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Abandonné, Abdenour Berkani ne regrette rien



Abandonné, Abdenour Berkani ne regrette rien
Dans son émission «Addal+ Sport», Berbère TV, animée par Lounis Temzi, consacre une émission sur l'itinéraire d'Abdenour Berkani. Cet ancien gardien de but de la JS Kabylie dans les années 1963.Né en 1947 à Tizi Ouzou, l'enfant d'Azzouza a marqué en lettres d'or son nom sur les tablettes du club phare du Djurdjura, Il faisait partie de la génération qui a fait accéder la JSK en division I. Un bel hommage, après celui de notre confrère de La Dépêche de Kabylie, en septembre 2009. Larmes aux yeux, il s'exprimait difficilement. Il imaginait encore tenir dans ses bras ce ballon qui a caractérisé son histoire au sein d'un club, un des meilleurs du pays. Ceux qui ont croisé sa rigueur sur les terrains de football, ne peuvent pas imaginer que derrière cette rude façade se cache un être tendre, et incroyablement dévoué. Son histoire est une histoire qu'il tient dans ses bras comme ce ballon qu'il a tend chéri. Le voilà, depuis son retrait carrément abandonné, lâché par ses siens. Le livre de Berkani Abdenour visité par «Berbère tv», raconte sa vie footballistique et son passé dans la famille de la JSK. Aucun adjectif n'est assez fort pour résumer le talent de cet homme qui a porté l'équipe sur son dos pendant des années. Une carrière qui lui a d'ailleurs valu d'être élu parmi les meilleurs gardiens. Dès son plus jeune âge, il passa l'intégralité de son temps libre à jouer au football avec d'autres jeunes du quartier, mais il ne commence pas à jouer au poste de gardien de but. Pour lui, les postes ne le dérangeaient pas pour autant, puisqu'il est issu d'une famille composée de frères gardiens de but. Chacun enseignait à l'autre ses expériences. Il adorait distribuer le jeu et, dès qu'il le pouvait, il se projetait vers l'avant. A la question de savoir comment se porte-t-il, soudée par une autre question, nombreux sont ceux qui ne te connaissent pas aujourd'hui, Abdenour dira, d'une voix étouffée, «je suis malade, très peu de personnes se rappellent de moi... Mais bon. Ainsi est faite la vie.» Dites-nous comment êtes-vous venu à la JSK ' «Ce fut un rêve, j'ai voulu jouer avec cette grande équipe, parce que vous savez jouer avec un tel club, c'est être parmi les grandes figures du foot... J'ai fait toutes les catégories, minimes, cadets, juniors puis premières. J'ai été intégré en 1963. Je me rappelle, on jouait avec plaisir, sans aucun intérêt, on ne bénéficiait de rien, le plaisir de jouer était largement bien payé. Je me souviens qu'on jouait dans plusieurs postes, mais le destin a voulu que je fasse ma carrière comme gardien de but, car à l'époque, mon défunt grand frère était gardien de but, et j'étais influencé par les dirigeants de l'époque lesquels m'ont proposé ce poste, bien entendu je n'ai pas hésité un seul instant à accepter. Je me souviens que mon premier titre avec ce club était en cadet, à l'époque, on avait remporté la Coupe d'Algérie face au Mouloudia d'Alger au stade du 20-Août. La JSK n'avait pas les moyens, comme c'est le cas aujourd'hui... quelques opérateurs accompagnaient le club, mais ce n'était pas énorme». Et les entraînements ' «La journée c'était le boulot, le soir les entraînements. Un plaisir de se retrouver en amis, à travailler les techniques, à penser déjà au prochain match. Il y avait une ambiance extraordinaire, c'était une famille, une grande famille. Avec tout ça, on jouait gratuitement, pas un sou de la part de la JSK... On ne percevrait aucun centime. Notre souci était de réussir, faire monter cette équipe parmi les grands clubs. Je vous disais que c'était la grande famille, on parlait tous kabyle, donc le problème de langue ne se posait pas. En 70, il y avait comme gardien de buts mon ami Ali