pense que mon ami Tewfik Allal, du Manifeste des Libertés, a raison quand il dit qu?il faudra se positionner sur le plan politique : par exemple en demandant à un candidat à la présidentielle et aux candidats aux législatives s?ils sont d?accord pour revenir sur la loi, du moins sur son article le plus scandaleux : l?article 4 ». Pour Benjamin Stora, « le Premier ministre a enfin réagi, un peu tardivement, mais l?essentiel est la réaffirmation d?un principe essentiel : c?est aux historiens de travailler, d?écrire l?histoire, et pas à l?Etat. Il reste qu?il faudra être vigilant sur la mise en place de cette commission pour une Fondation de la mémoire ». « J?ai été personnellement écarté de tous les comités scientifiques pour la construction de musées dans le sud de la France, sous la pression d?organisations de harkis et de rapatriés », souligne Benjamin Stora. Olivier Le Cour Grand Maison estime quant à lui que « le Premier ministre vient, visiblement, de faire une grande découverte ou d?être touché par la grâce, peut-être les deux à la fois, en affirmant, contre la majorité et le parti qui le soutiennent, et contre le gouvernement de Jean-Pierre Raffarin auquel il appartenait, que le "Parlement n?a pas à écrire l?histoire". Mieux vaut tard que jamais. Mais que faisait donc Dominique de Villepin lorsque la loi du 23 février 2005 était en préparation et qu?elle fut votée à l?Assemblée nationale ? Où était-il le 29 novembre dernier lorsque l?opposition parlementaire a tenté, après de nombreux mois de silence et d?atermoiements, de faire abroger l?article le plus scandaleux de cette loi scélérate ? Comment se fait-il que le gouvernement qu?il dirige et lui-même, personnellement, n?aient rien fait en cette occasion pour supprimer les dispositions incriminées, ineptes juridiquement et fort nuisibles politiquement à l?intérieur comme à l?extérieur du pays ? Si gouverner, c?est prévoir, alors force est de constater que sur ce sujet le Premier ministre gouverne visiblement assez peu et prévoit moins encore. Il ne fallait pas être grand clerc, en effet, pour se douter qu?en se prononçant à deux reprises sur le caractère positif de la colonisation, sa majorité, aveuglée par ses passions idéologiques, ne pouvait que contribuer à envenimer encore un peu plus la situation. Face à une mobilisation grandissante en France et dans les départements d?outre-mer, après le désaveu cinglant adressé à son ministre de l?Intérieur par les manifestants de Martinique, le Premier ministre essaie de trouver une issue. Fort bien, mais la voie pour le moment choisie semble passablement contournée. Qu?il tire donc la conclusion pratique du tardif constat qu?il vient de faire en prenant les mesures nécessaires à l?abrogation de toutes les dispositions faisant référence au caractère "positif" de la colonisation. C?est à l?aune de ces résultats attendus qu?il sera jugé, lui, son gouvernement et sa majorité par tous ceux qui se sont légitimement opposés à cette loi qui conjugue l?ignorance de l?histoire, la cécité partisane, la défense d?intérêts particuliers et le mépris des innombrables victimes de la domination coloniale de la France ».



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