Provocation
A près tant d?années de léthargie et d?effacement, le ministère de l?Education nationale sort de son silence pour nous pondre une monstruosité. Il annonce en effet la création de cinq « lycées d?excellence ». Ils seront réservés, nous dit-il, aux élèves surdoués. Nous aurons ainsi une école du premier collège et une école du second collège que même le code de l?indigénat à l?époque de la colonisation n?avait pas osé créer. C?est le meilleur moyen de remettre en cause les valeurs qui fondent une école républicaine, laquelle répudie toute discrimination. C?est aussi une façon de détruire le caractère démocratique d?un enseignement qui donne des chances égales pour tous. Dans une Algérie où la nomenklatura se sert et ne sert pas, et cela depuis l?accession à l?indépendance, le citoyen a toutes les raisons du monde de douter des initiatives qui viennent du Pouvoir. Ce dernier a déjà monté à Alger des lycées réservés en particulier aux rejetons des maîtres du système. Même leur déjeuner ne ressemblait pas à celui des fils du peuple. Le projet du ministère de l?Education nationale ne vise-t-il pas à affirmer cette discrimination ? Incontestablement, les citoyens penseront que ces « lycées d?excellence » n?accueilleront que les enfants des maîtres du pays, qu?ils soient surdoués ou tarés. Le problème des notes ne se posera pas. Déjà, des bacs de complaisance leur sont fournis. Pourquoi pas des notes de complaisance pour l?accès à ces superlycées ! Au pays du faux et de l?usage de faux, rien n?est impossible. Les tenants du système et leur progéniture peuvent tout se permettre, assurés qu?ils sont de l?impunité et de l?absence d?une opposition solide pour dénoncer leurs frasques et leurs excès. Nos gouvernants veulent préparer l?élite dirigeante de demain, mais c?est à leur descendance que doit aller le pouvoir. Ils s?y préparent quand on sait, par exemple, que le fils d?un ouvrier ou d?un paysan ne peut plus rêver d?une bourse d?étude à l?étranger. Le projet de M. Benbouzid ne peut être perçu que comme une autre provocation. Il n?a rien fait pour sortir du marasme une école sinistrée. Et ce n?est pas le « lycée d?excellence » qui la sauvera ou qui formera un Algérien citoyen.
Posté Le : 14/02/2005
Posté par : sofiane
Ecrit par : Tayeb Belghiche
Source : www.elwatan.com