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Algérie - Contribution: L’environnement en Algérie, entre volonté politique et réalité du terrain



Algérie - Contribution: L’environnement en Algérie, entre volonté politique et réalité du terrain


L’histoire de l’environnement a pour but d’étudier les interactions entre l’homme et son environnement sous le prisme de la durée. Cette approche chronologique de la question environnementale permet ainsi de développer une vision non seulement plus objective mais aussi plus large d’un sujet qui s’avère être un des thèmes civilisationnels incontournables du XXIe siècle.

En jetant un tel regard sur l’évolution de la politique environnementale en Algérie, il est très aisé d’arriver à la conclusion que nous sommes arrivés à un tournant décisif de notre histoire écologique.

Elle nous oblige à passer à un rythme de consommation plus responsable ainsi qu’à une gestion et exploitation de nos ressources plus soutenable. Après, dès les premières heures de son indépendance, elle s’est jetée à corps perdu dans une phase de modernisation industrielle qui, force est de le constater, a produit bien plus d’impacts environnementaux négatifs collatéraux que les résultats économiques escomptés par leurs instigateurs.

L’Algérie d’aujourd’hui, mais aussi celle de demain, se trouve confrontée à la contingence absolue car il est vitale d’opérer une phase de profonde transition environnementale et économique. Les enjeux et les défis qui se présentent à notre nation, de même que la nature et l’étendue des problèmes environnementaux rencontrés, montrent clairement que la dégradation écologique du pays a atteint un niveau de gravité très préoccupant. C’est une réalité qui risque non seulement de compromettre une bonne partie de nos acquis économiques et sociaux, mais également de limiter les perspectives de bien-être des générations futures.

Dans notre pays, la prise de conscience des problèmes environnementaux a été lente et progressive. Aujourd’hui, la révision constitutionnelle semble engagée à faire de l’environnement et du développement durable des valeurs fondatrices.

Reste à mettre en place une stratégie nationale inclusive, avec une vision et une stratégie claire, notamment grâce à un cadre institutionnel innovant qui encadre la gestion environnementale et le développement durable dans toutes ses dimensions, c’est-à-dire sociale, économique et culturelle.

Plusieurs institutions ont été mises en place durant ces trente dernières années avec la même volonté de rendre plus opérationnelles les bonnes idées ainsi que les bonnes intentions. Leur domaine d’action était cependant largement fondé sur des préoccupations étroites et compartimentées, ce qui en a limité considérablement l’efficience.

Le cadre législatif est lui aussi insuffisant. L’Algérie a certes élaboré une loi cadre pour l’environnement (5 février 1983), cependant, son application a été retardée du fait de procédures excessives et d’insuffisances au niveau même de sa conception. C’est une problématique qui touche également d’autres lois, comme la loi de gestion des déchets n° 01-19 du 12 décembre 2001 et qui ne répond plus aux besoins ni aux attentes d’un secteur à fort potentiel économique, qui plus est en plein développement et qu’il faudra revoir certainement.

A partir de 1995, la création de la Direction générale de l’environnement et des inspections de l’environnement au niveau des différents départements du pays était surtout destinée à densifier l’architecture institutionnelle autant qu’à améliorer les capacités de surveillance et de contrôle de l’état de l’environnement.

De même, la création du Haut conseil de l’environnement et au développement durable (HCEDD) aurait dû permettre la mise en place d’une démarche globale et intégrée. Ainsi, malgré l’existence de multiples institutions, les capacités de ces dernières sont restées limitées à différents domaines beaucoup trop théoriques et pas assez opérationnels: formulation de stratégies, coordination, études et recherches, contrôle et études d’impact. Sur le terrain, donc le HCEDD n’a pas été à la hauteur de la réelle efficacité requise pour accomplir totalement ses prérogatives. Au niveau décentralisé, la gestion environnementale municipale s’est avérée également très insuffisante.

Un vaste programme de renforcement institutionnel et juridique est nécessaire pour permettre au service public la gestion des ordures ménagères, en application directe des notions du développement durable, un thème fort de politique municipale. Pour réussir sa modernisation, il faut que tous les élus se réapproprient les éléments de la problématique «déchets» et pensent d’abord à réduire, réutiliser, recycler et,seulement ensuite, à éliminer. Ajoutons à cet état des lieux objectif le constat qu’aucune stratégie de gestion des déchets toxiques et dangereux n’a été mise en place jusqu’à ce jour par les institutions concernées.

La fiscalité environnementale, basée sur le principe du «pollueur payeur» a été introduite dans la loi de finances 2002 et touche essentiellement les acteurs économiques publics et privés. Elle devrait s’élargir et toucher toute personne ou entité morale qui pollue; et cela avec des modalités de recouvrement innovantes et simples au service d’une économie résiliente et circulaire qui met l’environnement au centre de ces intérêt et qui ne sera ainsi que plus forte. Cela dit reste à définir ces termes avec une stratégie nationale consensuelle, que l’on souhaite réalisable grâce au futur Conseil national économique, social et environnemental.

Il faudra s’ouvrir tout autant au potentiel de la coopération internationale au service de l’environnement et du développement durable. Si le développement des pays «pauvres» est pour partie tributaire de celui des pays riches, la survie de la biosphère se trouve, pour une large part, entre les mains des pays en développement. Face à des menaces communes et à des responsabilités partagées mais différenciées, l’Algérie est appelée à coopérer et à fonder une alliance nouvelle, continentale et internationale.

On peut espérer un passage fécond d’une interdépendance aux hydrocarbures vers un développement des énergies renouvelables notamment le solaire algérien qui, espérons-le, sera au cœur du futur développement africain.



* Par Besma Belbedjaoui
Spécialiste des questions de l’environnement et de la gestion des déchets



Bio-express (*)

Besma Belbedjaoui (photo) est spécialiste des questions de l’environnement et de la gestion des déchets. Elle dispose de dix années d’expérience auprès des entreprises de recyclage et fondatrice de Plasticycle Algérie. Son expertise couvre une large gamme de sujets tels que le recyclage et gestion des déchets, l’économie circulaire, procédés de traitement industriel, la méthanisation, l’éducation environnementale et le coaching auprès des associations. Biologiste, elle est titulaire d’une maîtrise en gestion des déchets et procédés de traitements.


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