Algérie - Revue de Presse

8es journées du film européen Une clôture en beauté!



8es journées du film européen Une clôture en beauté!
Publié le 02.03.2024 dans le Quotidien l’Expression

La cinémathèque d’Alger a abrité jeudi soir le dernier film entrant dans le programme des huitièmes journées du film européen et quel film! « Triangle of sadness », la Palme d’or de 2022...

Un film signé par le réalisateur de «Tthe square» (encore une Palme d'or au festival de Cannes en 2017), Ruben Oslund qui,? cette fois, s'attaque aux luttes des classe dans un long métrage des plus savoureux, bien qu'il parait frivole en apparence. Mais ça c'est juste en ouverture. Un film qui dit beaucoup de choses pour une fois et sans langue de bois et par-dessus le marché en évitant de tomber dans le patos moralisateur. Du génie en somme! Un cinéaste qui ose dénoncer dans une mise en scène des plus truculentes les travers du capitalisme et ses limites en mettant en lumière tout ce qu'il charrie en lui de travers ou comment le pouvoir de l'argent parvient à sentir «la merde» au final, dans une superbe cacophonie, quasi festive, déclinée dans une jolie métaphore cinématographique usant d'un scénario à haute voltige. Tout commence d'abord par un casting ridicule d'hommes pour un défilé de mode. Carl en fait partie. En dinant avec sa petite amie Yaya, mannequin elle aussi, le réalisateur place d'un coup la problématique de la question d'égalité... des sexes. Pourquoi l'homme doit- il toujours payer la note à la femme? Et de questionner ici le concept du féminisme. Le réalisateur bat encore ses cartes en faisant d'un bateau de croisière le symbole de la hiérarchie qui prévaut entre les classes sociales. En effet, après la fashion week Carl et Yaya se voient embarquer dans une croisière de luxe à bord d'un yacht offert à ladite jeune influenceuse. Tandis que l'équipage est aux petits soins avec les vacanciers, le capitaine qui semble faire une dépression, reste enfermé dans sa cabine alors que le fameux diner de gala approche. Mais tout ne se passe pas comme prévu quand une tempête arrive et se met à bousculer la quiétude de ces milliardaires qui se mettent tous à vomir à cause du mal de mer...le yacht fini par exploser et il en restera que quelques rescapés sur une ile...
Quand le cinéma fait sens
Renversement de situation et de statut social pour la responsable de nettoyage des toilettes qui affirme être ici le commandant et parvient à mettre tout le monde à ses bottes y compris les hommes et casser ainsi le système de «patriarcat» traditionnel....Tout le monde doit se partager les tâches. Mais y arrive- t -on vraiment? Film marxiste (?) en tout cas en apparence puisqu'il plaide d'emblée pour l'égalité entre les hommes, «Triangle of sadness», son titre décline une série de situations des plus cocasses les unes des autres où l'absurde prime sur le réel. Le réalisateur prend un malin plaisir à pousser parfois le bouchon en mettant en scène des plans qui frisent le chaos quand l'équilibre tranquille des riches vient à être sévèrement bouleversés». Triangle of sadness» ou «sans Filtre» en français renvoie en fait dans le sens littéral au «pli d'amertume» qui se crée parfois sur le front, notamment quand on fait une grimace. Celui que certains parviennent ainsi à supprimer à coup de botox en faisant croire au naturel des choses... À ce monde superficiel qui «pue le fric» le réalisateur vient y mettre un terme en grossissant ainsi le trait de ces hommes et femmes qui finissent au final tous égaux devant..la souffrance puis la mort. Le film se veut intelligent car il fait glisser de nombreuses expressions liées à certains leaders politiques du monde occidental et d'autres de philosophes célèbres tels Marx... «Sans filtre» est un film qui fait sens car il dit les choses tout en dévoilant des scènes des plus incongrues de la vie ordinaire. Parmi elles, celle de cette influenceuse qui fait semblant de manger des pattes tout en se prenant en photo devant son assiette alors qu'elle se dit être allergique au gluten.
Faux semblant
En somme un mode factice basé sur le pouvoir de l'image et de l'argent qui finit par se briser comme un château de carte, encore plus quand le bateau coule et que les survivants, constitués de deux riches milliardaires, deux mannequins, un machiniste et une femme de ménage doivent cohabiter ensemble. C'est d'ailleurs cette dernière qui prend les commandes et devient la chef de cette tribu....Une situation confortable qui semble l'arranger. Voudra t-elle être sauvée à la fin? C'est ce que vous découvrirez en regardant ce film éclatant de vérité, qui éclabousse tout sur son passage. Et ça ne sent pas toujours la rose! Une Palme d'or bien méritée en tout cas. Un autre très beau film, projeté, la veille, à la cinémathèque en présence de ses concepteurs qui ont animé précédemment une master class, est «La vie facile» des frères Orso et Peter Miyakawa. Le film fait se rencontrer une jeune femme qui fait passer des médicaments en contrebande le long de la frontière italienne avec la France et un américain professeur de tennis bizarre qui s'adonne à son autre passion, la véritable en fait, la peinture. Camilla a un jeune frère de 14 ans appelé Brando. L'américain qui a quitté Miami pour venir s'installer en Italie s'appelle Don, diminutif de Donald. Tout les quatre vont essayer d'aider un migrant appelé Elvis à traverser clandestinement la frontière...Vont-il y arriver? Le film donne à voir surtout l'évolution des rapports humains entre ces quatre individus et leur début d'attachement. Un film qui s'attaque aux faux -semblants tout en jouant sur le choix des noms qui n'est pas fortuit, mais sans que cela ait une véritable connotation politique. Le film basé sur l'humour est une comédie qui laisse deviner la complexité des sentiments et le comportement des gens dans la vie. Un film attachant d'autant qu'il permet de révéler ainsi le véritable visage de chaque individu, à l'instar de Don qui parait un tombeur de charme crapuleux au départ mais qui s'avère être un artiste paumé qui déprime tout le temps jusqu'à ce qu'il tombe réellement amoureux de Cami....Un film qui fait du bien tout en abordant justement ce désir de faire du bien quand on arrive à s'unir en vivant ensemble en harmonie, cassant ainsi les préjugés que l'on peut avoir sur l'un et l'autre et au final vaincre ses démons. Un film sur qui l'on est vraiment et à quoi on aspire à être?...

