Algérie

Aïn Témouchent : La fraternisation sera-t-elle au bout d?un derby ?




La mémoire de ses habitants n?a pas oublié que ce qu?elle appelait, elle, le douar Moulay Mustapha éponyme du premier doyen de la djemaâ du lieu, était celui de l?exclusion économique et sociale. Ce vendredi, l?actualité ne sera pas politique dans la ville de Sidi Saïd, à moins d?un imprévu de la campagne électorale. L?événement qui s?y déroulera dépassera de loin son cadre sportif. En effet, il mettra aux prises pour la première fois de l?histoire de la cité, le CRT et Zidoria ou Zidoria et le CRT selon ce que l?on préfère. Le CRT est emblématique de la ville du côté de ce qui a été la ville coloniale selon les supporters de Zidoria, Zidoria qui, elle, est depuis 1948 le porte-drapeau de Graba, son antithèse. Du plus humble citoyen à l?autorité locale, on s?inquiète que le derby ne dégénère en duel. Le CRT n?est plus qu?un locataire déchu de la régionale au même titre que Zidoria même s?il a de forte chance de s?en hisser et que Zidoria espère faire de même. En 1984, Zidoria fut contrainte de devenir le CRT/ B et de perdre son identité par un simple trait d?une nouvelle réglementation sportive qui n?avait cure de toute symbolique. Il fallut attendre 2001 pour que les Jaunes et Noirs de Zidoria se démarquent des Rouges et Blancs du CRT et reprennent leur dénomination à la suite d?une nouvelle réglementation. Mais le contentieux est lourd, lesté d?un long passé où Graba était dénommé officiellement « village nègre » avec tout ce que cela insinuait d?opprobre et de mépris, une dénomination que la colonisation, à la veille de fêter son centenaire, en 1930, transformera pudiquement par « village musulman ». Cependant, la mémoire de ses habitants n?a pas oublié que ce qu?elle appelait, elle, le douar Moulay Mustapha éponyme du premier doyen de la djemaâ du lieu, était celui de l?exclusion économique et sociale. En 1956, lorsque la guerre pris ses quartiers à travers le Témouchentois, fuyant les exactions de l?armée d?occupation, des ruraux sont venus s?ajouter à sa population originelle, une population de gens venus notamment du Maroc oriental. Prix du sang Ils constitueront une communauté de destin, les « immigrants » ayant, durant la lutte de libération, payés du prix du sang et du sacrifice leur algérianité. Il n?en demeure que jusqu?à aujourd?hui des démagogues de tous bords mettent en doute son patriotisme et son algérianité, un reproche qui ressort particulièrement à chaque échéance électorale pour stipendier ceux de cette communauté qui s?aventurent à briguer un mandat électoral. Bien longtemps après l?indépendance, Graba est demeuré le refuge du même lumpenprolétariat qui l?occupait mais également de tous les exclus du développement. Fort heureusement, ces dernières années, devenu Haï Moulaya Mustapha, il s?est soustrait de son statut de ghetto alors que sociologiquement, sa population a grandement changé. C?est que depuis, le vaste no man?s land qui séparait Graba et qui le cachait de la vue de la ville anciennement coloniale, a disparu. Là où s?étalaient des champs de vignes, d?oliviers et de céréales, il s?est édifié l?équivalent d?une nouvelle ville. Ce qui fut Graba s?est trouvé enserré dans un important tissu urbain alors que des pans entiers de ses misérables haouchs ont été récemment rasés pour laisser place à de nouvelles habitations. Mais, la blessure originelle ne s?est pourtant pas effacée. Kouider Benmechta, l?entraîneur de Zidoria, espère fort que les perturbateurs n?auront pas raison de la fête du sport et de la fraternité. Sera-t-il entendu ?

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