Alger - Revue de Presse

Implication de l?état dans la Tragédie du port d?Alger



Société à responsabilité limitée... La mise sous mandat de dépôt des cadres de la CNAN a jeté l?effroi dans les rangs des cadres gestionnaires qui mesurent avec cette affaire combien la responsabilité administrative et pénale qui pèse sur les épaules des cadres est lourde et surtout toute la solitude dans laquelle ils se retrouvent lorsqu?ils doivent rendre des comptes sur leur gestion. Parce qu?il y eut mort d?hommes et que l?affaire a été fortement médiatisée, personne ne doutait quant aux lourdes sanctions qui allaient s?abattre sur les cadres gestionnaires de cette entreprise et d?autres structures qui ont une responsabilité dans la tragédie survenue au port d?Alger. C?est chose faite. Mais ces sanctions qui sont tombées avec une célérité peu coutumière ont laissé au sein de l?opinion le sentiment d?un procès où toute la chaîne des responsabilités, du premier jusqu?au dernier maillon, n?est pas clairement établie, pour ne pas dire parcellaire. Les cadres épinglés par la justice, au-delà de leurs responsabilités dans les défaillances observées dans la mise en branle du dispositif d?alerte, de prévention et de sauvetage, dont le procès s?attachera à démonter l?écheveau, sont-ils les seuls responsables de la catastrophe vécue au port d?Alger ? Des vérités amères qui sont tombées comme un coup de massue sur la tête des Algériens ont été révélées par les cadres gestionnaires de la CNAN et du Port d?Alger en reconnaissant que le port d?Alger, et c?est certainement le cas de toutes les autres enceintes portuaires du pays, ne dispose pas de remorqueurs aptes à effectuer des missions de sauvetage en haute mer. Pas plus que le pays ne dispose d?hélicoptères pour les mêmes missions ; un grave déficit qui a poussé les pouvoirs publics à compter sur l?aide extérieure en faisant venir dans la précipitation un hélicoptère d?Espagne qui est arrivé très en retard sur les lieux du sinistre rendant inopérante son intervention. Si les gestionnaires du Port d?Alger et de la Compagnie nationale de navigation sont pleinement responsables de la gestion quotidienne de leur entreprise, ils ne sont pas pour autant comptables de décisions qui leur échappent et qui relèvent des prérogatives de la tutelle et d?autres organes de gestion. Qui décide de la politique d?investissement en moyens lourds pour la CNAN et le Port d?Alger ? Le programme d?équipement lourd relève bien évidemment de l?autorité politique ; c?est un programme gouvernemental qui se définit dans les instances de l?Exécutif. C?est dire que la responsabilité des autorités politiques, du ministre de tutelle et de l?Exécutif est totalement engagée dans cette affaire pour n?avoir pas eu la clairvoyance ou tout simplement senti la nécessité de doter les entreprises portuaires des moyens matériels à la mesure de l?ambition d?un port comme celui de la capitale et des risques naturels et prévisibles auxquels il peut être fatalement soumis un jour. Dans d?autres pays, des ministres dont les secteurs furent éclaboussés par de banals scandales n?ont pas hésité à rendre leur tablier et à démissionner en assumant publiquement leurs responsabilités. Dans l?affaire de la tragédie du port d?Alger et dans d?autres affaires, le glaive de la justice est bloqué à un certain niveau de responsabilité qui ne dépasse guère la sphère des cadres gestionnaires qui paient pour eux-mêmes et pour leurs hiérarchies. Le risque est que ces arrestations, qui vont déboucher très certainement sur des condamnations, au lieu de servir d?exemple et de mettre les gestionnaires en face de leurs responsabilités, ne produisent au contraire qu?un effet démobilisateur et stérilisant dans les rangs des cadres. Le gestionnaire est devenu l?exutoire et l?otage du politique. Quand le secteur aligne des résultats positifs, c?est toujours la tutelle qui s?approprie le succès et quand ça va mal et qu?il faut passer à la caisse ou à la casse, le responsable est tout désigné : c?est le cadre. L?Etat fonctionne comme une société à responsabilité limitée.



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