Algérie - A la une

Afrique du Sud
Le vice-président sud-africain Cyril Ramaphosa a appelé dimanche à la création d'une commission judiciaire indépendante chargée d'enquêter minutieusement sur toutes les allégations de "capture de l'Etat"."Ce n'est qu'avec une telle commission que nous pourrons déterminer dans quelle mesure les institutions de notre Etat ont été utilisées de manière inappropriée - et illégalement - pour l'enrichissent de quelques individus et familles", a déclaré M. Ramaphosa lors d'une conférence dans le centre minier du platine De Rustenburg, province du Nord-Ouest. Il faisait notamment référence aux allégations sur la dite "affaire Gupta", dans laquelle la riche famille d'origine indienne Gupta aurait exercé une influence indue sur le président sud-africain Jacob Zuma dans les nominations des ministres et des P-DG des entreprises d'Etat. Le président Zuma et les Guptas ont tous démenti ces allégations. L'an dernier, l'ombudsman d'Afrique du Sud a recommandé l'établissement d'une commission judiciaire pour enquêter sur la prétendue "capture de l'Etat". Une commission judiciaire indépendante aiderait à trouver le fond de ces rumeurs, des rapports et des allégations, a déclaré M. Ramaphosa. "Nous devons agir pour arrêter toutes les formes de capture, de corruption et de copinage", a-t-il souligné.Dans le cadre de ces efforts, le projet de loi sur la réforme du Centre de renseignements financiers (FICA) doit maintenant être mis en ?uvre activement, notamment en ce qui concerne les soi-disant "personnes politiquement exposées", afin de garantir qu'il n'y ait pas d'espace pour une activité financière illicite, a déclaré M. Ramaphosa.Le projet de loi vise à renforcer encore la transparence et l'intégrité du système financier sud-africain dans ses objectifs de lutte contre les crimes financiers, notamment l'évasion fiscale, le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme et des flux financiers illicites.M. Ramaphosa a également déclaré que le Congrès national africain (ANC, parti au pouvoir) devrait lutter contre la corruption et l'enrichissement personnel illégal. Il a prévenu que l'Afrique du Sud risque de devenir une mafia."Si nous voulons contrer cette grave menace, si l'ANC doit retrouver son rôle de leader dans la société, il est absolument impératif que nous agissions avec urgence et un but", a-t-il déclaré.L'ANC, a-t-il ajouté, doit mettre en place des audits de style de vie de tous ceux qui sont dans les structures de leadership. Les soldats oubliés de l'apartheidMaisons pillées, magasin éventré, hôpital abandonné: l'ancienne base militaire de Pomfret ressemble à une zone de guerre. Des soldats angolais y vivent toujours, oubliés de l'Afrique du Sud pour laquelle ils ont combattu sous le régime de l'apartheid.Dans le désert du Kalahari, le soleil de l'été austral brûle le goudron défoncé de la rue principale. Seul le passage de rares habitants qui échangent quelques mots en langue portugaise vient rompre la torpeur de ce village devenu fantôme.L'électricité est coupée et l'eau n'y coule plus mais Pomfret compte encore 3.000 habitants. L'Angolais Jose Lourenco, 69 ans, est l'un d'eux. Dans les années 1980, il a combattu en Angola contre son propre pays pour le compte de l'armée sud-africaine, au sein du Bataillon 32, une unité engagée en première ligne du combat de l'Afrique du Sud contre ses voisins. "On n'avait peur de personne, on était le meilleur bataillon du monde", assure-t-il, assis dans la cour de sa petite maison, l'une des rares encore debout à Pomfret.A l'époque, Nelson Mandela est détenu à Robben Island, le régime raciste blanc est encore solidement installé au pouvoir à Pretoria et son armée utilise des mercenaires angolais pour combattre le régime marxiste ennemi de Luanda."Il n'y avait pas d'apartheid au +32+. Là où les Blancs buvaient, on buvait. Là où les Blancs dormaient, on dormait", explique Jose Lourenco en montrant un insigne à l'effigie du buffle, le symbole de son unité, sur le mur de sa