Alger - Revue de Presse



Souvent, les travaux universitaires, quand ils sont édités, connaissent des diffusions confidentielles. C'est le cas de cet essai de Nadhim Chaouche, intitulé Le roman réformiste musulman d'expression française dans l'entre-deux-guerres (1919-1939)*.
L'ouvrage s'appuie sur l'analyse du roman Myriem dans les palmes, paru à  Oran en 1936 aux éditions Plaza, sous la plume de Mohamed Ould Cheikh. Celui-ci restait méconnu, en dehors d'un article de Boudali Safir en 1953 et de son évocation dans les mémoires de Mahieddine Bachtarzi. Il apparaît à  nouveau dans Elements d'histoire culturelle algérienne (ENAL, 1984) de Abdelkader Djeghoul, puis dans un documentaire de Larbi Lakhal (ENTV, 1995). Fils d'un agha, né en 1906 à  Béchar, Mohamed Ould Cheikh, parfaitement bilingue, est l'auteur de poèmes, de nouvelles et de deux pièces de théâtre, Le Khalifa et Khaled, le Samson algérien, à  la mémoire de l'Emir Khaled mort en exil à  Damas en 1936. Myriem dans les palmes, son unique roman, relate l'histoire d'une Algérienne, Khadidja, mariée à  un Français, le capitaine Debussy, par ailleurs libre penseur. L'éducation de leurs enfants, Myriem et Jean-Hafid, est problématique. Après le décès du père, la mère parle d'Islam à  ses enfants et les met en garde contre le modernisme. Myriem, qui pilote des avions, part pour un rallye dans le désert. Elle et son frère finiront, après maintes péripéties, par avoir des conjoints musulmans. Nadhim Chaouch, maître-assistant de français à  l'Université de Mostaganem, s'attache à  situer le roman dans le contexte de l'époque. Cette lecture s'étend particulièrement aux courants d'idées qui marquent «l'environnement» du roman et le traversent. Après avoir montré qu'Ould Cheikh adhérait aux idées du réformisme musulman, l'auteur montre que le roman exprime pleinement cette adhésion (personnages, situations, symboles…). Son analyse du roman conclut que «l'auteur rejette l'idée d'assimilation à  la France». Cette approche s'inscrit dans une critique plus globale de l'orientalisme. «Il est grand temps, à  notre avis, conclut-il, d'arrêter de penser sur un modèle préétabli français, qui fait qu'on ne conçoive l'identité algérienne que telle que révélée par W. Marçais, J. Berque ou B. Stora». Cependant, l'orientalisme ne peut pas àªtre combattu par un contre-orientalisme, aussi vertueux et fondé soit-il, mais par la démonstration méthodique de son caractère déformateur et ségrégationniste. Cet essai a le mérite de faire redécouvrir une œuvre sans doute marquante de l'histoire littéraire algérienne et d'en proposer une analyse qui mériterait débat.

  *Editions Alpha-Livres. Coll. Etudes et documents. Alger, 2009. 224 p.
 

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