Des films drôles, mais tendres et émouvants
C'est un peu le cas, dans le film portugais «O pai Titano», une comédie qui entend, avec subtilité théâtrale, à mettre nu ce que signifie être portugais- aussi bien en 1940 qu'en 2021. Ce remake raconte en fait l'histoire d'une compagnie de théâtre, d'hommes et de femmes amoureux, d'erreurs et de malentendu. Ce remake du film de 1940 donne une nouvelle version de l'intrigue pleine d'humour, de prévisions futuristes, d'images de Lisbonnne et du Portugal de l'époque et d'aujourd'hui. Le film fait le va et vient entre les deux époques en insérant des images en noir et blanc. Il donne aussi à voir comment sont les relations entre les hommes et les femmes et l'époque, tout en évoquant le désir émancipation de la femme qui veut accéder à la modernité, avec comme trame une histoire vraie tournée sur fond de pièce de théâtre où l'amoureux fait croire à son amoureuse que son père est un tyran et qu'il refuse qu'il épouse la jeune femme... Un film rehaussé d'une belle mise en scène avec des décors et des costumes d'époque bien recherchés. Ou comment la vie devient elle-même le théâtre d'un drame et de joie à la fois...D'autres films des plus touchants ont également ému le public venu, en force, à la cinémathèque d'Alger. On citera notamment le film espagnol «Loli Tormenta» où comment une vieille dame atteinte de la maladie d'Alzheimer va être aidée par des enfants en tentant de surmonter un tas d'obstacles... «Mon grand-père est un extraterrestre» est un film, croate, plein de fantaisie et de poésie qui a permis au public de s'évader le temps d'une projection bien tendre et émouvante. Le cinéma était aussi au coeur de la comédie française, «Le livre des solutions» de Michel Gondry. Un film sur un réalisateur obsessionnel et tourmenté à la fois qui a un million d'idées qui le plongent dans un chaos indescriptible, jusqu'à se lancer dans l'écriture du «Livre des Solutions», un guide de conseils pratiques qui pourrait bien être la solution à tous ses problèmes. Un film dit -on autobiographique qui met en scène l'acteur Pierre Niney dans un rôle chauffé, à cent à l'heure où l'on ne peut s'ennuyer une seconde. Une comédie quasi burlesque en autodérision, sur le 7eme art, du moins sur un personnages inspiré sans doute du vécu..Le film allemand «The Ordinaries» a été quant à lui une belle révélation pour le public cinéphile car il remet en cause l'existence même de l'art du septième art et son rôle dans le monde. Il est plus que ça, il interroge d'un point de vue formel, intrinsèque le rôle de chacun dans cette machine qu'est l'industrie du cinéma et plus largement, dans la vie. En effet, dans une société répressive à trois classes, Paula, un simple personnage secondaire est sur le point de faire face à l'épreuve la plus importante de sa vie: Elle doit prouver qu'elle mérite d'être un personnage principal. Elle est première de sa classe à l'école des personnages principaux, mais jusqu'à présent, elle n'a pas réussi à générer une grande musique émotionnelle. À la recherche d'une solution, elle se retrouve dans les abysses du monde cinématographique, sur les marges d'un scénario.... Un film qui joue avec les codes du cinéma tout en faisant appel à une esthétique bien décalée qui nous fait sortir du cadre du temps pour remplir bien l'espace à la recherche de véritable émotions auprès des spectateurs. Un film étrange qui n'a pas manqué de marquer le public. En somme, des films des plus attachants les uns, les autres qui ont contribué, durant toute une semaine à plonger le public dans le monde fantastique et merveilleux qu'est le cinéma grâce à ces journées du film Européen. Un événement qui nous a introduit vers des styles et genres différents, tous tournés vers la comédie, tout en se divertissant et faire ainsi connaissance avec des cinémas venus d'ailleurs et ainsi voyager, allègrement, et sans avoir besoin de visa!

O. HIND

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