cuisine. Démobilisation"On donnait aux Angolais de la nourriture, de l'argent, des vêtements et un avenir. En échange, ils nous apportaient leur connaissance du terrain", se souvient avec son accent afrikaans rocailleux le général Gert Nel, ancien chef du bataillon. "C'était une situation gagnant-gagnant".A la fin de la Guerre froide, le conflit entre les deux voisins cesse. L'Afrique du Sud promet à ses recrues angolaises de les incorporer dans son armée.Leurs premières années à Pomfret sont plutôt douces. "Ici, c'était le club où les gradés organisaient leurs soirées. Il y avait même une salle de bal", montre Makamba Tchimoco, fils d'un ancien combattant, devant un complexe aujourd'hui en ruines. Mais dès la chute de l'apartheid, les soldats du "32" déchantent. En 1993, le bataillon est démantelé et nombre de ses soldats quittent Pomfret. Beaucoup d'Angolais préfèrent abandonner l'uniforme en échange d'un pécule de 30.000 euros. Petit à petit, leurs familles sont relogées dans d'autres parties du pays et la base de Pomfret tombe lentement en désuétude. Promesses et bras de ferDans les années 2000, le gouvernement du Congrès national africain (ANC) annonce son intention de la fermer définitivement et d'en déplacer les habitants. Mais un noyau dur refuse de partir. "On est arrivés ici avec beaucoup de promesses. Puis le nouveau gouvernement a voulu qu'on parte et nous a laissé tomber. Pourquoi devrait-on partir de chez nous'", s'insurge M. Lourenco. Le bras de fer s'engage alors avec les autorités.La police quitte le village, les maisons sont pillées, l'hôpital saccagé, le cimetière militaire envahi par les hautes herbes. L'eau ne coule plus qu'une fois par semaine aux robinets. Et en 2014, c'est le coup de grâce: l'électricité est coupée."La difficulté pour Pomfret, c'est que la première ville est à 200 km. Il n'y a aucune infrastructure, pas d'eau, pas d'électricité, tout ça dans le Kalahari, et il n'y a aucune économie", regrette un ancien soldat sud-africain du "32", qui préfère rester anonyme.Seule une école fonctionne encore et permet aux enfants d'étudier jusqu'au niveau du bac. "Combien de temps vont-ils pouvoir rester là-bas'", s'inquiète un autre retraité afrikaner du "32" qui refuse de donner son nom.Lui juge toutefois ses frères d'armes angolais largement responsables de leur situation. "L'argent qu'ils ont reçu aurait dû leur permettre d'acheter des maisons et de partir", dit-il, "c'est leur responsabilité, pas celle du gouvernement". PunitionChez Jose Lourenco, le temps s'est arrêté. Il vit dans la nostalgie d'un passé perdu, tiraillé entre son pays, où il reste considéré comme un traître, et une nouvelle Afrique du Sud bien différente de celle pour laquelle il s'est battu. "Le gouvernement doit nous dire ce qu'on a fait de mal", s'emporte l'ancien militaire. "Pourquoi ils nous punissent comme ça' Qu'ils viennent nous dire la vérité!""Je suis né en Angola. Mon coeur a envie de retourner là-bas, mais je me suis battu contre mon pays donc je ne peux pas", regrette t-il."Les Angolais disent qu'on les a tués, l'ANC pense qu'on a tué leurs combattants à l'époque. Qu'est ce qu'on peut faire '", s'interroge Alexander Joaquim, un ex-sergent de 74 ans.Dans Pomfret privé de tout ou presque, les journées sont longues."Il me manque plein de choses ici, je ne peux même pas faire mes devoirs quand la nuit tombe. Rester, c'est inutile. Après le bac, je devrai partir", soupire Antonio Isaac, 18 ans, né à Pomfret.Malgré ces conditions de vie déplorables, certains s'accrochent encore à ce village peut-être en ruines, mais gardien de tant de leurs souvenirs. "On ne veut pas partir car c'est ici que se trouve l'histoire de nos pères", conclut Makamba Tchimoco.
Votre commentaire s'affichera sur cette page après validation par l'administrateur.
Ceci n'est en aucun cas un formulaire à l'adresse du sujet évoqué,
mais juste un espace d'opinion et d'échange d'idées dans le respect.
Nom & prénom
email : *
Ville *
Pays : *
Profession :
Message : *
(Les champs * sont obligatores)