Belahcène, on était jaloux, mais on apprenait beaucoup de lui». L'accession : «C'était grâce aux supporters. Ils étaient de tout temps au stade, c'était notre oxygène, on se respectait mutuellement, on jouait avec le c?ur, à chaque match, on jouait la peur au ventre, non parce qu'on craignait nos adversaires, mais plutôt pour ne pas décevoir nos supporters car on jouait pour eux et pour les couleurs du club. Il nous arrivait même de ne pas sortir après la défaite, car on avait honte de croiser le regard de nos supporters qui, faut-il le souligner, étaient souvent avec nous. Il n'y avait pas de barrière entre les joueurs et les supporters. On se parlait souvent dans la rue, et après le match, on allait vers eux, on discutait, on prenait des cafés en ville... Aujourd'hui ' Aujourd'hui, le monde a changé, l'intérêt prime avant tout. Il y a des sommes faramineuses qui circulent et avec cette richesse le niveau reste moyen». Vous êtes en retraite aujourd'hui ' «Oui, après avoir tant donné, je ne gagne que 10100 DA par mois. Je suis logé chez mon oncle qui a mis à ma disposition 2 pièces et c'est avec cette modeste somme que je nourris mes enfants. Depuis 1989, j'attends un logement, j'espère que la wilaya va m'entendre pour que je puisse réunir mes enfants dispersés aujourd'hui, par faute de l'absence de logement». Des recours ' «Oui j'en ai fait, mais normalement c'est au président de la JSK de m'aider auprès des autorités locales pour m'attribuer un logement, mais je n'irai pas le lui demander. Aujourd'hui je reste un fervent supporter de la JSK. J'avais 25 ans, lorsque j'ai arrêté de jouer. Je ne regrette pas avoir joué pour les couleurs de notre équipe, mais que ses dirigeants auraient dû, à la limite, penser à ceux qui ont bâti cette JSK, à ceux qui ont tant donné pour elle. Lorsque je circule en ville, personne ne me reconnaît, mais à Larba Nait Irathène c'est le contraire, je remercie la population de cette région qui souhaiterait organiser un jubilé en mon honneur, j'ai dit non. C'est à la JSK de le faire. Je ne regrette pas avoir tout donné». Lounis, l'interviewer, lui demanda de raconter une anecdote «on jouait face au Mouloudia d'Alger, c'était au stade du 20-Août-55 pour le compte du huitième de finale de la Coupe d'Algérie. Zoubir Bachi, défonça ma cage après trois minutes de jeu. Sept minutes après, on égalisa grâce à l'erreur de Cheikh, contre son camp. De retour des vestiaires, 10' à peine, on inscrit le deuxième but grâce à Djebbar. Je me rappelle qu'il restait quelques minutes de jeu lorsque Rezki Kouffi, seul face à Kaoua donna la victoire à la JSK. On pensait alors que c'était la bonne. Mais le Mouloudia parvient à égaliser durant le temps additionnel par l'intermédiaire de Zoubir Bachi. C'était un tir puissant que je n'avais pas réussi à capter, j'ai lâché la balle sur la ligne... L'arbitre Settaoui valide le but à la grande joie des Mouloudéens, lesquels se qualifient aux quarts de finale suite aux tirs de corners 6 à 3.» La JSK d'aujourd'hui ' «C'est des joueurs qui pèsent lourd. Un milliard, alors que nous en cette période on percevait 800 DA par mois. La JSK peut m'aider». Le mot de la fin. Demain si je meure je n'ai même pas un espace à moi, où ils vont m'allonger, si ce n'est le sol de mon oncle. Un exemple de fidélité envers un club et un public qui ne l'oublient pas. C'est entre larmes et émotion qu'il évoque un passé glorieux après avoir quitté le rectangle vert sous les vivats de la foule qui sait qu'elle vient de vivre un moment unique. Il quitta le devant de la scène et plus rien ne sera comme avant. Difficile de quitter le monde du football quand on l'a tant marqué de son empreinte. Il a su rebondir pour devenir cette icône gravée dans la tête des anciens comme de la nouvelle génération.
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